Samory Touré (suite)
Mais, de la fin de 1888 à celle de 1890, Samory écrase la révolte et reconquiert son empire, amoindri, ravagé et en partie désert. Il renonce désormais à sa politique musulmane et reconstruit l’État autour de la fidélité à sa personne en vue du combat à mort contre les Français, qu’il sait désormais inévitable. Il s’efforce, cependant, de retarder celui-ci autant que possible, afin de moderniser son armée avec des fusils qu’il achète en Sierra Leone.
L’échéance survient en avril 1891 avec l’agression non provoquée d’Archinard. Malgré une résistance héroïque dont l’efficacité surprend et retarde les Français, Samory subit des pertes telles qu’il renonce à la résistance frontale. Comme l’honneur lui interdit de se rendre, il décide de se dérober en recherchant une région écartée où il pourra gagner du temps.
Au début de 1894, il évacue donc son ancien domaine et conquiert rapidement le nord de la Côte-d’Ivoire et une fraction du Ghāna. C’est là qu’il repousse la « colonne de Kong », commandée par Monteil, en avril 1895.
Dans ce nouvel Empire, Samory, campé en terre étrangère, a renoncé à tout projet de réforme et se contente d’exiger la soumission de ses nouveaux sujets.
Le sursis ne peut durer, car, de tous côtés, les puissances européennes se lancent au partage de l’Afrique. Samory essaie, non sans habileté, d’opposer les Français et les Anglais, qui le cernent de tous côtés. Mais le massacre imprévu de la colonne Braulot à Bouna en août 1897 rappelle l’attention sur lui. Traqué par les troupes du Soudan français, Samory sera arrêté à Gélémou (Côte-d’Ivoire) en septembre 1898 et mourra en exil au Gabon en février 1900.
Son œuvre politique a disparu, mais la société malinké reste marquée par son empreinte, et sa lutte courageuse pour rester maître de son destin est une source d’inspiration pour la jeune Afrique.
Y. P.
➙ Côte-d’Ivoire / Guinée / Mali (république du).
Y. Person, Samori (Ifan, Dakar, 1968 ; 2 vol.).