Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Scharoun (Hans) (suite)

Scharoun a toujours été considéré par Hugo Häring (1882-1958) comme le véritable réalisateur du principe de développement organique dont celui-ci était l’inspirateur : la villa de l’industriel Schminke à Löbau, en Saxe (1930-1932), offre en effet un type de distribution fort éloigné de l’esthétique fonctionnaliste, mais riche en qualités spatiales — notamment dans les rapports fluides de l’intérieur et de l’extérieur.

Comme membre du mouvement Der Ring, Scharoun s’intéressera directement aux grands programmes de logements sociaux réalisés à Berlin entre 1925 et 1932, sous la direction de Martin Wagner (1885-1957) : il participe principalement à l’ensemble « Siemensstadt » en 1930 ; les logements qu’il y conçoit ont la particularité de posséder des séjours « traversants », à double exposition.

Interrompue en 1932, la carrière de Hans Scharoun — qui, à l’inverse d’un Mies van der Rohe* ou d’un Gropius*, demeurera en Allemagne — recommence en 1945, lorsqu’il prend les fonctions de directeur du département de l’habitat et de la reconstruction du Grand Berlin : le Berliner Kollektiv, groupe dont il est l’animateur, propose en 1946 un plan de reconstruction totale de la ville selon de nouveaux principes. Scharoun les reprendra quelques années plus tard dans un second projet (Hauptstadt Berlin, 1958). Dans le même temps, il devient directeur de l’Institut de la construction (1947-1950), s’y charge de la rénovation des quartiers de Spandau et de Potsdam et enseigne l’urbanisme à la « technische Universität » (1947-1960), où il formera toute une génération d’architectes.

Architecte-urbaniste, il construit des ensembles considérables au Hansaviertel et à Charlottenburg-Nord (1954 et 1956-1961), dans un style quelquefois très déconcertant par sa violence et ses dysharmonies plastiques. Les immeubles « Romeo und Julia » de Stuttgart (1954-1959) ainsi que le lycée de jeunes filles de Lünen, en Westphalie (1956-1962), fortement teintés d’expressionnisme*, montreront que cette esthétique peut cependant s’imprégner d’une profonde sensibilité à l’humain et rester, en définitive, fidèle à l’esprit de l’architecture organique.

Dans ses deux derniers ouvrages — la Philharmonie de Berlin (1956-1963) et la Bibliothèque (1964-1975) qui lui fait vis-à-vis —, Scharoun transfigurera son œuvre, organisant le déroulement spatial intérieur en un spectacle d’une extraordinaire puissance d’émotion. À ce titre, il reste l’un des maîtres de l’architecture actuelle, ayant su, au-delà de l’idée fonctionnaliste, redonner à l’espace ses qualités plastiques et les rendre, de plus, hautement signifiantes.

F. L.

➙ Architecture / Berlin.

 CATALOGUES D’EXPOSITIONS : Die Gläserne Kette, visionäre Architekturen aus dem Kreis um Bruno Taut, 1919-1920, Städtisches Museum, Leverkusen, et Akademie der Künste, Berlin (1963). / P. Pfankuch, Hans Scharoun, Akademie der Künste, Berlin (1967).

Scheele (Carl Wilhelm)

Chimiste suédois (Stralsund 1742 - Köping 1786).


Le père de Scheele, chargé d’une nombreuse famille, ne peut subvenir aux frais d’une longue éducation, et l’enfant, qui marque au surplus peu de goût pour les études classiques, est placé dès sa treizième année chez un apothicaire de Göteborg, où il reste pendant huit ans, d’abord comme apprenti, puis comme élève. C’est là qu’il s’initie tout seul à la chimie, lisant avec passion les ouvrages de Caspar Neumann, Nicolas Lémery, Johann Kunckel et Georg Ernst Stahl, et réalisant de multiples expériences avec un matériel rudimentaire.

En 1765, il quitte Göteborg pour Malmö et il va diriger une pharmacie à Stockholm (1767), puis à Uppsala (1770). Il y fait la connaissance de T. O. Bergman, qui le prend sous sa protection et à qui va le lier une étroite amitié.

Ses travaux, à cette époque, lui ont acquis une véritable autorité. Il entre à l’Académie des sciences de Stockholm, mais refuse l’offre d’une chaire à Berlin, que lui fait Frédéric le Grand, ainsi que des propositions de même nature en Angleterre ; car il recherche avant tout la tranquillité et est dépourvu de la moindre ambition. Lorsqu’il apprend la mort d’un pharmacien de Köping, il va s’établir chez la veuve et continue à partager ses soins entre les travaux de son officine et les recherches scientifiques. Une fièvre aiguë l’emporte à quarante-trois ans, lui laissant à peine le temps d’assurer à la veuve chez laquelle il vit son nom et sa modeste épargne.

S’il est difficile de rencontrer une vie plus pauvre en incidents que celle de Scheele, l’ensemble imposant des travaux qu’il a menés au cours de sa brève existence a rendu son nom célèbre. Il s’est montré le modèle même du chimiste expérimentateur et a accumulé les découvertes les plus remarquables.

Il isole l’hydrogène en 1768 et découvre sans doute l’oxygène, peu de temps avant Priestley, en le retirant du salpêtre ; mais il ne publie cette découverte qu’en 1777. En 1774, il obtient pour la première fois le chlore, par action de l’acide chlorhydrique sur le bioxyde de manganèse ; il observe la plupart des propriétés de cet élément, notamment son pouvoir décolorant. Il montre que le graphite est du carbone, étudie le phosphore, le chlorure d’argent, dont il constate le noircissement à la lumière, le permanganate de potassium, l’hydrogène sulfuré ; il distingue la baryte de la chaux. On lui doit encore les découvertes de l’acide fluorhydrique et de l’acide fluosilicique (1771), de l’acide arsénique et de l’hydrogène arsénié (1775), de l’acide cyanhydrique (1782), des acides molybdique et tungstique. Son nom va rester attaché à l’arsénite de cuivre (vert de Scheele), que l’on utilisera comme colorant. En 1773, il observe l’adsorption des gaz par le charbon de bois. Dans le domaine de la chimie organique, il découvre l’acide benzoïque (1775), il isole l’acide tartrique, l’acide urique, l’acide oxalique, les acides lactique, citrique, malique, gallique, mucique. Enfin, en 1779, il découvre et étudie la glycérine.