Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

pipe-line (suite)

Pose d’un pipe-line

Elle est confiée à un certain nombre d’équipes travaillant à l’avancement, à l’allure de 5 km par jour en terrain aisé, chacune déployée comme une grande chenille sur plusieurs kilomètres et effectuant les opérations suivantes :
1o création d’une piste de circulation et de travail, sur une emprise d’une vingtaine de mètres de largeur ;
2o ouverture de la tranchée à l’aide d’explosifs en terrain dur ou d’une machine continue (trancheuse) en terre meuble ;
3o bardage et mise en place des tubes le long de la tranchée grâce à des tracteurs chenillés à flèche latérale (side-boom) ;
4o cintrage des tubes pour les adapter aux changements de pente ou de direction, effectué à la cintreuse hydraulique ;
5o soudure, opération capitale qui conditionne la vitesse d’avancement du chantier et qui consiste à positionner chaque tube, long d’une dizaine de mètres, à l’aide d’un « clamp » intérieur à vérins hydrauliques, puis à réaliser quatre passes de soudure à l’arc électrique soit manuellement, soit avec une machine automatique ;
6o pose sur la conduite d’un revêtement de protection contre la corrosion du sol, exécuté à l’avancement par une machine qui, après brossage, applique un enduit de 3 mm de brai fondu, puis un voile de fibre de verre et, enfin, une bande de feutre d’amiante ;
7o mise en fouille, opération continue elle aussi, grâce à la flexibilité du tube ;
8o remblaiement de la tranchée avec une pelle mécanique latérale qui met en place 60 cm à 1 m de remblai ;
9o remise en état du terrain.

Les traversées de rivières, de fleuves et de bras de mer sont réalisées en creusant une souille dans leur lit, en construisant à l’avance la longueur correspondante de pipe-line au sec sur l’une des rives, en l’équipant de flotteurs et en la tirant en place à l’aide d’un treuil situé sur l’autre rive. Un sea-line, par contre, nécessite, pour être descendu au fond de l’eau, l’utilisation d’une barge de haute mer à bord de laquelle s’effectuent la soudure et le revêtement. On creuse ensuite la souille sous la ligne posée au fond, grâce à une machine à jets d’eau à très haute pression que l’on fait avancer le long de la canalisation.

Un contrôle technique très poussé, par radiographie et épreuve de pression à 1,2 fois les conditions maximales prévues, précède la mise en service de l’ouvrage, qu’il soit terrestre ou maritime. De plus, une protection cathodique est installée pour écarter tout risque de corrosion externe.

Les stations de pompage, ou de compression pour les gazoducs, sont généralement équipées de machines rotatives à entraînement électrique : par exemple, les motopompes du pipe-line Sud-Européen ont une puissance de 2 500 ch chacune et sont alimentées par l’E. D. F.

Dans les régions non industrialisées, on utilise souvent une partie du pétrole ou du gaz véhiculé par la ligne comme combustible pour les moteurs Diesel ou les turbines à gaz des stations.


Installations terminales

Pour qu’un oléoduc fonctionne de manière économique, c’est-à-dire en continu pendant 95 p. 100 du temps, il faut disposer à chacune de ses extrémités d’un dépôt de stockage pour faire face à l’irrégularité de l’alimentation de l’ouvrage, qu’il s’agisse d’arrivée de navires, de la production de puits ou de sorties de raffineries.

Le terminal de tête de ligne a également pour fonction de planifier dans l’ordre désiré les divers lots (batches) introduits dans le pipe et de télécommander les opérations à partir d’une salle de contrôle.


Exploitation du pipe-line

Les grands oléoducs à brut ou à produits finis forment, en effet, des systèmes complexes à exploiter, comportant un tronc commun et autant de ramifications qu’il y a de raffineries ou de dépôts à desservir, traversant des frontières, pompant jour et nuit des milliers de mètres cubes par heure à des centaines de kilomètres et sous des pressions généralement de l’ordre de 75 bars. Les opérations sont dirigées à partir d’un centre de « dispatching » qui programme et déclenche l’ouverture et la fermeture des vannes ainsi que le démarrage et l’arrêt des pompes, qui enregistre les débits, les pressions et les volumes, qui est comptable des tonnages qui lui sont confiés et doit les restituer à leur propriétaires respectifs. Toutes les informations nécessaires à cette mission sont centralisées sur un ordinateur.

L’intérieur d’un pipe-line est régulièrement nettoyé en intercalant entre deux batches un piston racleur muni de brosses ; des sphères en caoutchouc peuvent également être utilisées à l’interface de deux produits différents pour éliminer toute contamination de qualité.

Les fuites, qui sont assez rares, peuvent être détectées par une chute de pression ou par une discordance des débits enregistrés à chaque extrémité ; elles sont ensuite localisées en parcourant le tracé de l’oléoduc, à pied ou en hélicoptère.


Développement pris par les pipe-lines

Née aux États-Unis du besoin de relier des champs pétrolifères très éloignés des grands centres de consommation, l’industrie moderne des pipe-lines est maintenant tout aussi développée en Europe, au Moyen-Orient et dans d’autres régions du globe. Les réalisations françaises comprennent :
— le pipe-line Sud-Européen, qui, partant de Fos-Lavéra, dessert onze raffineries en France, en Suisse et en Allemagne, où il se raccorde aux ouvrages venant de Gênes et de Trieste ;
— le Trapil, qui relie sept raffineries de la vallée de la Seine à tous les dépôts de la Région parisienne ;
— le Méditerranée-Rhône, qui part de quatre raffineries de l’étang de Berre et alimente Lyon, Grenoble et Genève ;
— les oléoducs et gazoducs sahariens, qui appartiennent à l’État algérien ;
— Le Suez-Méditerranée, enfin, réalisation internationale qui relie la mer Rouge à Alexandrie par une ligne de 42 pouces (plus de un mètre de diamètre).

Parmi d’autres réalisations majeures en cours figurent le Trans-Alaska, dont la réalisation s’avère particulièrement délicate en raison des difficultés techniques et des craintes pour la protection de la nature, et les sea-lines immergés en mer du Nord sur plus de 200 km entre les gisements sous-marins et l’Écosse, la Norvège et l’Allemagne.