Scharoun (Hans) (suite)
Scharoun a toujours été considéré par Hugo Häring (1882-1958) comme le véritable réalisateur du principe de développement organique dont celui-ci était l’inspirateur : la villa de l’industriel Schminke à Löbau, en Saxe (1930-1932), offre en effet un type de distribution fort éloigné de l’esthétique fonctionnaliste, mais riche en qualités spatiales — notamment dans les rapports fluides de l’intérieur et de l’extérieur.
Comme membre du mouvement Der Ring, Scharoun s’intéressera directement aux grands programmes de logements sociaux réalisés à Berlin entre 1925 et 1932, sous la direction de Martin Wagner (1885-1957) : il participe principalement à l’ensemble « Siemensstadt » en 1930 ; les logements qu’il y conçoit ont la particularité de posséder des séjours « traversants », à double exposition.
Interrompue en 1932, la carrière de Hans Scharoun — qui, à l’inverse d’un Mies van der Rohe* ou d’un Gropius*, demeurera en Allemagne — recommence en 1945, lorsqu’il prend les fonctions de directeur du département de l’habitat et de la reconstruction du Grand Berlin : le Berliner Kollektiv, groupe dont il est l’animateur, propose en 1946 un plan de reconstruction totale de la ville selon de nouveaux principes. Scharoun les reprendra quelques années plus tard dans un second projet (Hauptstadt Berlin, 1958). Dans le même temps, il devient directeur de l’Institut de la construction (1947-1950), s’y charge de la rénovation des quartiers de Spandau et de Potsdam et enseigne l’urbanisme à la « technische Universität » (1947-1960), où il formera toute une génération d’architectes.
Architecte-urbaniste, il construit des ensembles considérables au Hansaviertel et à Charlottenburg-Nord (1954 et 1956-1961), dans un style quelquefois très déconcertant par sa violence et ses dysharmonies plastiques. Les immeubles « Romeo und Julia » de Stuttgart (1954-1959) ainsi que le lycée de jeunes filles de Lünen, en Westphalie (1956-1962), fortement teintés d’expressionnisme*, montreront que cette esthétique peut cependant s’imprégner d’une profonde sensibilité à l’humain et rester, en définitive, fidèle à l’esprit de l’architecture organique.
Dans ses deux derniers ouvrages — la Philharmonie de Berlin (1956-1963) et la Bibliothèque (1964-1975) qui lui fait vis-à-vis —, Scharoun transfigurera son œuvre, organisant le déroulement spatial intérieur en un spectacle d’une extraordinaire puissance d’émotion. À ce titre, il reste l’un des maîtres de l’architecture actuelle, ayant su, au-delà de l’idée fonctionnaliste, redonner à l’espace ses qualités plastiques et les rendre, de plus, hautement signifiantes.
F. L.
➙ Architecture / Berlin.
CATALOGUES D’EXPOSITIONS : Die Gläserne Kette, visionäre Architekturen aus dem Kreis um Bruno Taut, 1919-1920, Städtisches Museum, Leverkusen, et Akademie der Künste, Berlin (1963). / P. Pfankuch, Hans Scharoun, Akademie der Künste, Berlin (1967).