Arras (suite)
Au Moyen Âge s’élevaient au milieu de la Petite-Place la pyramide et la chapelle de la Sainte-Chandelle, construites vers l’an 1200 pour commémorer une intervention de la Vierge à l’occasion du « mal des ardents ». Le xixe siècle a reconstruit, dans un autre quartier, une église Notre-Dame-des-Ardents, qui conserve le reliquaire de la Sainte-Chandelle (début du xiiie s.).
Très endommagé durant la guerre de 1914-1918, l’ensemble des deux places a été reconstitué depuis. Le beffroi (1463-1554) a retrouvé son élégance gothique, chaque détail fidèlement restitué, jusqu’au lion des Flandres qui le couronne. L’hôtel de ville, adossé au beffroi à partir de 1501, dresse de nouveau sa façade gothique sur la Petite-Place (ailes Renaissance).
Au début du xviie s., les Jésuites édifièrent à Arras un collège à la chapelle encore gothique (détruit). Au xviiie s. furent construits le palais des États (devenu palais de justice) et le théâtre, mais surtout la nouvelle abbaye Saint-Vaast. L’abbatiale, aujourd’hui cathédrale, est un noble édifice classique entrepris en 1755 par Pierre Contant d’Ivry (1698-1777), consacré en 1833. Long de 102 m, le vaisseau principal est délimité non par des piliers, mais par une colonnade (corinthienne) qui répond à un choix « antiquisant ». La monumentale abbaye (220 m sur 80) fut élevée un peu plus tôt, de 1746 à 1783, sur les plans du Parisien Jean-François Labbé (v. 1695-1750). Elle abrite notamment le musée municipal, ses collections de sculptures médiévales et classiques, de peintures françaises, de porcelaines de Tournai et d’Arras. Une salle regroupe les œuvres de paysagistes nés ou fixés à Arras, l’ami de Corot* Constant Dutilleux (1807-1865) et ses élèves.
G. G.
Les tapisseries d’Arras
Si générale était au Moyen Âge la renommée des tapisseries murales d’Arras qu’en Italie toutes les tentures des Flandres, tant à basses lisses qu’à hautes lisses, étaient dénommées arrazi, et que celles qui venaient d’ailleurs étaient qualifiées « façon d’Arras ». Des ateliers furent probablement montés dès 1310 ; ils exécutaient à hautes lisses. Les princes régnants étaient leurs principaux clients : pour Philippe le Hardi, en 1387, Michel Bernard tissait la colossale Bataille de Roosebeke, prototype des compositions aux motifs enchevêtrés dont subsistent deux spécimens, épisodes de l’Histoire du roy Clovis, appartenant à la cathédrale de Reims. Dans le somptueux mobilier des ducs de Bourgogne se trouvaient nombre de compositions allégoriques tirées du Roman de la Rose ou des « Moralitez », comme le Dict de Banquet et de Souper dont les cinq pièces sont conservées à Nancy. Le musée de Berne possède les tentures de Charles le Téméraire, trouvées dans le bagage du prince, tué en 1477 ; l’une d’elles reproduit une œuvre de Rogier Van der Weyden.
L’une des plus anciennes tapisseries d’Arras conservées est l’Histoire de saint Piat (1402), appartenant à la cathédrale de Tournai. Pierre Féré, qui la tissa, a combiné des effets différents pour animer son ouvrage : telle draperie tombant à gros plis traduits par de longues hachures s’oppose à telle cotte de mailles rendue par un pointillé. De cette habileté, le Daniel et Nabuchodonosor du musée de Cluny, d’environ 1495, porte encore la trace. Mais Arras, à la fin du siècle, avait perdu sa primauté, même son existence, en tant que foyer d’art ; la gilde était dissoute et les praticiens survivants dispersés.
G. J.