Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Atlantique (océan) (suite)

Les pluies sont rares, mais le climat n’est pas aride ; la chaleur de l’air entretient une intense évaporation et un accroissement de la salinité. La chaleur des eaux de surface, la faiblesse des contrastes saisonniers sont autant de facteurs contraires à un échange convectif avec les eaux plus profondes : comme le renouvellement en sels nutritifs est freiné, les régions des calmes tropicaux sont de véritables déserts biologiques. La pêche y est donc pratiquement inconnue.

Toutefois, la régularité des vents a de tout temps favorisé les traversées transocéaniques, surtout depuis les grandes découvertes : la route des galions allait des Canaries vers Carthagène ou l’isthme de Panamá, tandis qu’au sud cinglaient les voiliers des négriers venus du Congo ou de l’Angola. Sainte-Hélène et Ascension, découvertes par João da Nova en 1502, sévèrement bordées par de hautes falaises battues par de longues houles, n’ont plus l’importance qu’elles avaient à l’époque de la marine à voile. Elles sont faiblement peuplées (5 000 et 1 500 hab. respectivement), et le commerce y est en déclin : les seules visites régulières sont celles des tortues de mer, qui, chaque été, viennent déposer leurs œufs dans les sables chauds des grèves étroites.

• C. Les marges occidentales. Toute la région comprise entre la Floride et 20° S., où abordèrent les premiers découvreurs, constitue un domaine à part, à cause de la complexité des fonds et de la touffeur du climat. Ce dernier est plus chaud, car la région, soumise à une forte radiation, est baignée par le flux de l’air venu de la face de l’anticyclone épargné par les coulées polaires. Les températures sont toujours fortes tout au long de l’année (amplitude insignifiante) : seules les brises de terre et de mer parviennent à rendre agréables certains rivages ; lorsqu’elles cessent, la chaleur devient vite accablante et le climat plus humide, puisque l’air y parvient après un très long parcours océanique, au cours duquel il est devenu plus instable. Les pluies sont alors copieuses, surtout sur les reliefs des îles et les rivages tournés vers l’est (îles « au vent »). Les eaux chaudes qui viennent de l’est connaissent deux types de circulation :
a) Le domaine guyano-brésilien n’a pas les eaux les plus chaudes et les plus salées, car les pluies (aux régimes complexes et variés) y sont abondantes et les débits des fleuves volumineux. Le courant sud-équatorial se partage en deux branches de part et d’autre du cap São Roque. Vers le sud, c’est le courant du Brésil, lent (de 0,50 à 1 m/s) et peu épais (de 100 à 200 m). Vers le nord, c’est le courant des Guyanes, dont la température est pratiquement constante (26 °C en février et 28 °C en novembre), mais où la salinité varie entre 35 et 36,5 p. 1 000, notamment lorsque son cours emprunte la plate-forme continentale, où les eaux sont dessalées par les apports de l’Amazone.
Les eaux sont troubles au printemps et en été, surtout au large des Guyanes. La concentration en sels nutritifs et en plancton est faible, sauf au voisinage des parties agitées de la plate-forme et dans les baies vigoureusement parcourues par des courants alternant selon les saisons. Aussi, dans l’ensemble, la pêche est limitée, archaïque ou artisanale. Les vases, transportées souvent très loin, jouent un grand rôle dans la sédimentation de la plate-forme et la construction d’immenses plaines alluviales, marécageuses et inondables, ceinturées par des cordons dunaires ou des levées littorales successives colonisées par les palétuviers. Les ports sont rares, car leur construction se heurte à de difficiles problèmes de drainage.
b) Le domaine de la « méditerranée américaine » (mer des Antilles et golfe du Mexique) est beaucoup plus compliqué, à cause du morcellement des terres entre les deux parties du Nouveau Monde. Ce sont des mers bordières ceinturées d’arcs insulaires et où l’on observe tous les symptômes de la vie profonde de l’écorce terrestre : éruptions sous-marines, séismes au voisinage des fosses. Ce sont des mers presque fermées (les marées y sont faibles, sauf dans les « canales » unissant les divers bassins), des mers à seuils. La progression des eaux polaires en profondeur (sur le fond, eaux arctiques couvertes par les eaux antarctiques intermédiaires, toutes deux peu salées) est soumise à de sévères limitations : ces eaux ne peuvent franchir les seuils successifs que lorsqu’elles y acquièrent une densité suffisante pour pénétrer par « cascading ». On constate donc un ralentissement des eaux et même un confinement dans les parties les plus profondes de la mer des Antilles : dans le bassin de Cariaco (1 390 m), isolé par un seuil de 150 m, persistent à certaines périodes des conditions anaérobies, c’est-à-dire que l’oxygène dissous y est remplacé par de l’hydrogène sulfuré. En surface, les eaux pénètrent par les détroits situés au sud des Petites Antilles où s’engouffrent 26 millions de mètres cubes d’eau par seconde venant du courant des Guyanes, mais surtout du courant nord-équatorial. L’écoulement se fait vers l’ouest sous l’impulsion des vents dominants, avec des accélérations au passage des détroits (par exemple, dans le « canal » de Yucatán) ou des épanouissements dans les bassins, où les courants affectent la forme de tourbillons, dont certains manifestent une relative permanence (comme ceux du golfe du Mexique). L’eau chaude (20 °C) et salée (de 36,5 à 37 p. 1 000) est couverte par l’eau dessalée sous l’effet des apports fluviatiles (notamment le Mississippi). Partout, la salinité de la couche de surface varie saisonnièrement selon l’intensité des pluies ou la force des vents, qui, au voisinage des côtes, favorisent la remontée des niveaux plus salés.

C’est sur les eaux très chaudes que sont engendrés ou régénérés en été les cyclones, qui, selon un classique parcours hyperbolique, se dirigent vers la côte sud des États-Unis, provoquant sur leur passage des pluies torrentielles et des ondes destructrices ravageant les côtes basses. Le golfe du Mexique apparaît comme un véritable réservoir de chaleur, où l’eau s’accumule, puis s’échappe par le courant de Floride (débit estimé à 26 millions de m3/s).