Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

ponction (suite)

Ponction d’organes pleins

Parfois, la ponction est faite dans un organe ou un tissu plein soit pour y effectuer le prélèvement d’une carotte tissulaire en vue d’un examen histologique (v. biopsie), soit pour y injecter un produit dont la résorption va renseigner sur la circulation locale (par exemple injection d’un liquide riche en iode dans la rate pour étude radiologique de la circulation de la veine porte* ou injection dans le mollet de xénon radioactif pour étudier avec un compteur Geiger la courbe de passage dans la circulation de ce produit).


Technique des ponctions

La ponction s’effectue le plus souvent avec une aiguille. Il existe une infinité de variétés d’aiguilles imaginées pour répondre aux diverses ponctions. Ces aiguilles se différencient par leur calibre, par leur longueur, par la présence ou non d’un mandrin, qui augmente leur rigidité et qui fournit une pointe, par le siège et la forme de leur orifice distal (soit en bout d’aiguille, circulaire ou taillé en biseau, soit latéral), par la conformation de leur talon, étudié pour être raccordé à une seringue ou à un tuyau de raccord, et par leur flexibilité : certaines aiguilles à ponction vasculaire, par exemple, sont en matière plastique souple, mais la ponction s’effectue avec un trocart métallique ; dès que l’aiguille est dans la lumière du vaisseau, le trocart est retiré, et l’aiguille peut ainsi cathétériser les vaisseaux en suivant la courbe.

Les aiguilles à ponction pour biopsie sont les plus complexes.

La ponction peut aussi s’effectuer de la pointe d’un bistouri, d’un vaccinostyle ou d’une lancette.

Le premier organe traversé par l’instrument n’est pas nécessairement la peau : il peut s’agir de la muqueuse de revêtement d’une cavité naturelle, par exemple dans le cas de la ponction ganglionnaire par les bronches ou dans celui de la ponction du péritoine par le vagin. Il peut s’agir aussi d’une ponction effectuée après exposition chirurgicale d’un organe au cours d’une opération : par exemple ponction d’un canal pancréatique dilaté pour en évacuer le contenu.

J. T.

Ponge (Francis)

Poète français (Montpellier 1899).


Francis Ponge reçoit une éducation bourgeoise qui le conduit tout naturellement du lycée à l’université. Il échoue à l’oral de l’entrée à l’École normale supérieure et, refusant désormais toute contrainte, décide de se consacrer exclusivement à la poésie. À partir de cette date (1919), il mènera une vie besogneuse, pris entre la nécessité de travailler pour subvenir aux besoins de sa famille (il se marie et exerce successivement la profession d’employé dans des maisons d’éditions, d’assureur et de professeur à l’Alliance française) et l’impératif de sauvegarder les « vingt minutes par soirée » qui lui sont indispensables pour entrer dans son « laboratoire verbal ». Sa première œuvre, Douze Petits Écrits (1926), passe quasi inaperçue, et le Parti pris des choses, qui soulèvera des critiques parfois injurieuses, ne paraît qu’en 1942.

La poésie de Ponge s’efforce de « prendre le monde en réparation », de réhabiliter méthodiquement ce qui le constitue, et plus particulièrement les « choses ». Par l’intermédiaire de ces « choses », prenant délibérément leur « parti », objectivement avec « un-regard-tel-qu’on-le-parle », Ponge veut « s’aboucher au cosmos ». Pour ce faire, « il suffit d’abaisser notre prétention à dominer la nature et élever notre prétention à en faire physiquement partie ». Il s’agit de s’immiscer dans les « trente-sixième dessous », de se frayer un chemin dans ce « monde muet » des objets, qui devient la « seule patrie » du poète. Il s’en veut l’« ambassadeur ».

Pour trouver l’objet tel quel, il se fait lui-même objet, non sans, au préalable, s’être attardé plus particulièrement à l’objet par excellence, à savoir le langage et plus précisément encore, les mots. Le parti également pris pour les mots le conduit à vouloir « redonner force et tenue au langage », à rechercher une équivalence linguistique toujours plus approchée de l’objet appréhendé. C’est ainsi que Ponge rebrousse chemin dans les méandres de l’étymologie, jouant avec les mots et ne craignant pas, par exemple, de créer une parenté scientifiquement suspecte, mais pour lui révélatrice entre « croire » et « croître ». La physiologie du mot, son pouvoir de répercussion sensible, voire sensuelle, importent plus que les significations qui ont pu lui être données. À l’exemple de Lautréamont, Ponge se propose de fonder une « rhétorique nouvelle », s’appliquant d’abord à « résister aux paroles » qui ont été déformées pour être ensuite en mesure de prendre le monde aux mots, réduisant au maximum l’écart qui les sépare.

Mais il ne se contente pas de ce monde-là, des objets et des mots ; ils ne sont que les éléments essentiels fondamentaux d’un projet qui dépasse le poème (la Fabrique du pré, 1971). Celui-ci cherche non seulement à « exprimer », mais à « obtenir ». Quoi ? un homme différent : « Non pas vois-ci l’homme mais veuille l’homme. » Ce qui n’entraîne pas pour autant le poète à prendre parti pour une poésie « engagée ». « Nous travaillons à un renouvellement des esprits mais non en ce qui concerne les rapports sociaux (si quand même) plutôt en ce qui concerne le monde muet. »

L’œuvre de Ponge donne un exemple aux hommes restés à la surface, déroutés par les idéologies bavardes, dont la plus pernicieuse est encore celle de l’absolu, dans laquelle l’homme « malade de nostalgie » se réfugie, subissant, inconscient, le confusionnisme des passions et des sentiments. Elle est un instrument pour apprendre à voir objectivement et à rendre compte avec exactitude. Elle instaure cette « folle rigueur » qui redonne place aux objets, aux mots, tout en laissant une marge suffisante pour que ce qui est à obtenir (un homme avec un « centre de gravité en lui-même ») puisse se dessiner en filigrane.

M. B.

 G. Jaeger, Einige Aspekte der Dichtung Francis Ponges (Zurich, 1962). / P. Sollers, Francis Ponge (Seghers, 1963). / E. Walther, Francis Ponge, eine ästhetische Analyse (Cologne et Berlin, 1965). / J. Thibaudeau, Francis Ponge (Gallimard, 1967). / F. Ponge et P. Sollers, Entretiens (Gallimard et Éd. du Seuil, 1970).

Quelques œuvres de Francis Ponge

1961

le Grand Recueil.

1965

Pour un Malherbe.

1967

le Savon.

1971

la Fabrique du pré.