Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Actinopodes (suite)

• Les Radiolaires sont caractérisés par l’existence d’une membrane (capsule centrale) qui sépare l’endoplasme de l’ectoplasme et par un squelette fait de spicules de silice amorphe. Ceux-ci peuvent être isolés, ramifiés, anastomosés, former une ou plusieurs coques grillagées. La capsule centrale présente des perforations (fusules) livrant passage aux baguettes stéréoplasmiques ; ces perforations sont soit très nombreuses, uniformément réparties (Spumellaires) ou groupées selon une calotte polaire (Nassellaires), soit limitées à trois (Phæodariés), dont une très importante. L’axoplaste peut être central, seulement encastré dans une dépression du noyau ou réparti tout autour de la membrane nucléaire. Il semble exister une certaine correspondance entre la position de l’axoplaste, la répartition des fusules et l’architecture générale du squelette, comme si le stéréoplasme intervenait dans le métabolisme de la silice. La reproduction est assurée essentiellement par sporogenèse, mais, d’une façon générale, la multiplication des chromosomes pendant la croissance du Protiste ne s’accompagne pas de divisions nucléaires ; l’unique noyau devient, à la suite d’endomitoses, très volumineux, polyploïde. Le fractionnement simultané de ce noyau primaire en de nombreux petits noyaux est suivi de la formation de spores biflagellées. Aussi bien chez les Acanthaires que chez les Radiolaires, on ne sait pas si les spores s’unissent comme des gamètes ou si elles se développent séparément.

• Les Héliozoaires n’ont pas de membrane capsulaire. Certains présentent des spicules indépendants, siliceux, exceptionnellement chitinoïdes, formant feutrage dans l’ectoplasme. D’autres agglomèrent à la surface des particules minérales étrangères. Les baguettes stéréoplasmiques peuvent prendre appui soit sur un axoplaste central, soit sur la membrane nucléaire. La reproduction peut s’effectuer par simple division binaire ou, après passage par un stade plurinucléé, par division multiple, simultanée ou successive (bourgeonnement). En outre, les Héliozoaires sont susceptibles de s’entourer d’une membrane kystique, à l’abri de laquelle se déroule une reproduction sexuée : des gamètes, formés à la suite d’une maturation rappelant étrangement une ovogenèse, copulent pour constituer un zygote qui se multiplie avant l’éclosion du kyste.

Aux Héliozoaires sensu stricto se rattachent les Protéomyxées, qui, à certains stades évolutifs, se présentent soit comme des Amibes, soit comme des Flagellés.


Écologie

Tous les Actinopodes sont planctoniques, à l’exception de quelques Héliozoaires et de rares Acanthaires pourvus d’un pédoncule de fixation. Acanthaires et Radiolaires sont marins ; les Héliozoaires se rencontrent aussi bien en eaux douces ou saumâtres qu’en mer. Seuls les squelettes de Radiolaires ont participé de façon souvent importante, et dès le Cambrien, à la formation de roches sédimentaires (radiolarites, jaspes).

J. et M. C.

action (sociologie de l’)

Sociologie qui s’attache à l’élucidation des comportements des acteurs individuels ou collectifs du jeu social et à leur insertion dans le processus historique.


La sociologie de l’action doit être avant tout définie par rapport aux formes antérieures de l’analyse sociologique. Dans un premier temps, les faits sociaux sont expliqués par des déterminants non sociaux. D’un côté, on recourt à des explications « naturelles » comme le climat, la race ou le rôle de certains individus. De l’autre, on se réfère à une essence ou à une image de l’homme, ce qui revient à rapporter les faits sociaux à des besoins ou à des tendances supposées constantes des acteurs. Ce type d’analyse entièrement présociologique et dont Durkheim, mieux que tout autre, a fait la critique s’est trouvé en fait dépassé au cours du xxe s. par un autre type d’analyse, qu’on appelle généralement historicisme. Cet historicisme prend lui-même deux formes à la fois opposées et complémentaires. D’un côté, la révolution industrielle amène à considérer que ce sont les forces de production qui constituent non seulement le fondement, mais le déterminant principal des conduites sociales ; de l’autre, ces forces de production elles-mêmes sont considérées comme des « systèmes d’idées », selon l’expression de Saint-Simon. Naturalisme et idéalisme se correspondent ainsi et dialoguent sans fin. L’ensemble de ces démarches pré- ou protosociologiques a comme caractéristique centrale de reposer sur une vision dualiste : d’une part, les faits naturels et, de l’autre, les intentions sociales, ou encore, d’une part, les déterminations naturelles et, de l’autre, la nature humaine. La sociologie de l’action sous toutes ses formes est d’abord le refus d’une telle séparation, le rejet de l’opposition entre individu et société, entre nature et culture. Son intention principale est d’analyser la formation et le fonctionnement des catégories, des règles, des conduites et des croyances qui définissent les conduites possibles dans une société donnée.

