Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
R

radioéléments (suite)

À partir des neutrons

Les réactions les plus importantes sont les réactions (nγ), (nα) et (np), dans lesquelles il y a émission d’un rayonnement γ, émission d’un rayonnement α ou éjection d’un proton.

• La réaction (nγ), la plus généralement utilisée, est la plus probable, car elle se produit avec des neutrons thermiques, abondants dans les régions périphériques des réacteurs, où sont disposés les produits à irradier. C’est ainsi, par exemple, que sont fabriqués le cobalt 60 et l’or 198 :
59Co (nγ)60Co ;197Au (nγ)198Au.

• Les réactions (nα) et (np) exigent des neutrons d’énergie assez élevée, que l’on trouve seulement au centre de la pile. Par exemple, la fabrication du phosphore 32 à partir du soufre 32,
32S (np)32P,
ne se produit qu’avec des neutrons dont l’énergie est supérieure à 1 MeV. Toutefois, quelques réactions de ce type peuvent avoir lieu avec des neutrons thermiques ; c’est le cas du tritium et du carbone 14 :
6Li (nα)3H ;14N (np)14C.


À partir des produits de fission

Il s’agit de produits de fission à longue période extraits des solutions résiduaires des usines de traitement chimique du plutonium ; on obtient aussi le strontium 90Sr (période 28 ans) et le césium 137Cs (T = 30 ans).

Une première unité de production de césium 137 (Elan II A) est en fonctionnement à Marcoule (Gard) ; le césium 137 est fixé sur des colonnes échangeurs d’ions. Une seconde unité est en place à l’usine de La Hague (Manche) depuis septembre 1970 (Elan II B) ; elle produit du chlorure de césium 137 à partir des produits de fission des usines de retraitement de Marcoule et de La Hague par un procédé d’extraction par échangeurs d’ions minéraux.


À partir de « vaches à isotopes »

Dans le monde médical, on a besoin de radioéléments à périodes relativement courtes ; on utilise pour les fabriquer ce que l’on appelle un générateur de radioéléments ou, encore, une vache à isotopes, dont il existe un certain nombre de systèmes.

Un générateur de radioéléments est constitué par un nucléide mère, de durée de vie relativement longue, fixé sur un support approprié et permettant, grâce à sa forme chimique, une extraction rapide, simple et répétée du nucléide fille, de courte durée de vie, engendré par la désintégration du nucléide mère ; l’extraction peut être répétée à intervalles réguliers. Ce dispositif permet d’expédier et de conserver un radionucléide de courte durée de vie aussi longtemps que dure la période radioactive du nucléide mère.

On peut ainsi obtenir une grande quantité d’activité par extractions répétées. Par exemple (v. tableau), à partir de 1 mCi de germanium 68Ge, on peut, au cours de trois périodes radioactives du nucléide, obtenir 860 mCi de gallium 68Ga au total, par extractions espacées de dix heures.


Classement des radioéléments

Les radioéléments sont classés (décret du 15 mars 1967) en trois groupes en fonction de leur radiotoxicité. Citons les principaux :
— groupe I = radiotoxicité très élevée :241Am,226Ra... ;
— groupe II-A = radiotoxicité élevée :60Co,137Cs,131I,192Ir,90Sr,204Tl,170Tm... ;
— groupe II-B = radiotoxicité modérée :32P,147Pm,35S,171Tm... ;
— groupe III = radiotoxicité faible :85Kr,235U,238U...

Pour éviter la contamination, les sources se présentent sous forme scellée ; elles peuvent supporter une élévation de température de 1 000 °C pendant 200 heures, un accroissement de pression de 700 bars et un écrasement de 10 000 newtons.

L’activité d’un curie se traduit, en masse, pour les radioéléments, par des chiffres très faibles. C’est ainsi que :
1 curie de226Ra pèse environ 1 g ;
1 curie de90Sr pèse environ 6,4 mg ;
1 curie de60Co pèse environ 1 mg ;
1 curie de131I pèse environ 8 μg ;
1 curie de32P pèse environ 3,5 μg.

D’une façon générale, la masse m d’un radioélément quelconque est donnée par la formule

T étant la période, en années, du radioélément considéré et A sa masse atomique.

Soulignons que le danger que présente un radioélément dont on connaît la nature est fonction de sa période et surtout de l’énergie de son rayonnement ; par exemple, le cobalt 60Co a une période de 5,3 ans ; il émet un β de 0,3 MeV et deux γ très énergétiques : 1,17 et 1,33 MeV.


Importance et utilisation des radioéléments

Les radioéléments ont trouvé de nombreuses applications dans l’industrie, en médecine, en agriculture et dans certains secteurs particuliers, comme la datation des vestiges anciens. Ils peuvent servir à des mesures géométriques ou mécaniques. D’autres applications mettent en jeu leurs propriétés chimiques : ils servent alors de traceurs. La radioactivité émise permettant de suivre l’évolution de certaines transformations chimiques ou physiques, les traceurs permettent de déceler le mécanisme de ces transformations.

Le nombre des utilisateurs (de l’ordre de 3 500 sur le plan national en 1973) augmente d’année en année suivant une progression de l’ordre de 10 p. 100 par an ; c’est dans le secteur industriel que l’on trouve le plus grand nombre d’utilisateurs (2 100 environ en 1973) [les sources sont de faible activité, sauf en gammagraphie] et dans le secteur médical (350 utilisateurs environ en 1973) les sources les plus importantes en activité.


Applications dans l’industrie

Les mesures d’épaisseur, les jauges de niveau, les contrôles gammagraphiques correspondent à environ 75 p. 100 des applications industrielles.

• Mesures des épaisseurs. Deux méthodes sont utilisées.

Dans la méthode directe, une source S émet un certain rayonnement. Si, devant elle, on place un détecteur D, celui-ci enregistrera une mesure I0. Si, entre elle et le détecteur, on interpose un écran d’une certaine épaisseur, une partie du rayonnement se trouvant absorbée par cet écran, le détecteur enregistrera une mesure I inférieure à la mesure I0. La différence I0 – I permet de mesurer l’épaisseur de l’écran.