Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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procédure (suite)

L’instance

En principe, seules les parties introduisent l’instance que représente le procès ; hormis les cas exceptionnels où l’ordre public est intéressé et où le ministère public intervient (nullité de mariage, garde des enfants de parents divorcés, déchéance d’autorité parentale, contestation sur la nationalité*...), les parties sont maîtres de leur instance et déclenchent la procédure en introduisant celle-ci.

Le plaideur commence et conduit l’instance, et il est en droit d’y mettre fin à tout moment ; il conduit l’instance sous les charges qui incombent aux parties, et il accomplit les actes de procédure dans les formes et délais requis, c’est-à-dire en utilisant toutes les formes requises et en respectant tous les délais prescrits. Le juge veille désormais au bon déroulement de l’instance : il a le pouvoir d’impartir des délais dans l’intérêt du procès, de sa rapidité ou de sa solution et d’ordonner d’office les mesures nécessaires ; il doit se prononcer sur tout ce qui est demandé, et seulement sur ce qui est demandé ; il peut, pour le faire, se fonder sur tous éléments du débat qui sont portés devant lui, même si les parties ne les ont pas spécialement invoqués au soutien de leur demande.

Il doit trancher le litige suivant les règles de droit applicables au procès, mais, pour les droits dont elles ont la libre disposition, les parties peuvent, en vertu d’un accord exprès, lier le juge par les qualifications et points de droit auxquels elles entendent limiter le débat, et la loi prévoit même l’hypothèse du juge amiable compositeur. Durant tout le déroulement du procès, le juge doit veiller au respect du principe de la contradiction, hormis le cas où l’ordre de la loi, les circonstances ou la nécessité commandent qu’une mesure soit prescrite à l’insu d’une partie, mais il convient de souligner qu’alors cette partie dispose d’un recours approprié contre la décision qui lui fait grief.

• La procédure devant le tribunal de grande instance
Le procès débute par une assignation, qui contient la demande en justice, ou bien par une requête conjointe dans les matières où les parties ont la libre disposition de leurs droits.

• L’assignation est un acte d’huissier, qui doit comporter, outre les mentions propres aux actes d’huissier de justice, l’indication du tribunal devant lequel la demande est portée, la constitution de l’avocat du demandeur, l’objet de la demande avec un exposé des moyens, l’indication du délai dans lequel le défendeur est tenu de constituer avocat — qui est de quinze jours à compter de l’assignation dans la procédure normale — ou l’indication (s’il s’agit d’une procédure d’urgence à jour fixe) des jour et heure auxquels l’affaire sera appelée — en précisant la chambre à laquelle elle est distribuée, avec avis, dans tous les cas, au défendeur que, faute de constitution d’avocat dans le délai qui lui est ainsi donné, un jugement pourra être pris contre lui —, enfin la mention des pièces sur lesquelles la demande est fondée et, éventuellement, les données relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier. Il convient de noter que, dans le délai de quinze jours susvisé, le jour de la notification de l’assignation ne compte pas, que ce délai expire le dernier jour à 24 heures et que le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.

Les parties sont, sauf dispositions contraires, tenues de constituer avocat, et cette constitution emporte élection de domicile*. L’avocat du défendeur, dès qu’il est constitué, en informe celui du demandeur et remet copie de l’acte de constitution au secrétariat-greffe du tribunal. Le tribunal est saisi, à la diligence de l’une ou de l’autre partie, par la remise à ce même secrétariat-greffe d’une copie de l’assignation dans les quatre mois de celle-ci, faute de quoi l’instance est déclarée d’office périmée (ce délai, à l’instar de tous les délais exprimés en mois, expire le jour du dernier mois qui porte le même quantième que le jour de la notification de l’assignation qui fait courir le délai).

Le président du tribunal fixe les jour et heure auxquels l’affaire sera appelée, et, s’il y a lieu, il désigne la chambre à laquelle elle est distribuée, avec avis donné par le secrétariat-greffe aux avocats constitués. Au jour fixé, l’affaire est obligatoirement appelée devant le président de la chambre à laquelle elle a été distribuée ; celui-ci, après en avoir conféré avec les avocats présents, renvoie à l’audience les affaires qui lui paraissent prêtes à être jugées sur le fond ou bien décide que les avocats se présenteront de nouveau devant lui à une date qu’il fixe, pour leur permettre de parfaire leur procédure ; toutes les affaires que le président ne renvoie pas à l’audience sont confiées, pour être mises en état d’être jugées, à un juge dit « de la mise en état », qui est chargé d’instruire ces affaires et qui les renvoie devant le tribunal pour être plaidées après clôture de son instruction. En cas d’urgence, sur requête du demandeur, le président du tribunal peut abréger le délai dans lequel le défendeur est tenu de constituer avocat et autoriser le demandeur à assigner « à jour fixe », qu’il précise ; même en cas d’utilisation de cette procédure, il peut, au jour de l’audience qu’il a fixé, renvoyer de nouveau les avocats devant lui à une nouvelle date ou bien renvoyer l’affaire devant le juge de la mise en état.

• Dans les matières où les parties ont la libre disposition de leurs droits, la demande en justice peut être formée par la remise au secrétariat-greffe d’une requête conjointe. Cette requête, qui doit contenir — à peine d’irrecevabilité — un certain nombre de précisions tant sur les personnes physiques que sur les personnes morales requérantes, doit renfermer différentes autres mentions, notamment l’indication du tribunal devant lequel la demande est portée, la constitution des parties, l’objet de la demande ou, le cas échéant, des demandes respectives des parties, les points de fait et de droit sur lesquels celles-ci sont en désaccord ainsi que leurs moyens respectifs. Cette requête vaut conclusions et peut constituer un compromis d’arbitrage* ; les requérants peuvent instituer le juge pour amiable compositeur, c’est-à-dire pour arbitre doté (d’accord des parties) du pouvoir de statuer en équité et non pas nécessairement selon le droit, et renoncer dès la requête à la faculté de demander le renvoi à la formation collégiale. Le tribunal est saisi par la remise au secrétariat-greffe de la requête conjointe ; le président fixe l’affaire, désigne la chambre et fait donner avis aux avocats par le secrétariat-greffe. Le cheminement de la procédure reprend alors son cours normal, et, sauf le cas où l’affaire qui a fait l’objet de la requête conjointe a été attribuée à un juge unique, il est procédé suivant la procédure du renvoi à l’audience ou bien suivant celle du renvoi au juge de la mise en état.