Rilke (Rainer Maria) (suite)
Après de brefs séjours en Afrique du Nord (1910), en Égypte (1911), en Espagne (1912), Rilke finit par s’installer à Munich à la veille de la Première Guerre mondiale. Mobilisé en 1916, il est affecté au service de presse au ministère de la Guerre à Vienne. Libéré de ses obligations militaires en juin de la même année, il retourne à Munich, qu’il quitte en 1919 pour la Suisse. Au château de Berg am Irchel, aux environs de Zurich, il écrit les Poèmes posthumes du comte C. W. (Aus dem Nachlass des Grafen C. W., 1920), dont il prétend qu’ils lui furent dictés d’outre-tombe.
De 1921 jusqu’à sa mort, il vit, retiré et solitaire, dans la tour de Muzot, près de Sierre, dans le Valais, où il achève les Élégies et compose, dans une véritable fièvre poétique, les Sonnets à Orphée (Sonette an Orpheus, 1922), « monument funèbre pour Vera Oukama Knoop », jeune danseuse et musicienne. En 1924, il reçoit la visite de Paul Valéry, dont il vient de traduire seize poèmes de Charmes. Au cours des périodes ou l’inspiration créatrice lui faisait défaut, Rilke s’est toujours tourné vers la traduction. Ainsi a-t-il admirablement transposé en allemand le Retour de l’enfant prodigue de Gide, les Sonnets de Louise Labé, les Lettres de la religieuse portugaise. Vers la fin de sa vie, il écrit des vers en français, les Vergers et les Quatrains valaisans, qui évoquent, avec une forte couleur locale, les environs de Sierre.
Sa correspondance, en allemand et en français, n’a encore été publiée qu’en partie. Elle constitue non seulement un précieux document sur la genèse de son œuvre, mais contient, à côté de lettres très élaborées, des pages d’un élan spontané, dont celles qui sont adressées à Merline (Baladine Klossowska) comptent parmi les plus émouvantes.
Très souffrant depuis 1923, Rilke meurt le 29 décembre 1926 au sanatotium de Val-Mont, près de Montreux. Conformément à ses dernières volontés, il repose au cimetière villageois de Rarogne. Sur sa pierre tombale figure l’épitaphe dont il est l’auteur :
Rose, pure contradiction ; volupté
De n’être le sommeil de personne
Sous tant de paupières.
E. T.
J. F. Angelloz, Rilke (Hartmann, 1936 ; nouv. éd., Mercure de France, 1952). / R. Pitrou, Rainer Maria Rilke (A. Michel, 1938). / P. Desgraupes, Rainer Maria Rilke (Seghers, 1945 ; 5e éd., 1970). / W. Ritzer, Rainer Maria Rilke. Bibliographie (Vienne, 1951). / H. E. Holthusen, Rainer Maria Rilke (Hambourg, 1958 ; nouv. éd., 1962). / A. Robinet de Clery, Rainer Maria Rilke (P. U. F., 1958). / R. Zellweger, Genèse et forme du « Cornette » de Rilke (La Baconnière, Neuchâtel, 1972).