Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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risque minier (suite)

Dans les houillères, l’incendie peut être provoqué par un feu d’inflammation spontanée du charbon. Dans des fissures à l’abri du refroidissement par l’air, certains charbons, surtout s’ils sont pyriteux, s’échauffent par oxydation lente. Cette chaleur confinée aboutit à la combustion d’un petit noyau de charbon dont l’incandescence progresse vers l’alimentation en air des fissures, de sorte que le feu finit par déboucher dans la galerie, où le courant d’air l’attise, et dégénère en incendie grave, dont les fumées ont une teneur dangereuse en monoxyde de carbone par suite de la combustion incomplète du charbon ; de plus, elle dégage les matières volatiles du charbon, comme dans un four à coke, avec crainte d’une combustion d’allure explosive de ces gaz. Échauffement ou feu doit être combattu dès qu’il est décelé par son odeur caractéristique. Habituellement, on pratique l’embouage, par injection d’eau mêlée de poussières avec des tubes enfoncés dans le massif de façon à étouffer le feu par l’obstruction des fissures qui l’alimentent en air. Si le feu est déjà trop important pour travailler à proximité, on condamne tout le quartier en en bouchant toutes les issues par des barrages étanches à l’air, et celui-ci reste fermé jusqu’à ce que le feu soit éteint, ce que l’on vérifie par des analyses de l’atmosphère prélevée derrière les barrages ; cela peut demander plusieurs mois.

• Grisou. Le grisou est du méthane presque pur, moitié moins dense que l’air ; à la température ordinaire, il se dégage du charbon, où il est occlus. Le dégagement de grisou varie avec les charbons ; il est particulièrement important dans les charbons à coke, où il peut atteindre de 5 à 15 m3 par tonne. Dans une taille, la quantité de grisou à la tonne produite peut atteindre dix fois cette valeur, parce qu’au grisou de la couche exploitée s’ajoute celui des couches voisines et des terrains charbonneux, drainé par les fissures du toit et du mur. Ce gaz est moyennement inflammable, et la flamme se propage dans un mélange d’air contenant de 5 à 14 p. 100 de grisou ; dans un air trop pauvre ou trop riche en grisou, la flamme s’éteint. Le danger est la propagation de la flamme avec turbulence, qui prend alors l’allure d’une déflagration : c’est le coup de grisou, avec ses effets dynamiques et thermiques. Les causes d’inflammation du grisou sont, outre les flammes proprement dites, les feux, les étincelles électriques et les explosifs. Les appareils électriques doivent être antidéflagrants, enfermés dans un carter résistant à une explosion interne d’air grisouteux, ne communiquant avec l’extérieur que par des passages d’arbre et des joints suffisamment ajustés pour qu’une flamme de grisou s’y éteigne. Certains appareils électriques de faible puissance, dits de sécurité intrinsèque, ne donnent pas d’étincelles d’énergie suffisante pour allumer le grisou. Les explosifs autorisés dans les mines grisouteuses sont de faible puissance et donnent une flamme de détonation suffisamment brève pour ne pas allumer le grisou. Pour empêcher un coup de grisou, il faut qu’eu tout point de la mine la teneur en grisou soit très inférieure à 5 p. 100 ; habituellement, la règle est d’avoir moins de 1,5 à 2 p. 100 dans les points les moins aérés (points hauts, cloches, encoignures) et de 0,5 à 1 p. 100 en plein courant d’air. Autrefois, on prenait moins de précautions ; de grandes catastrophes se sont produites parce que des volumes importants d’air très grisouteux stagnaient en couronne des galeries ; une inflammation intempestive, à la suite d’une imprudence ou d’un tir d’explosif, déclenchait un coup de grisou qui se développait sur des kilomètres de galeries. Aujourd’hui, avec toutes les précautions prises pour éviter des accumulations d’air grisouteux et leur inflammation, les coups de grisou sont devenus très rares, et leur extension est très limitée. Le grisou n’est pas spécifique du charbon ; il y en a dans des mines où des matières organiques ont fermenté dans les temps géologiques, par exemple dans les mines de potasse d’Alsace.

• Coup de poussières. Mais un petit coup de grisou peut provoquer un phénomène très grave : le coup de poussières. Dans les galeries des houillères, des poussières de charbon se déposent ; si elles sont mises en suspension dans l’air, elles forment un mélange combustible qu’une flamme d’un certain volume peut enflammer, phénomène analogue à ce qui se passe dans un foyer alimenté avec du charbon pulvérisé. Ce nuage de poussières brûle avec turbulence ; le grand volume des fumées brûlantes soulève d’autres poussières, dans lesquelles la flamme trouve un nouvel aliment et progresse avec de plus en plus de violence et de vitesse, de sorte que le coup de poussières, une fois amorcé, ne s’arrête que s’il ne trouve plus d’aliment (manque de poussières ou poussières incombustibles). Le coup de poussières peut ainsi se développer sur des kilomètres de galeries avec de puissants effets, tant thermiques que dynamiques, et les fumées ont une teneur mortelle en monoxyde de carbone car il n’y a pas eu assez d’air pour une combustion complète des poussières. On attribue à un coup de poussières la catastrophe de Courrières (Pas-de-Calais), le 10 mars 1906, qui fit 1 099 morts, et celle de la mine Honkeiko (Mandchourie), le 26 avril 1942, avec 1 527 victimes. Les charbons à coke sont particulièrement dangereux, d’autant plus qu’ils sont grisouteux. Il faut d’abord éviter les causes d’inflammation des poussières, qui sont principalement les coups de grisou ; des explosifs peuvent aussi soulever et enflammer les poussières. Ensuite, il faut rendre les poussières ininflammables en répandant des poussières stériles dans les galeries (schistification généralisée) ou fixer les poussières par arrosage avec des solutions hygroscopiques pour les empêcher d’être soulevées. Enfin, pour stopper la propagation d’un coup de poussières, on place des arrêts-barrages ; ce sont des planches sur lesquelles on a déposé une masse importante de poussières stériles ou des récipients contenant de l’eau, et qui, basculées par le souffle du coup de poussières, éteignent la flamme.