Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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pollution (suite)

1. Les effets nuisibles. Les effets nuisibles chroniques sont très difficiles à discerner parce que la teneur de l’air en polluants est très faible et que, de façon générale, d’autres phénomènes peuvent avoir des effets de même nature. Ainsi, dans le cas des effets du dioxyde de soufre sur la santé, les données suivantes sont disponibles :
— la teneur limite autorisée en atmosphère de travail (supportable 8 heures par jour par des sujets adultes, en bonne santé) généralement admise est de 5 p.p.m. (parties par million), soit 13 mg/m3 (norme américaine) ;
— lors d’accidents de pollution dans la vallée de la Meuse (en Belgique en 1930), en Pennsylvanie (en 1948) et à Londres (smog de 1952), il a été constaté une augmentation de mortalité et de morbidité par rapport à la normale affectant plus particulièrement des personnes âgées et des nouveau-nés, alors que la teneur en dioxyde de soufre était évaluée à quelques milligrammes et que d’autres polluants étaient également présents à de fortes concentrations ; ainsi, les teneurs en dioxyde de soufre et en fumées noires étaient respectivement d’environ 2 mg/m3 et 4 mg/m3 ;
— dans les villes, on constate généralement un excès de mortalité et de morbidité par rapport aux campagnes sans qu’il soit possible de déterminer la cause parmi tous les paramètres qui font la différence entre la ville et la campagne (entassement, tabagisme, alcoolisme, qualité des soins et de la détection des maladies, etc.), la teneur en dioxyde de soufre étant en moyenne annuelle comprise le plus souvent entre 0,05 et 0,15 mg/m3.

De façon générale les effets de la pollution sur la santé sont recherchés dans les maladies pulmonaires chroniques, bronchite et emphysème, l’asthme et le cancer.

Les effets sur la végétation proviennent essentiellement du dioxyde de soufre et du fluor. Le dioxyde de soufre provoque des nécroses lors d’expositions relativement courtes à des teneurs de l’ordre de 1 p.p.m. pour certaines espèces. Le fluor a des effets cumulatifs et, de ce fait, cause des dégâts dans les espèces à feuilles persistantes telles que les résineux.

Certaines dégradations des matériaux peuvent avoir une relation avec la pollution atmosphérique : dégradations des toitures en zinc et altération des roches et monuments, notamment des façades des bâtiments en pierre.

2. La gêne. La pollution atmosphérique se traduit par une salissure des biens matériels due aux retombées de poussières et de suies, par une sensation d’inconfort provoquée notamment par la diminution de la visibilité et par les odeurs. Cette dernière source de nuisances* est caractérisée par le fait que souvent elle met en jeu une quantité de polluants faible, incapable de causer un effet direct sur la santé, mais qu’elle engendre une gêne et une irritation très importantes et souvent subjectives.

Un exemple : le smog oxydant. Une manifestation récente de la pollution atmosphérique est constituée par l’apparition dans certaines conditions météorologiques de réactions dans l’atmosphère qui ne peuvent se faire sans l’intervention de la lumière solaire, qui mettent en jeu des oxydants (oxydes d’azote, ozone) et des composés organiques (notamment des hydrocarbures non saturés) et qui ont des effets sur la pollution (irritation des muqueuses des yeux et de la gorge, difficulté de respirer, engourdissement des membres) et sur la végétation (dégâts à certaines espèces : eucalyptus, tabac, arbres et végétaux divers). Ces phénomènes, encore mal connus et controversés, sont apparus essentiellement au Japon, aux États-Unis, aux Pays-Bas et en Australie.

B. Effets régionaux. Il est possible que des polluants soient transportés à longue distance. Ainsi, les pays Scandinaves estiment que les produits soufrés émis jusqu’à un millier de kilomètres contribuent à acidifier l’eau de pluie et par voie de conséquence l’eau de leurs rivières et de leurs lacs à un point tel qu’il en résulte des dommages à la faune et à la flore.

C. Effets planétaires. Certaines substances dont la teneur dans la haute atmosphère pourrait varier sous l’effet des activités humaines sont susceptibles d’avoir une influence sur le climat, plus précisément sur la température moyenne au niveau du sol.

Cette incidence est mal connue pour les poussières, dont la teneur varie aussi par suite de phénomènes naturels.

La teneur en gaz carbonique dans l’atmosphère augmente d’environ 0,2 p. 100 par an. On estime à 18 p. 100 l’accroissement de la concentration en gaz carbonique résultant de l’utilisation des combustibles fossiles jusqu’à l’an 2000. La conséquence pourrait en être une augmentation moyenne de la température superficielle de la terre de 0,5 °C.

Corrélativement se pose la question de savoir comment évolue la teneur en oxygène de l’atmosphère. Les installations de combustion et les êtres vivants sont en effet des consommateurs importants d’oxygène. Mais la végétation et surtout les océans produisent de l’oxygène. Au total, il semble qu’un équilibre soit établi puisque la teneur moyenne en oxygène de l’atmosphère ne varie pas depuis 1910 (date à partir de laquelle des mesures sérieuses ont été effectuées) et s’établit à 20,946 p. 100.

La pollution de l’atmosphère et le temps

On pense que parmi les raisons qui ont imposé les glaciations quaternaires a pu intervenir une diminution de la transparence atmosphérique (cendres volcaniques ?). Bien qu’un accroissement localisé de la charge de l’air en poussière n’aboutisse pas nécessairement à un refroidissement, on peut convenir que le déversement massif de particules dans l’atmosphère interviendrait, le seuil de dépoussiérage naturel dépassé, sur le rayonnement dans le sens de l’affaiblissement. D’autre part, on sait aujourd’hui que l’augmentation de la teneur de l’atmosphère en CO2 aboutit à un réchauffement. On conçoit donc que, par l’intermédiaire des polluants carbonés, la pollution puisse un jour intervenir sur le temps de façon sensible, au moins régionalement. Il faut dire encore que, par les vols réactés dans la stratosphère, l’homme apporte (outre de la vapeur d’eau et de l’oxyde de carbone) de l’oxyde d’azote. Or, l’oxyde d’azote a le pouvoir de modifier la teneur en ozone, ozone qui influe justement sur les ondes courtes du spectre solaire. À ces interventions possibles sur les bilans radioactifs (ponctuels ou plus généraux), il convient d’ajouter l’impact de la pollution radioactive artificielle. Il serait cependant téméraire, en l’état actuel de la recherche, de décider des effets de l’intervention de celle-ci sur le temps. Rien de sérieux ne laisse supposer que les bombes atomiques le bouleversent. Des années, des saisons aberrantes par rapport à la normale se sont, certes, manifestées en bien des points du globe depuis le déroulement des expériences nucléaires. Mais aucune de ces situations n’a représenté quelque chose de plus exceptionnel que celles qui se sont manifestées dans le passé, c’est-à-dire à une époque bien antérieure à l’ère atomique.