Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

sionisme (suite)

Le XXe Congrès sioniste, réuni en août 1937, rejette l’idée de l’impossibilité du mandat ainsi que les limitations à l’immigration et aux achats de terres, mais permet à l’Exécutif sioniste d’entrer en pourparlers avec le gouvernement britannique. Londres défère le dossier à la commission des mandats de la S. D. N. et approuve le rapport Peel. De nouveaux troubles ont lieu. La Grande-Bretagne sévit contre les groupements arabes et leurs chefs, mis hors la loi. Le muftī s’enfuit à Damas. Mais la terreur continue. En avril 1938, Neville Chamberlain envoie une commission de partage chargée de délimiter les États projetés. Dans l’impossibilité d’arriver à une solution, le plan de partage est abandonné. Une conférence de la table ronde convoquée à Londres en février-mars 1939 ne donne rien. On la suspend.

Le gouvernement britannique impose alors sa propre solution, formulée dans le Livre blanc du 17 mai 1939. Un total de 75 000 Juifs doit être admis entre cette date et le 1er avril 1944. Il ne pourra ensuite y avoir d’immigration qu’avec l’autorisation des Arabes. Sur la base du Livre blanc, une loi de février 1940 concernant les transactions foncières interdit l’achat de terres par les Juifs ailleurs que dans une petite partie du pays (5 p. 100). Dans une autre partie (36 p. 100), les transactions seront soumises à l’approbation du haut-commissaire. Dans les dix ans, le gouvernement doit faire de la Palestine un État autonome, ne comptant que 30 p. 100 de Juifs. Ceux-ci, qui n’obtiennent ainsi que le seizième des territoires qu’ils auraient pu espérer de la Déclaration Balfour, protestent. La commission permanente des Mandats de la S. D. N. fait observer que le document est même contraire à l’interprétation que les Britanniques eux-mêmes ont donnée du mandat.

La Seconde Guerre mondiale éclate avant que le Conseil de la S. D. N. ait pu voter. Réuni à Genève en août 1939, le XXIe Congrès sioniste a encore eu le temps de rejeter le Livre blanc. Les Britanniques mettent leur projet à exécution. La loi sur le transfert des terres est promulguée. La Palestine est divisée en trois zones, dont une seulement est ouverte aux achats de terres. Les Juifs protestent encore. Un peu avant la guerre, Roosevelt a déclaré que, le peuple américain n’ayant pas été consulté, les États-Unis ne sanctionneront pas le Livre blanc. Taisant malgré tout leurs revendications, les Juifs combattront l’hitlérisme aux cotés des Britanniques : en 1943 la « Brigade juive » sera créée.


Depuis la Seconde Guerre mondiale

Malgré le rôle joué par les Juifs dans la lutte menée par les Alliés, l’immigration demeure interdite. Les bateaux de réfugiés errent en mer, repoussés de partout, et finissent par couler, comme le Strouma. Si des certificats d’immigration sont accordés, ils viennent en déduction du contingent des 75 000 Juifs pour cinq ans, prévus par le Livre blanc. L’immigration illégale se poursuit cependant, car les Juifs appliquent la boutade de Ben Gourion : « Combattre Hitler comme s’il n’y avait pas le Livre blanc ; combattre le Livre blanc comme s’il n’y avait pas Hitler ! »

En mai 1945, il y a des milliers de réfugiés dans les camps allemands : ils veulent, pour la plupart, gagner la Palestine. La Grande-Bretagne, désireuse de maintenir son empire colonial, anxieuse de protéger ses communications avec ses possessions, cherche à garder l’amitié des États musulmans, à l’heure où l’Inde et l’Égypte réclament leur indépendance. Elle a besoin d’une base en Palestine pour protéger le canal de Suez. Tout en encourageant la formation de la ligue arabe elle autorise l’admission de 1 500 Juifs par mois. Juifs et Arabes sont également mécontents. Les Américains, qui ont besoin des Arabes pour leurs bases aériennes et leurs concessions pétrolières, commencent à s’intéresser au Proche-Orient. Ils doivent compter aussi avec la très importante communauté juive des États-Unis. Truman demande donc l’admission de 100 000 « personnes déplacées ». Les Britanniques imposent la formation d’une commission mixte d’enquête anglo-américaine ; celle-ci publie en mai 1946 un rapport qui recommande le maintien du mandat anglais jusqu’au règlement de la question par l’O. N. U. On ne doit, dans l’immédiat, créer aucun État, mais admettre 100 000 Juifs pour 1946. On prévoit d’abroger le Livre blanc, ce qui satisfait les Juifs, par ailleurs déçus de ne pouvoir créer un État. Les Arabes font une grève générale dans leurs différents pays. Les Britanniques, eux, n’acceptent d’obtempérer que si les États-Unis partagent dépenses et responsabilités. Truman aiderait volontiers au transport des Juifs, mais il ne veut pas engager la responsabilité de son gouvernement sur tout plan de règlement, et cela d’autant plus que les Arabes ont protesté contre l’ingérence américaine et ont menacé de reprendre aux Américains leurs concessions pétrolières si ceux-ci restent favorables aux sionistes. Du côté juif, les organisations extrémistes de l’Irgoun et du groupe Stern répondent à la répression britannique par des attentats : le 22 juillet 1946, l’explosion de l’hôtel « King David », siège de l’état-major britannique, fait une centaine de victimes. Les Britanniques proclament la loi martiale. Le 31 juillet, le plan Morrisson (du nom d’Herbert Stanley Morrisson [1888-1965]) est exposé devant les Communes. Il maintient la suprématie britannique, dont ne veulent ni les Juifs ni les Arabes, laisse aux Britanniques le gouvernement central, donc le contrôle de l’immigration, et crée une province juive comprenant les secteurs déjà occupés par les Juifs (4 000 km2), un district des Lieux saints, une province arabe et un secteur « neutre » pour les bases britanniques. Les provinces juive et arabe auraient l’autonomie administrative.

Le XXIIe Congrès sioniste, réuni à Bâle en décembre 1946, repousse ce plan ; en attendant, une conférence de la table ronde est réunie à Londres par les Britanniques. On parle de tout, sauf de la solution du problème palestinien. La lutte devient très vive en Palestine entre la résistance juive et la police britannique. Weizmann, désapprouvé à cause des ménagements qu’il souhaite à l’égard de la Grande-Bretagne, démissionne. C’est Ben* Gourion qui le remplace.