Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
R

reformage (suite)

En contrepartie, le procédé présente de nombreux avantages.
1. Le moyen le plus économique pour fabriquer les carburants à très haut octane exigés par les moteurs modernes est le reformage de l’essence lourde, complété par des additifs antidétonants au plomb.
2. Le reformeur catalytique produit un excédent considérable d’hydrogène, précieux élément qui peut être réutilisé dans la raffinerie pour divers traitements d’hydrogénation, principalement la désulfuration.
3. Il est possible d’extraire les aromatiques contenus dans l’essence reformée, et ceux-ci constituent une matière première pétrochimique de première importance.

Le rôle joué par le reformage dans l’industrie pétrolière doit encore grandir avec la limitation de plus en plus stricte de la teneur en plomb des carburants, tendant à réduire la toxicité des gaz d’échappement ou à rendre obligatoire leur épuration catalytique.


Le steam-reforming

Le reformage poussé d’hydrocarbures, en présence de vapeur d’eau et d’un catalyseur au nickel, vers 900 °C et 25 bar, est le moyen le plus moderne de fabriquer de l’hydrogène pour les besoins de la chimie (synthèse de l’ammoniac) et de l’hydroraffinage.

A.-H. S.

➙ Additif / Ammoniac / Aromatiques (hydrocarbures) / Désulfuration / Essence / Four / Hydrogénation / Octane (indice d’) / Raffinage.

 P. Wuithier, le Pétrole, raffinage et génie chimique (Technip, 1965 ; nouv. éd., 1972-73 ; 2 vol.).

Réforme

Mouvement religieux né au xvie s.


Un formidable bouleversement comme celui de la Reforme du xvie s. n’est pas une génération spontanée ; il est profondément enraciné dans une infinité de courants, de veines et de filons qui courent à la surface ou au cœur de l’histoire. Rien de pur d’ailleurs dans cette multiplicité d’origines qui soudain aboutissent à un événement, à un courant, à une création nouvelle : le spirituel est tributaire du culturel, du politique, de l’économique, ceux-ci en échange peuvent être durablement marqués par lui. Une des intuitions les plus importantes des premiers penseurs chrétiens est qu’il n’est de vérité qu’incarnée, c’est-à-dire intriquée, compromise dans l’inséparable faisceau des fibres diverses qui constituent le relatif, le contingent, la quotidienneté anonyme d’une époque, d’une géographie, d’une civilisation.


Vers un nouvel âge

Les xve et xvie s. sont des temps d’éclatement. La grande synthèse tentée par le Moyen Âge échoue : tout se défait et tout peut mourir ou renaître. On ne sait pas ce qui va advenir, mais une chose est certaine : rien, dans le futur, ne ressemblera au passé. Malheur aux nostalgiques : ce dont ils déplorent la disparition ne reviendra jamais ; le temps n’est pas aux rêveurs, mais à ceux qui, hardiment, regardent et vont en avant.

Politiquement, socialement, culturellement et spirituellement, tout était considéré comme intégré, entièrement greffé sur l’Église, dont le chef visible, le pape, assurait la liaison avec le Dieu vivant : l’ordre théocratique était global ; nulle place en lui pour le profane ou le non-conforme à l’autorité infaillible. Grégoire VII* au xie s., puis Innocent III* au xiiie s. affirmaient que l’Église pouvait légitimement faire valoir ses ambitions à la domination universelle : « Le Seigneur, disait le dernier de ces pontifes, a remis à saint Pierre le gouvernement non seulement de toute l’Église, mais du monde entier. » Le vicaire de Dieu disposait donc de la toute-puissance et notamment du pouvoir politique ; les rois étaient ses vassaux et le préfet de Rome lui-même lui jurait fidélité. À la hiérarchie ecclésiastique définissant une Église pyramidale, construite à partir de son sommet et rigoureusement structurée jusqu’à sa base, correspondait la féodalité*, qui, de l’empereur au dernier des chevaliers, encadrait le corps social et veillait à ce que chacun fût maintenu dans l’ordre de la soumission. Au plan culturel enfin, la synthèse scolastique était une fascinante tentative pour réconcilier grâce et nature, révélation et raison : l’athéisme devenait une sorte d’aberration mentale, car tout homme normalement constitué devait parvenir à Dieu soit par le cheminement de la théologie (fides quaerens intellectum), soit par celui de la mystique (« connaître et posséder Dieu par le cœur »).

C’est par la tête que l’édifice se lézarde avant de s’effondrer : non seulement le grand schisme* d’Occident oppose pape et antipape jusqu’au milieu du xve s., mais l’état de corruption morale et institutionnelle qui règne à Rome est tel que, partout, les chrétiens aspirent à un changement de l’« image de marque » de la papauté. Au tournant du xvie s., Alexandre VI* (Borgia) est plus un prince de la Renaissance italienne qu’un pasteur ; son successeur, Jules II, commence en 1505/06 la construction de la basilique Saint-Pierre, qui ruinera le Vatican et sera une des causes directes de la Réforme, puisque, pour en payer le coût, il faudra la vente publique des indulgences, qui provoquera l’indignation de Luther. Léon X, fils de Laurent de Médicis, le Magnifique, deviendra pape à trente-huit ans (1513), après avoir été tonsuré à sept ans, nommé archevêque à huit et cardinal à treize ; cet esthète florentin sera incapable de comprendre quoi que ce soit à une certaine « querelle de moines allemands ». Il va de soi que, de ce fait même, les rois, provisoirement et de mauvais gré soumis au siège pontifical, reprennent une autonomie croissante ; la Réforme sera favorisée non seulement par le discrédit généralisé qui affecte la papauté, mais aussi par les rivalités qui divisent l’Empire et opposent le roi de France et l’empereur d’une part, les princes allemands entre eux et à l’empereur d’autre part. La chance de la Réforme luthérienne est d’avoir pu profiter au maximum des tensions politiques multiples qui dressent les uns contre les autres les grands de l’époque : sans Frédéric II le Sage, pas de protestantisme, pourrait-on dire ! Le malheur de Calvin est d’avoir eu à affronter le pouvoir très fortement organisé du seul roi de France, ayant déjà domestiqué sa noblesse et comprenant très justement que l’introduction dans son royaume d’une contre-Église pouvait signifier la naissance d’un contre-pouvoir.