Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Portugal (suite)

On aurait pu espérer que la nouvelle dynastie nationale de Bragance renouvellerait le miracle de l’art manuélin, d’autant plus qu’elle disposait des ressources apparemment illimitées provenant de l’or et des diamants du Brésil. Le roi Jean V (1706-1750) ne manque pas d’ambition, mais le vaste palais-couvent qu’il fait construire à Mafra, à partir de 1717, par un Allemand italianisé, Johann Friedrich Ludwig (João Frederico Ludovice [1670-1752]), est une œuvre exagérément froide et rigide. L’intérêt est ailleurs, dans les monuments baroques et rococo du nord du pays, qu’il s’agisse de grandes entreprises comme les Clérigos de Porto (église 1732-1748, tour 1748-1763), par Nicolau Nasoni († 1773), et le Bom Jesus do Monte de Braga, ou d’édifices civils et religieux plus modestes. Une place à part doit être réservée aux productions des métiers d’art. Les carreaux de faïence (azulejos), introduits d’Andalousie avec l’art mudéjar, connaissent une prodigieuse fortune tant dans les édifices profanes que dans les églises. Parallèlement, les autels s’enrichissent dans ces dernières de retables en bois doré (talha dourada).

La reconstruction de Lisbonne* après le terrible tremblement de terre de 1755 est l’œuvre exemplaire du marquis de Pombal : cette manifestation des « lumières » dans le domaine de l’urbanisme ouvre la voie au néo-classicisme. Celui-ci est quelque temps contrebalancé par un baroque tardif né au château de Queluz (1758-1794). Par la suite, en réaction contre la trop grande rigueur néo-classique, on voit se développer un courant romantique dont la plus curieuse production est l’invraisemblable décor du château de Pena, élevé à partir de 1839 sur la montagne de Sintra par le prince consort Ferdinand de Saxe-Cobourg-Gotha.

Si l’on voulait enfin suivre le développement des mouvements artistiques plus modernes, il conviendrait d’explorer avec soin le domaine de la sculpture et surtout celui de la peinture, qui est particulièrement riche et contrasté pour les xixe et xxe s. Signalons au moins la célèbre statue de l’Exilé exécutée à Rome en 1870 par Soares dos Reis (1847-1889) et, plus près de nous, l’œuvre de sculpteurs comme António Duarte (né en 1912) et Lagoa Henriques (né en 1923). En peinture, Antonio Carvalho da Silva Porto (1850-1893) est l’initiateur du paysage naturaliste et Columbano (Columbano Bordalo Pinheiro, 1857-1929) un portraitiste puissant et mélancolique, tandis qu’Amadeo de Sousa y Cardoso (1887-1918) et José Sobral de Almada Negreiros (1893-1970) représentent les forces de rupture au Portugal, qui convergent un moment dans une phase futuriste. Le combat contre les tendances académiques est repris par quelques surréalistes (António Pedro, 1909-1966 ; António Dacosta, né en 1914 ; Fernando de Azevedo, né en 1923), puis par une génération de jeunes artistes dont beaucoup travaillent à l’étranger : ainsi Lourdes Castro (née en 1930) et René Bertholo (né en 1935) à Paris, qu’avait déjà choisi, en 1928, Vieira* da Silva.

M. D.

 A. de Lacerda et coll., História da arte em Portugal (Lisbonne, 1942). / R. Dos Santos, A Escultura em Portugal (Lisbonne, 1948-1950 ; 2 vol.) ; l’Art portugais (Plon, 1953) ; O Románico em Portugal (Lisbonne, 1956) ; O Azulejo em Portugal (Lisbonne, 1957). / M. Tavares Chicó, A Arquitectura gótica em Portugal (Lisbonne, 1956). / R. C. Smith, The Art of Portugal, 1500-1800 (Londres, 1968).
CATALOGUE D’EXPOSITION : Art portugais, peinture et sculpture du naturalisme à nos jours (Centre culturel de la fondation Calouste Gulbenkian, Paris, 1968).

possession

« Détention ou jouissance d’une chose ou d’un droit que nous tenons ou exerçons par nous-mêmes ou par un autre qui la tient ou qui l’exerce en notre nom » (art. 2228 du Code civil).


La possession est à la propriété d’une chose ou à la titularité d’un droit ce que le fait est au droit. Elle est un état de fait qui consiste à se comporter sur une chose comme si l’on était propriétaire ou sur un droit comme si l’on en était titulaire. À cet état de fait, le droit attache des conséquences lorsqu’il réunit un certain nombre de conditions.


Les conditions d’efficacité de la possession

La possession suppose la réunion il un élément objectif et d’un élément subjectif. L’élément objectif (appelé corpus) est l’exercice, en fait, des prérogatives attachées au droit dont on se prétend titulaire. L’élément subjectif (appelé animus) est l’intention de se comporter comme le véritable titulaire du droit. La réunion de ces deux éléments permet de distinguer la possession de la simple détention, moins efficace juridiquement.

La possession doit être continue ; le possesseur doit se comporter comme le ferait le véritable titulaire du droit, accomplissant les actes requis par l’exercice de celui-ci sans intervalle anormal, eu égard à la nature du droit. La possession doit être paisible, ne doit pas être obtenue en usant de violence, ni même de simples menaces (mais, si la violence vient à cesser, la possession redevient saine). La possession doit être publique, le possesseur devant se comporter ouvertement comme tel : la possession serait viciée si le possesseur agissait clandestinement. La possession doit être non équivoque : le possesseur doit agir exclusivement comme tel, et tel ne serait pas le cas si son comportement relativement à la chose ou au droit possédé pouvait s’expliquer autrement que par la possession.


Les conséquences juridiques de la possession

La possession étant le plus souvent le reflet d’un droit réellement existant pliez le possesseur, la loi lui fait produire certains effets et lui accorde sa protection. Il faut distinguer entre la possession de mauvaise foi (le possesseur sait qu’il n’est pas le vrai titulaire du droit) et la possession de bonne loi (le possesseur croit être réellement titulaire du droit exercé).

• La possession de mauvaise foi, si, par ailleurs, elle présente les qualités requises, a pour effet essentiel de faire acquérir le droit si elle se prolonge pendant trente ans (en général) : c’est le phénomène de la prescription* acquisitive. Subsidiairement, la possession de mauvaise foi confère au possesseur une position de force dans les procès concernant le droit en question.