Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Raphaël (suite)

La main de Raphaël

Il faut se garder d’une erreur assez répandue qui consiste à croire que le mérite de Raphaël réside dans la conception et peut-être dans la composition, mais guère dans l’exécution, à le ramener, comme voulait Bernard Berenson, à celui d’un génial « illustrateur ». Raphaël est aussi un très grand peintre. Il est vrai qu’une sorte de pudeur l’a presque toujours amené à dissimuler ses moyens et sa science sous une apparence de simplicité, voire d’ingénuité. Il est vrai encore qu’il a eu le rôle d’un maître d’œuvre, que l’ampleur de sa tâche l’a souvent obligé à confier, en partie ou même entièrement, l’exécution des commandes à ses élèves ou collaborateurs, qu’il n’est pas facile enfin de déterminer le degré d’importance exact de ces interventions. On s’accorde cependant à juger autographes un certain nombre d’ouvrages dont la qualité s’impose aux regards. Qualité du dessin, attestée d’ailleurs par les nombreuses études préparatoires que les grandes collections mondiales conservent du maître et qui font goûter toute la sensibilité de contours nés d’un jeu de courbes. Qualité de la couleur, généralement discrète et servante de la forme, parfois plus riche comme le montre la Messe de Bolsena. Qualité du faire, léger et vibrant dans les meilleurs cas, mais d’une virtuosité qui ne s’affiche pas volontiers.


Le peintre et sa postérité

Les gravures de Marcantonio Raimondi (1480-1534), contemporain de Raphaël, ont contribué à la popularité de son œuvre. La diffusion du style s’est opérée grâce à ses nombreux aides et disciples, dont Jules Romain apparaît de beaucoup le plus personnel. Il est vrai que l’usage fait par eux du langage de leur maître a le plus souvent débouché sur le maniérisme*. Le véritable héritier de Raphaël serait plutôt un peintre français du xviie s., Le Sueur*.

Longtemps, et non sans abus, l’œuvre de Raphaël a été regardée comme une sorte de manifeste du classicisme*. C’est peut-être la raison principale du dédain qu’elle rencontre souvent depuis le milieu du siècle dernier, et qu’exprimait notamment la révolte des préraphaélites*. De nos jours encore, les qualités de Raphaël ne sont pas de celles qui peuvent combler un goût plutôt à la recherche de l’inattendu et de l’inachevé. Un regard attentif permet cependant de discerner sous le vêtement de la simplicité ce qui fait la jeunesse et l’élévation de son message.

Raphaël architecte

Les ouvrages d’architecture de Raphaël méritent une place parmi ceux qui contribuent à définir l’esprit de la Renaissance classique. L’essentiel est à Rome. L’église Sant’Eligio degli Orefeci date de 1513 environ. En 1514, Raphaël fut nommé, après Bramante*, directeur des travaux de la basilique vaticane ; il adopta un projet qui abandonne la croix grecque pour la croix latine, mais qui ne fut pas exécuté comme tel. En revanche, il s’inspira du projet de Bramante pour Saint-Pierre en élevant vers 1515, à Santa Maria del Popolo, la chapelle Chigi. La loggia de la villa Madama, de 1516 environ, est remarquable par sa voûte à décor de stuc.

B. de M.

 O. Fischel, Raphaels Zeichnungen (Berlin, 1913-1972 ; 9 vol.). / A. Venturi, Raffaello (Urbino, 1920 ; nouv. éd. complétée par L. Venturi, Milan, 1952). / M. Pittaluga, Raffaello, dipinti su tavola (Milan, 1954 ; nouv. éd., 1961). / E. Camesasca, Tutta la pittura di Raffaello (Milan, 1956 ; 2 vol.). / L. Dussler, Raffael, kritisches Verzeichnis der Gemälde, Wandbilder und Bildteppiche (Munich, 1966). / P. De Vecchi, l’Opera completa di Raffaello (Milan, 1966 ; trad. fr. Tout l’œuvre peint de Raphaël, Flammarion, 1969). / N. Ponente, Qui était Raphaël ? (Skira, Genève, 1967). / L. Becherucci, Raffaello. L’opera, le fonti, la fortuna (Novare, 1968). / J. Pope-Hennessy, Raphael (New York, 1970).

Rascasse

Poisson Téléostéen marin de l’ordre des Perciformes, et du sous-ordre des Scorpénoïdes, représenté sur nos côtes méditerranéennes par deux espèces appréciées pour la délicatesse de leur chair.



Les Rascasses

La Rascasse rouge (Scorpæna scrofa) et la Rascasse brune (S. porcus) ont une taille moyenne de 30 cm environ. Leur corps est comprimé latéralement, et leur tête est bardée d’épines, de verrues et de lambeaux cutanés. La bouche, de grande taille, est armée d’un grand nombre de dents fines. La coloration générale est rouge ou brunâtre, parsemée de taches plus sombres ou plus claires. Une telle coloration caractérise des animaux côtiers, vivant toujours au voisinage du fond, sur tout le plateau continental. Les Rascasses sont des Poissons carnivores, mais qui se nourrissent de proies relativement petites. Animaux sédentaires, elles restent immobiles, à l’affût du petit Poisson, que viendra happer la gueule largement fendue. La reproduction a lieu dans la zone littorale ; œufs et larves sont pélagiques ; les alevins se nourrissent de plancton. Contre leurs ennemis, les Rascasses se protègent en se dissimulant dans leur milieu grâce à leur coloration sombre et aux lambeaux cutanés qui « cassent » leur silhouette ; elles ont également des armes défensives : les épines des nageoires et des opercules sont associées à des glandes venimeuses qui exigent qu’on les manipule avec précaution.


Espèces voisines

La Chèvre (Helicolenus dactylopterus) et le Sébaste (Sebastes marinus) peuplent tout l’Atlantique Nord, sur le plateau continental, et ont la particularité d’être des Poissons vivipares incubants. Au moment de la reproduction, les femelles effectuent de grandes migrations pour amener leurs jeunes, qui sont minuscules à la naissance, dans des zones riches en plancton. Chaque femelle libère jusqu’à 150 000 jeunes à la fois. Les adultes sont carnivores. Chèvre et Sébaste ont, comme les Rascasses, une coloration rougeâtre, malgré leurs mœurs pélagiques. Ces Poissons sont l’objet d’une pêche commerciale ; on en capture plus de 500 000 chaque année.

Les Scorpénidés comprennent plusieurs centaines d’espèces, surtout réparties dans les mers tempérées, chaudes et tropicales. La plupart sont venimeux, et en particulier le Poisson Scorpion (Pterois volitans), hôte des récifs coralliens de la zone indo-pacifique. Celui-ci doit son nom de volitans non à une prétendue possibilité de voler, mais à la grande taille de ses nageoires, et notamment des pectorales. Les Poissons Scorpions sont de magnifiques Poissons, très spectaculaires, qu’on peut admirer dans la plupart des aquariums marins.