Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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République (IIIe) (suite)

Cette politique de repli, qui réconforte mais semble dispenser d’agir, est en contradiction avec les engagements d’assistance militaire signés par la France avec la Pologne et les États de la Petite-Entente. Elle devient surtout terriblement insuffisante face au réarmement de l’Allemagne, qu’accélère la prise du pouvoir par Hitler en 1933. Pour répondre à la résurrection de la Wehrmacht et à l’arrivée des classes creuses (jeunes nés entre 1915 et 1919), Weygand*, à la tête de l’armée depuis 1930, prépare le retour au service de deux ans (1935). Mais, le 7 mars 1936, jour où Hitler, violant une fois encore le traité de Versailles, fait réoccuper la rive gauche du Rhin, la France, qui est prête à intervenir militairement, se heurte à la réticence, voire à l’hostilité de la Grande-Bretagne et accepte le fait accompli. Dès lors, c’est la course à la guerre : à partir de 1937, le gouvernement et l’état-major (où Gamelin* a remplacé Weygand en 1935) entament un réel effort pour faire face à la menace qui s’annonce. C’est dans cette ambiance qu’est votée la loi du 11 juillet 1938 sur l’organisation de la nation pour le temps de guerre, texte fondamental qui organise la coordination des efforts militaires et économiques du pays pour sa défense*. Quant à l’effort entrepris dans le domaine du réarmement, il ne parviendra pas à combler la déficience quantitative des forces françaises en matériel blindé et surtout en avions.


De l’« aviation d’armée » à l’armée de l’air

Première des aviations européennes en 1914, l’aviation militaire française a joué un rôle considérable durant la Première Guerre mondiale. Mais, alors que le G. Q. G. dispose de 3 600 appareils de combat le 11 novembre 1918, la France cesse, au lendemain de sa victoire, de s’intéresser à son aviation militaire. Durant plusieurs années encore, elle n’est considérée que comme une arme auxiliaire de l’armée de terre, à laquelle elle est étroitement subordonnée. Ce n’est qu’en 1930 qu’est créé l’état-major d’une « armée de l’air », qui n’obtient son autonomie que par les lois du 2 juillet 1934 et du 9 avril 1935. Les appareils survivants ou dérivés de ceux de 1918 sont restés pratiquement en service jusqu’aux environs de 1930, où fut enfin élaborée une nouvelle doctrine d’emploi. Mais les prototypes mis au point vers 1937-38 (Potez « 63 », chasseurs Morane « 406 » et Dewoitine « 520 », bombardiers Breguet « 693 ») n’existeront qu’en très faible quantité au moment où ils entreront en service en 1939-40.


Les armées françaises de la Seconde Guerre* mondiale

Si l’on met à part sa marine, en tout point remarquable, la France aborde la Seconde Guerre mondiale avec des forces mal préparées aux conditions d’un conflit moderne. Trop largement mobilisées, mais insuffisamment équipées et mécanisées, dépourvues de soutien aérien, ses armées sont engagées avec une doctrine d’emploi dépassée contre une Wehrmacht surentraînée, qui a su créer, avec ses avions et ses chars, l’instrument de la guerre éclair (v. France [campagne de]).

L’armistice du 22 juin 1940 sonne le glas de la IIIe République, dont les armées se trouvent scindées en plusieurs tronçons :
— les Forces françaises libres (F. F. L.), qui, regroupées dès l’été 1940 autour de De Gaulle, continuent le combat et assurent, avec Leclerc* et Kœnig, la permanence des couleurs françaises dans la guerre (à de Gaulle se rattacheront également, dans le cadre de la résistance militaire en métropole, les Forces françaises combattantes [F. F. C.] et l’Armée secrète [A. S.]) ;
— l’armée dite « d’armistice » (environ 100 000 hommes), stationnée en zone libre et dont le commandement prépare secrètement la remobilisation en vue de la revanche ;
— l’armée d’Afrique, enfin, qui, sous l’impulsion énergique de ses chefs Weygand (1940-41) et Juin* (1941-42), s’apprête à reprendre le combat.

L’invasion de la zone libre provoque le sabordage de la flotte de Toulon (27 nov. 1942), dont quelques éléments seuls peuvent gagner Alger. L’armée d’armistice est dissoute, et ses meilleurs éléments rejoignent l’Organisation de résistance de l’armée (O. R. A.), que commandent les généraux Frère, Verneau et Revers ; ils contribueront à l’encadrement des formations militaires de la résistance, appelées en 1944 Forces françaises de l’intérieur (F. F. I.). Quant aux F. F. L. et à l’armée d’Afrique, après leur jonction en Tunisie (1943), elles donneront naissance aux unités qui, aux ordres de Leclerc, de Juin et de De Lattre*, s’illustreront, après leur réarmement par les Américains, en Italie et dans la libération de la France. Leur amalgame avec les F. F. I., réalisé par de Lattre en plein combat durant l’hiver 1944-45, préparera la renaissance d’une armée française rajeunie et enfin réunifiée, dont les Alliés comme les adversaires reconnaîtront la valeur.

B. de B. et P. D.

➙ Coloniales (troupes) / Défense / France (campagne de) [1940] / Guerre mondiale (Première) / Guerre mondiale (Seconde) / Résistance française (la) / Service national.
V. également les articles consacrés aux principaux chefs militaires.

La marine sous la IIIe République

La marine de guerre (1871-1914)

Dans les années qui suivent la défaite de 1871, la France, avant tout soucieuse de sécurité terrestre, sacrifie délibérément la rénovation de sa flotte à la reconstitution de son armée. Les transformations techniques (fin de la marine à voile et de la construction en bois [v. marine]) qui affectent toutes les floues provoquent en France des discussions sans fin... Les ingénieurs français affirment cependant leur valeur, notamment pour les sous-marins avec le Gymnote (1888) de Gustave Zédé et surtout le Narval (1899) de Maxime Laubeuf (v. sous-marin). La marine française joue néanmoins à cette époque un rôle important outre-mer (les colonies relèvent de son ministère jusqu’en 1889), où elle assure le transport et le ravitaillement des expéditions militaires coloniales. C’est à propos de l’affaire de la mission Marchand* à Fachoda, où, en 1898, elle s’oppose vivement à la Grande-Bretagne, que la France découvre avec stupeur que « la disproportion des forces navales (trois contre un pour les marines militaires, dix contre un pour les marines marchandes) entre les deux pays est telle que toute lutte est impossible ».