Mais, à partir de là, la sociologie de l’action se développe presque aussitôt dans deux directions largement opposées. Chez certains, elle se centre sur l’étude des conduites « conscientes ». Cela amène à considérer les acteurs dans un cadre défini par le système social, c’est-à-dire par ses valeurs, ses normes, ses formes d’organisation collective, la définition des rôles et des statuts. La société elle-même apparaît comme un acteur cherchant à combiner, dans un équilibre toujours instable mais toujours rétabli, le maintien de ses valeurs et de son intégration, d’un côté, et son adaptation à l’environnement, de l’autre. L’œuvre de Talcott Parsons aux États-Unis est l’expression la plus cohérente et la plus approfondie de cette sociologie fonctionnaliste de l’action. Elle étudie les conditions dans lesquelles, malgré la différenciation sociale, se maintient ou se forme l’unité dynamique de la société. Il s’agit d’une sociologie de l’action en ce sens que l’analyse ne se réfère plus à un ensemble défini historiquement, mais considère les conditions de l’échange social dans une perspective générale qui s’inspire de Durkheim, des dernières œuvres de Weber et aussi de certains économistes comme Marshall. Un autre courant de la sociologie de l’action part, au contraire, de la pensée marxiste ou, tout au moins, de certains de ses aspects. La rupture avec l’historicisme s’opère ici plutôt par une remise en cause du sens de la situation historique d’une société. Les forces productives sont considérées par cette sociologie comme l’action que la société exerce sur elle-même, grâce à la connaissance, action qui définit un champ d’action historique. Celui-ci est à la fois un modèle de connaissance, expression sociale de cette capacité d’une société d’agir sur elle-même et de se transformer, et un modèle culturel, c’est-à-dire la saisie de cette capacité de transformation, de cette créativité. Ce système d’action historique définit non pas des valeurs, mais une problématique, une mise en situation de la société. Les classes sociales entrent en rapport et en conflit pour le contrôle de ce champ d’action historique. Cette étude de l’historicité conduit ensuite à l’analyse du système politique ou institutionnel d’une société, c’est-à-dire de la discussion et de la définition des règles du jeu social. De là, la sociologie poursuit sa route vers l’étude des organisations et de leur fonctionnement. La démarche générale de cette sociologie de l’action consiste donc à passer de la problématique d’une société aux réponses qu’elle y apporte, qui sont toujours à la fois l’expression d’une pratique et celle d’un pouvoir. Ce qu’on nomme les valeurs n’est, en fait, que l’idéologie par laquelle les détenteurs du pouvoir expriment leur emprise sur l’ensemble de la société et remplacent le jeu dialectique des éléments de la situation historique et des forces sociales par l’apparente intégration d’un ensemble de principes, de normes et de règles. Aussi, cette sociologie de l’action qu’Alain Touraine appelle actionnaliste, en l’opposant à la sociologie fonctionnaliste, est-elle surtout sensible au processus de transformation de la société, aux rapports de classes, aux conflits de pouvoir, aux mouvements sociaux. La sociologie fonctionnaliste, au contraire, est davantage une sociologie des échanges et, donc, des conventions, tandis que la sociologie actionnaliste est d’abord une étude de la production de la société par elle-même.