Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Asturies (suite)

Ce relief abrupt au voisinage de la mer explique la forte humidité de l’air et l’abondance des précipitations, presque partout supérieures à 1 000 mm. Le climat est de type océanique avec des hivers doux et pluvieux et des étés tièdes et moins humides, bien qu’aucun mois ne soit sec. Les Asturies sont donc un pays vert : la forêt, où dominent les chênes, les hêtres et les châtaigniers, drape les pentes jusqu’à 1 900 m, où elle cède la place à un étage alpin. Mais cette forêt est très dégradée aux étages inférieurs, où la lande l’a supplantée et où l’homme a replanté des bois de pins et d’eucalyptus.

Les Asturies sont par excellence une terre d’élevage. Les bovins, de races locales et depuis peu de races hollandaises et suisses, sont élevés pour la viande et secondairement pour le lait. Dans la partie occidentale, ils continuent à fréquenter les pâturages d’altitude, où viennent aussi transhumer des ovins de la Meseta. Mais, ailleurs, le troupeau est nourri toute l’année dans les prairies des régions littorales. Les cultures (maïs et pomme de terre essentiellement) occupent à peine le dixième de la surface et sont même de plus en plus consacrées à l’élevage (luzerne). Dans la région côtière orientale, les prairies sont plantées de pommiers destinés principalement à la production de cidre. La terre est divisée en petites propriétés éparpillées en de minuscules parcelles, sur lesquelles on pratique la polyculture. Sur le littoral, la pêche est une ressource complémentaire de faible valeur.

Les fortes densités de population s’expliquent avant tout par l’importance des activités industrielles, qui occupent plus de la moitié de la population active. Les industries sont nées du charbon, dont les gisements sont localisés dans les vallées du río Nalón et de ses affluents, le Caudal et l’Aller. La production est de l’ordre de 8 Mt. L’exploitation, souvent difficile, est en général peu rentable. Une récente politique de rationalisation des mines a entraîné la fermeture de nombreux puits. Le chômage s’est ajouté aux difficiles conditions de travail et de vie des mineurs, et les conflits sociaux se sont aggravés.

Le charbon est en partie consommé sur place dans les usines sidérurgiques de Mieres et de La Felguera, ainsi que dans les industries chimiques, qui se sont diversifiées depuis peu (engrais). Il est aussi exporté en partie par les ports de Gijón et Avilés, par lesquels le fer est importé. Des industries consommatrices de houille s’y sont fixées : verrerie, céramique, sidérurgie et construction navale à Gijón, qui dispose de son propre bassin houiller à La Camocha, et dont le port de Musel est en expansion ; verrerie, fonderie de zinc, fabrique d’aluminium et la plus puissante aciérie d’Espagne à Avilés.

Oviedo (154 000 hab.), ancienne capitale du royaume des Asturies, occupe une position de carrefour en plein cœur du foyer industriel, auquel elle doit son essor. Fortement industrialisée (fabrique d’armes et d’explosifs), elle est avant tout une place commerciale, un centre bancaire et financier, et dotée de fonctions administratives et intellectuelles.

L’expansion de la sidérurgie

En 1950, l’État a chargé l’Institut national de l’industrie (I. N. I.) de fonder une entreprise sidérurgique nationale, l’ENSIDESA, pour monter à Avilés une puissante aciérie dans le but de satisfaire les besoins espagnols et de briser le monopole de la sidérurgie espagnole. En 1967, elle a produit 1 171 000 t d’acier, 1 227 000 t de fonte et 1 475 000 t de laminés. Son développement risque d’être entravé par l’insuffisance du port.

En 1961, trois sociétés asturiennes (Mières, Duro Felguera et Santa Bárbara) se sont regroupées dans l’UNINSA pour créer à Veriña, près de Gijón, un train de laminage moderne. Elles ont obtenu le soutien financier de l’État et de Krupp pour monter, à Veriña également, une usine sidérurgique d’une capacité de 2,5 Mt de fonte par an, entrée en service après 1970, après la modernisation du port de Musel permettant d’accueillir des minéraliers de 60 000 t.

R. L.


L’histoire


L’Antiquité

Les Asturies étaient peuplées dès l’époque paléolithique (peintures des grottes d’Altamira). Le pays antique des Astures était plus étendu que les Asturies actuelles. On distinguait les Astures transmontani, ou Lucenses, vivant dans la région du Lucus Asturum (Oviedo), forêt sacrée où se célébraient les rites d’une religion préromaine, et, séparés d’eux par la cordillère Cantabrique, les Astures Augustani, établis dans la région d’Astorga et de León. Ce n’est d’ailleurs que sous Auguste que les populations du versant nord firent leur soumission, après une longue guerre entreprise en 29 av. J.-C. Les révoltes se succédèrent et le pays fut pacifié. Les agglomérations les plus notables étaient Asturica Augusta (Astorga) et Legio septima gemina (León), toutes deux camps légionnaires. Le pays des Transmontani ne semble pas avoir été jamais réellement romanisé, mais l’Asturie dans son ensemble, qui faisait partie de l’Espagne Citérieure, et qui était renommée pour ses chevaux et ses cavaliers, fournit des troupes auxiliaires à l’armée romaine : l’épigraphie signale leur présence en divers points de l’Empire. Elles ont contribué à la diffusion des religions orientales et du christianisme : l’archéologie révèle qu’Astorga fut un foyer de gnosticisme. Les priscillianistes s’y manifestèrent eux aussi avec ardeur à la fin du ive s.

L’Asturie forme avec la Galice à dater d’Auguste, à l’intérieur de la province, un diocèse séparé, gouverné par un légat qui commande deux légions. Sous Caracalla, ce diocèse devient une province, l’Hispania Nova Citerior, dans laquelle l’Asturie forme un conventus juridicus. À dater de Dioclétien, l’Asturia et Gallaecia est l’une des provinces du diocèse d’Espagne. Elle devient consulaire par la suite.


L’époque barbare

Lors des invasions barbares, le nord-ouest de l’Espagne est occupé par les Suèves, qui ne semblent pas s’être risqués chez les Transmontani. Les Wisigoths leur succèdent et occupent progressivement le pays, s’établissant au sud d’Astorga vers 573. Le roi Sisebut (612-621) envoie une armée pour pacifier les Astures en rébellion, et Suintila (621-631) doit encore en découdre avec eux. Toutefois, il bat monnaie à Astorga. En 673, Wamba doit rétablir l’ordre chez les Astures en même temps que chez les Cantabres. De cette époque datent les trois seules inscriptions chrétiennes de la région : leur rareté est un signe de l’arriération de la contrée. Le pays des Lucenses est aussi réfractaire au christianisme qu’à la romanisation. Les évêques d’Astorga participent aux conciles de l’Église wisigothique, mais le siège épiscopal n’est pas occupé de façon certaine avant le ixe s. Quant à la vallée du Boera, au nord d’Astorga, elle donne au viie s. le spectacle d’une véritable Thébaïde occidentale. Saint Fructueux, futur métropolitain de Braga, a fondé plusieurs monastères, auxquels il a donné une règle originale où l’on a pu voir l’écho de celle des premiers ascètes priscillianistes de la région.