Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

politique (sociologie) (suite)

Relatifs à la surcharge des exigences, les soutiens politiques, quant à eux, sont de trois ordres. Easton distingue les soutiens de la communauté politique, les soutiens du régime et les soutiens des autorités ; ce dernier type de soutien pouvant se substituer au précédent, c’est le problème de la légitimité qui se trouve de nouveau posé et plus spécialement celui du pouvoir charismatique. La perte du charisme illustre parfaitement ce que Easton entend par « effondrement des soutiens », effrondement (distinct de l’érosion) dans lequel il faut chercher l’explication des crises plutôt que du côté des exigences : d’une certaine façon, l’interrogation « comment meurent les régimes ? » remplace l’interrogation classique « comment naissent les révolutions ? »

Si à l’analyse fonctionnelle on a pu reprocher d’isoler les faits politiques de leur contexte social pour mieux pouvoir les comparer et de donner dans un évolutionnisme contestable en prenant, notamment comme le fait Seymour M. Lipset dans The First New Nation (1963), le système politique américain comme exemple de passage du sous-développement au développement politique, l’analyse systémique est généralement critiquée pour simplifier à l’excès des mécanismes complexes et s’appuyer sur un environnement désincarné, amorphe et non structuré. Mais on ne peut guère reprocher à Easton d’avoir négligé l’étude des outputs, car sa démonstration vise précisément à prouver que la décision habituellement prise soit pour satisfaire des exigences, soit pour s’assurer de nouveaux soutiens ne doit pas être survalorisée.

Comme toute étude de sociologie politique, l’analyse systémique débouche sur le problème de la socialisation politique. Étudiés par H. Hyman dans un ouvrage déjà ancien, Political Socialization, a Study in the Psychology of Political Behavior, les processus de socialisation politique mettent en évidence le lien qui unit sociologie politique et sociologie générale. Les enquêtes de Easton en collaboration avec Robert D. Hess puis avec Jack S. Dennis sur l’apprentissage par les enfants des valeurs politiques nous invitent à réfléchir sur l’acquisition des orientations politiques et la formation des attitudes politiques au cours de la période préadulte. De quels modèles de socialisation les enfants disposent-ils ? Et quelles sont les instances de socialisation ? La perception, la personnalisation, l’idéalisation de l’autorité nous renvoient à une sociologie de l’institution familiale, car c’est au sein de la famille que s’intériorise l’autorité. Se demander, par conséquent, dans quelle mesure la socialisation politique contribue au maintien du système menacé par le « stress » ou dans quelle mesure elle entretient la légitimité n’a d’intérêt que si l’on se réfère aux travaux de Harold D. Lasswell et de T. W. Adorno* sur les différents types de structure psychologique et à ceux d’Erich Fromm et Max Horkheimer sur l’autorité dans la famille et dans l’État. C’est par là même valider la proposition initialement avancée selon laquelle les faits politiques doivent être traités comme des faits sociaux.

B. V.

➙ Anthropologie politique / Autorité / Bureaucratie / Électorale (sociologie) / Enquête par sondages / État / Groupe de pression / Parti politique / Politique (science) / Sociologie.

 M. Duverger, les Partis politiques (A. Colin, 1951 ; 6e éd., 1967) ; Sociologie politique (P. U. F., 1965) ; Sociologie de la politique (P. U. F., 1973). / J. Meynaud, les Groupes de pression (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1960 ; 3e éd., 1965). / F. Bourricaud, Esquisse d’une théorie de l’autorité (Plon, 1961). / R. Aron, la Lutte des classes (Gallimard, 1964) ; Démocratie et totalitarisme (Gallimard, 1965) ; les Étapes de la pensée sociologique (Gallimard, 1967). / D. Easton, A Systems Analysis of Political Life (New York, 1965). / G. Balandier, Anthropologie politique (P. U. F., 1967). / L. J. Edinger, Political Leadership in Industrialized Societies (New York, 1967). / H. Janne, le Système social (Institut de sociologie, Bruxelles, 1968). / S. Hurtig, Science politique (Cours I. E. P., 1969). / J. Attali, Analyse économique de la vie politique (P. U. F., 1972). / R. G. Schwartzenberg, Sociologie politique (Éd. Montchrestien, 1972 ; 2e éd., 1974). / J.-P. Cot et J.-P. Mounier, Pour une sociologie politique (Éd. du Seuil, 1974 ; 2 vol.).

politique agricole

La politique agricole fait partie intégrante de la politique d’économie générale.


Par conséquent, il est indiqué de n’employer l’expression « politique agricole » que dans le cas où l’agriculture est déjà intégrée dans l’économie générale ou que l’on envisage son intégration dans une économie en voie de développement. Des interventions politiques comme la bénéfique libération des paysans helléniques par Solon ou bien les ruineuses mesures qui favorisèrent le développement des latifundia dans l’Empire romain étaient des actes d’une politique qu’il faudrait qualifier d’« agraire ».

Le domaine de compétence de la politique agricole s’étend sur les trois facteurs qui déterminent le processus de la production agricole. Ce sont la technique agricole, l’économie rurale et la constitution agraire (ensemble des conditions de droit social qui règlent les relations des ressortissants ruraux entre eux et avec la terre). Chacun de ces trois facteurs présente deux aspects : celui de la structure, élément de la stabilité relative, et celui de l’action, élément de la transformation.

Encore qu’il soit parfois difficile de déterminer la limite où commence la stabilité relative, il est de la plus haute importance pour la politique agricole de distinguer le plus précisément possible la structure et l’action, d’étudier ensuite minutieusement ces deux aspects de chacun des trois facteurs technique, économique et social et de tirer de ces études des conclusions permettant d’orienter les interventions en vue d’améliorer une situation considérée comme imparfaite ou insuffisante.