Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Porto Rico ou Puerto Rico (suite)

L’implantation de firmes des États-Unis, le libre accès au marché américain, une main-d’œuvre relativement peu coûteuse, des ressources hydroélectriques importantes, les capitaux apportés par le tourisme ont été des facteurs favorables au développement industriel. Les branches les plus importantes de la production industrielle (dont la valeur totale dépasse 1,5 milliard de dollars) sont celles des produits alimentaires, en valeur un tiers de toute l’industrie (sucre, boissons, légumes et fruits en conserve ou congelés, dérivés des céréales, lait), de la confection et de la bonneterie, de la construction électrique (matériel pour centrales, électroménager, matériel de télécommunications, composants électroniques), des produits chimiques (produits pharmaceutiques, engrais, raffinage du pétrole), des produits du tabac, du textile, des produits du bois, de ceux du cuir. La construction électrique et l’industrie chimique sont les branches qui connaissent l’expansion la plus remarquable.

Porto Rico est au dixième rang dans le monde pour l’entrée et le solde de devises d’origine touristique et au premier pour le taux de progression des effectifs de touristes depuis une vingtaine d’années. L’île reçoit environ un million de visiteurs par an ; ils sont attirés par des sites pittoresques, des plages (Luquillo Beach, Guajataca Beach) et des ports de plaisance. Porto Rico sert aussi de plaque tournante pour les passagers à destination et en provenance des Antilles (5 millions de voyageurs transitent par l’aéroport d’Isla Verde, près de San Juan).

La production agricole est constituée pour les deux tiers par la canne à sucre (200 millions de dollars sur 300 millions), dont la culture n’a cessé de se développer du début du siècle jusqu’à ces dernières années et livrait plus d’un million de tonnes de sucre brut (1 300 000 t en 1950) ; mais depuis 1960 on assiste au déclin des surfaces, des rendements et de la production. Un plan de redressement, mis en œuvre récemment, vise à l’accroissement des rendements par la sélection des plants, l’usage des engrais et la mécanisation. La canne est cultivée dans les plaines côtières, surtout dans les parties irriguées de la plaine du Sud ; les exploitations sont de plusieurs types : grandes entreprises américaines, haciendas de la bourgeoisie rurale, petites propriétés, grandes fermes organisées et louées par l’État. Parmi les autres cultures, citons le café, le tabac, les bananes, les oranges, le maïs, les légumes. Il faut noter les progrès importants de l’élevage bovin pour la laiterie et la boucherie.

Le commerce extérieur de Porto Rico se fait presque exclusivement avec les États-Unis, qui fournissent des denrées alimentaires (céréales, produits animaux) et des biens d’équipement et de consommation et achètent sucre et rhum, ainsi que des textiles et des appareils et composants électriques et électroniques. Porto Rico importe du pétrole brut du Venezuela. La balance commerciale est nettement déficitaire.

Conquis par les États-Unis sur l’Espagne en 1898, Porto Rico a présentement le statut de Commonwealth of Puerto Rico ou Estado Libre Asociado de Puerto Rico. La langue usuelle demeure l’espagnol (ce qui pose des problèmes d’adaptation culturelle pour les émigrants aux États-Unis), quoique le bilinguisme soit répandu dans les milieux intellectuels, le commerce et les professions du tourisme.

P. B.


L’histoire


L’île espagnole

L’île est d’abord habitée par les Indiens Arawaks, qui exploitent remarquablement un sol naturellement fertile et s’organisent en clans dirigés par un cacique. Christophe Colomb en prend possession au nom des Rois Catholiques (nov. 1493) et la nomme San Juan Bautista. En fait, la nouvelle colonie espagnole n’est mise en valeur par les Européens qu’à partir de 1508, quand Juan Ponce de Léon l’explore à fond et fait du port de Puerto Rico un centre économique qui donnera son nom à toute l’île, la capitale s’appelant par la suite San Juan.

Les Espagnols réduisent facilement les Indiens révoltés en 1511 ; l’exploitation des gisements d’or — rapidement épuisés — est assurée par les Arawaks qui, décimés, sont remplacés par des Noirs africains. À partir de 1550, les colons espagnols s’adonnent presque exclusivement à l’agriculture, notamment à la culture du tabac et de la canne à sucre.

En fait, l’essor économique de l’île est gêné par les fréquentes incursions des Indiens Caraïbes et des pirates français, anglais et hollandais. Prenant tardivement conscience de l’importance stratégique de Porto Rico, l’Espagne fortifie puissamment San Juan, considérée comme le cœur de son empire ; si bien que les conquérants anglais (F. Drake en 1595, G. Clifford en 1598) ou hollandais (B. Hendrik en 1625) échouent dans leurs tentatives contre l’île ; celle-ci, au milieu des Antilles françaises, anglaises, danoises et hollandaises, devient un important centre de contrebande, d’autant que la culture du café y est introduite en 1736.

En 1797, sir Ralph Abercromby échoue lui aussi devant San Juan. Il est vrai que le loyalisme des Portoricains à l’égard des Bourbons d’Espagne, respectueux de leurs intérêts, oppose un front solide aux ambitions anglaises et empêche les colons de se jeter dans le mouvement d’émancipation qui, au début du xixe s., entraîne dans la rébellion le reste de l’Amérique espagnole. En reconnaissance, Ferdinand VII, en 1815, accorde à Porto Rico une large autonomie économique, lui permettant d’accueillir des colons de toutes provenances. De 1809 à 1814 et de 1820 à 1824, des Portoricains siègent aux Cortes de Madrid. Mais, peu à peu, un parti libéral se forme qui conteste les formes archaïques de l’administration coloniale. Sous Isabelle II (1833-1868), Porto Rico jouit d’une relative autonomie administrative. Mais les libéraux veulent beaucoup plus. En 1865, ils créent une commission qui établit, comme condition essentielle d’une véritable libéralisation, l’abolition de l’esclavage. Les conservateurs et les colonialistes réagissent en sens inverse, ce qui provoque, en septembre 1868, une rébellion menée par un petit groupe radical : elle échoue, faute de préparation suffisante. Mais le gouvernement républicain espagnol qui succède à Isabelle agit dans un sens libéral : l’esclavage est aboli à Porto Rico en 1873. À cette époque, la culture du café est devenue la principale ressource de l’île : elle quadruple entre 1862 et la fin du siècle, les États-Unis devenant le principal client des Portoricains.