Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
R

résonance magnétique (suite)

Une onde électromagnétique est formée par un champ électrique et un champ magnétique qui varient périodiquement et très rapidement en fonction du temps et qui se propagent dans l’espace. Soumis au champ variable , le moment magnétique atomique subit des effets qui s’inversent périodiquement et dont le résultat moyen est généralement nul. Lorsqu’une onde de fréquence ν est polarisée circulairement, son champ magnétique tourne autour de sa direction de propagation avec la vitesse angulaire ω = 2 π ν. On peut s’arranger en sorte que le champ tourne autour du champ constant avec une vitesse angulaire égale à la vitesse de Larmor : alors, son effet moyen n’est plus nul ; il fait basculer l’axe de la toupie atomique, c’est-à-dire qu’il change son orientation par rapport au champ constant . Ce phénomène se produit seulement quand la fréquence de l’onde passe par une valeur très particulière dépendant du champ magnétique

La seconde explication fait appel à la théorie quantique ; elle est essentiellement fondée sur des considérations énergétiques. On sait que l’énergie d’interaction entre un champ magnétique et un moment magnétique vaut

en appelant ℳz et σz, les composantes des vecteurs et sur la direction Oz parallèle au champ B0.

Pour calculer l’énergie totale E emmagasinée par l’atome, il faut ajouter cette énergie magnétique W à son énergie normale E0 en l’absence de champ magnétique : E = E0 + W.

La théorie quantique conduit d’autre part à la notion de quantification du moment cinétique, et la célèbre expérience d’Otto Stem (1888-1969) et Walther Gerlach (né en 1889) l’a bien mis en évidence : la composante σz, du vecteur moment cinétique ne peut prendre que des valeurs discontinues, et l’écart entre deux valeurs successives vaut (h constante de Planck). On en déduit que l’énergie magnétique ne peut prendre que certaines valeurs particulières : on dit encore que le niveau d’énergie normal E0 est subdivisé en plusieurs sous-niveaux distincts appelés sous-niveaux Zeeman, qui correspondent à diverses valeurs de σz, c’est-à-dire à diverses orientations des vecteurs moments et . L’écart énergétique entre deux sous-niveaux Zeeman voisins vaut :

Une onde électromagnétique de fréquence ν peut produire la transition entre deux sous-niveaux Zeeman si ses photons sont égaux à la différence d’énergie correspondante (c’est la loi de Bohr) :

Les deux explications conduisent bien à la même valeur pour la fréquence de résonance ; et encore au résultat suivant : les moments magnétiques d’une collection d’atomes tendent sous l’action de l’onde à se répartir également dans toutes les orientations de l’espace ; ou, ce qui revient au même, les atomes tendent à se répartir en nombres égaux entre les divers sous-niveaux Zeeman.

La première expérience de résonance magnétique a été réalisée aux États-Unis en 1938 par Isidor Isaac Rabi (né en 1898). Il travaillait sur un jet atomique et utilisait le fait que les atomes appartenant aux divers sous-niveaux Zeeman ont des trajectoires différentes lorsqu’ils traversent un champ magnétique inhomogène : cette propriété permet de séparer sur une trajectoire particulière des atomes appartenant tous au même sous-niveau. Si on produit la résonance magnétique, beaucoup d’atomes quittent ce sous-niveau particulier et se dispersent alors sur de nouvelles trajectoires. On peut observer expérimentalement cette dispersion des atomes, qui met en évidence la résonance magnétique. L’expérience de Rabi a eu de très nombreuses applications. Elle a pu être étendue à l’étude de transitions atomiques indépendantes du champ magnétique, et utilisée dans les horloges* atomiques.

Mais le grand développement des expériences de résonance magnétique est lié au développement des techniques d’observation radioélectriques mises au point à partir de 1945 par le Soviétique Ievgueni Konstantinovitch Zavoïski (1907-1976) et par les Américains Felix Bloch (né en 1905) et Edward Mills Purcell (né en 1912). Ces techniques reposent sur la propriété suivante : dans un échantillon de matière à l’équilibre thermique, conformément à la loi statistique de Boltzmann, les atomes se répartissent en plus grand nombre dans les sous-niveaux Zeeman d’énergie la plus faible (c’est-à-dire que les moments magnétiques sont orientés préférentiellement dans le sens du champ magnétique constant ). L’onde résonnante tend à égaliser la répartition des atomes, c’est-à-dire qu’elle fait passer un certain nombre d’atomes des sous-niveaux de faible énergie à d’autres sous-niveaux d’énergie supérieure. L’énergie moyenne de la collection d’atomes tend ainsi à augmenter aux dépens de celle de l’onde. On mesure effectivement l’intensité de l’onde et on observe sa diminution au moment où se produit la résonance magnétique. La très grande sensibilité des appareils d’électronique utilisés pour détecter l’onde permet une observation facile du phénomène de résonance, bien que les inégalités de la répartition thermique soient souvent très faibles. Il peut arriver cependant que ces inégalités soient vraiment trop faibles pour conduire à une atténuation mesurable de l’onde. C’est le cas lorsque le champ magnétique B0 est très petit ; c’est aussi le cas lorsqu’on étudie des vapeurs sous faible pression, parce que le nombre d’atomes mis en jeu est relativement petit. On utilise alors des procédés qui permettent de créer de fortes inégalités, de répartition des atomes entre les sous-niveaux Zeeman. De manière imagée, on vide certains sous-niveaux Zeeman pour en remplir d’autres, comme une pompe qui ferait passer un liquide d’un réservoir à un autre ; cela explique le terme de méthodes de pompage*, utilisé par les physiciens. Ces méthodes utilisent le plus souvent une autre onde électromagnétique provoquant d’autres transitions résonnantes ; ce sont des expériences de double résonance.