Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
R

Riopelle (Jean-Paul)

Peintre et sculpteur canadien (Montréal 1923).


À l’exception des peintures plus instinctives du milieu des années 40 — époque où l’artiste se vouait à l’écriture automatique — et malgré une gestualité toujours puissante et imaginative, l’œuvre de Riopelle témoigne d’une parfaite lucidité des instants successifs de la création. Longtemps représentative de l’abstraction lyrique, elle ne s’est jamais complètement privée des matériaux du réel — fussent-ils les moins identifiables — et a fait prévaloir sur les effets du hasard une intentionnalité plastique soutenue.

Ce langage, qui fait s’affronter des flux chargés de messages sybillins et de couleurs sonores, connaît le pouvoir de transmuer les phénomènes de la vie en autant de proliférations, de jaillissements qui ont tous valeur de symbole. On assiste, au cours des années, tantôt à une dilution du signe dans une peinture d’atmosphère, tantôt à la constitution de « texturologies » denses, mais parcourues d’un lin réseau d’innervation, tantôt à des imbrications de formes dans le plan vertical, véritables « murs d’allégresse ».

Initié dès l’âge de six ans à la peinture, Riopelle suit les cours de l’École polytechnique de Montréal et irrégulièrement ceux de l’École du meuble et de l’École des beaux-arts. À vingt ans, il se consacre entièrement à la peinture. Lié au groupe des « automatistes » et à leur chef de file. Paul Émile Borduas (1905-1960), il expose avec eux à Montréal en 1946. Il s’installe à Paris — définitivement — en 1948, tout en signant avec ses camarades québécois le violent manifeste libertaire Refus global.

Sa réputation est bientôt internationale. Riopelle représente le Canada aux biennales de Venise (1962) et de São Paulo (1965), et voit ses œuvres entrer dans les grandes collections publiques et privées. En dépit des changements qui s’opèrent dans sa peinture, on constate, quelle que soit l’époque à laquelle on se réfère, qu’il demeure fidèle à deux constantes : l’utilisation d’une myriade de petites formes serrées (longtemps cunéiformes et tourbillonnaires) qui forment un savoureux kaléidoscope de couleurs ; la surimpression d’un graphisme noir, épais, qui crée un second climat dans le même tableau, achevant de rendre son « écriture » reconnaissable entre toutes. La liberté de l’artiste s’exprime de manière plus déliée dans les gouaches et les récentes peintures acryliques. Riopelle est aussi l’auteur de grands collages faits de lithographies découpées et de sculptures coulées en bronze, dont l’organicité baroque tend parfois à la figuration (thème du hibou, 1971).

C. G.

 G. Robert, Riopelle ou la Poétique du geste (Éd. de l’Homme, Montréal, 1970). / P. Schneider, Riopelle (Éd. Maeght, 1972).

Risorgimento

Mouvement déclenché au xviiie s. par une élite de patriotes italiens appartenant pour la plupart à l’aristocratie et quelques-uns à l’Église, afin d’arracher leur patrie au joug de l’étranger et d’y faire triompher les idées libérales.


Au siècle suivant, une aspiration nouvelle et plus audacieuse caractérisera ce mouvement : réaliser l’unité nationale à l’instar de la France, de l’Autriche et de l’Espagne, soit sous forme de république, soit sous un souverain authentiquement italien. À cette seconde phase collabora un grand nombre de personnalités populaires, issues principalement de l’artisanat, mais non de la paysannerie, qui, dans l’ensemble, restera attachée aux anciens régimes et formera même à Naples une force brutale et indisciplinable au service de la monarchie et d’une religion formaliste, les sanfedisti.


Les origines

À Milan, capitale morale de l’Italie, le Risorgimento (« Renaissance » et, par extens., « Résurrection ») fut préparé par des lettrés, tels que le comte Pietro Verri (1728-1797) et son groupe de la revue Il Caffè (1764-1766), le juriste Beccaria*, dont la prise de position contre la torture et la jurisprudence souvent inique des cours de justice rendit le nom célèbre dans toute l’Europe, et le prêtre-poète Giuseppe Parini (1729-1799), censeur vigoureux des mœurs efféminées de la jeunesse dorée de l’époque. Puis, quand la Révolution et la campagne d’Italie soumettront les provinces du Nord au pouvoir des Français, tout un faisceau d’hommes courageux et intègres y secondera les vues rénovatrices de Bonaparte dans la noblesse (Gian Galeazzo Serbelloni [1744-1803], Francesco Melzi d’Eril [1753-1816], que Napoléon créera duc de Lodi, Ferdinando Marescalchi [1754-1816]), l’industrie, les finances (Giuseppe Prina [1766-1814]) et le clergé lui-même. Une partie de ce dernier, habituée déjà par le « despotisme éclairé » de Joseph II et de Léopold II à prendre ses distances vis-à-vis de Rome, secondera les gouvernants choisis à Paris, qui nationaliseront les biens fonciers des ordres religieux, instaureront la liberté du culte, et feront enseigner dans les séminaires les principes gallicans de 1682, qui réprouvaient en France toute subordination, dans l’ordre temporel, du pouvoir royal au pouvoir pontifical.

Dans le royaume de Naples, aux mains d’une monarchie hispano-autrichienne, la soif d’indépendance avait eu pour interprètes le philosophe G. Vico*, l’historien Pietro Giannone (1676-1748), le professeur d’économie politique Antonio Genovesi (1713-1769), l’abbé Galiani (1728-1787) secrétaire d’ambassade à Paris, les jurisconsultes Mario Pagano (1748-1799) et Francesco Conforti (1743-1799). Ces deux derniers paieront de leur vie, après le court intermède que constitua en 1799, dans l’éphémère république Parthénopéenne, la solidarité des leaders libéraux avec les autorités françaises. Avec eux devaient être exécutés par l’ordre du cardinal Ruffo, représentant du roi Ferdinand IV, l’amiral duc Francesco Caracciolo (1752-1799), qui avait résisté à la flotte anglaise, le comte Ettore Carafa (1767-1799), une foule d’autres membres des plus grandes familles et de très nombreux médecins.