Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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arithmétique (suite)

L’invention des règles à calcul par Edmund Gunter (1581-1626), en 1624, en est une application immédiate. Les règles à calcul supplantent rapidement les compas de proportions, apparus au début du siècle et dont Galilée (1564-1642) est un des inventeurs. Toujours soucieux de simplifier et de faciliter les techniques opératoires, Napier, vers la même époque, imagine ses bâtonnets. Ceux-ci permettent de construire très rapidement la table de multiplication des neuf premiers nombres par un multiplicateur entier arbitraire. Son promptuaire est une amélioration de la disposition de cette table, et son Arithmétique locale est un échiquier sur lequel on peut faire manuellement des multiplications par le procédé égyptien de la duplication. Un autre astronome, Wilhelm Schickard (1592-1635), conçoit en 1623 une horloge à calcul fondée sur les bâtonnets de Napier. Il ne fut construit qu’un seul modèle de cette horloge, détruit dès 1624 par un incendie. La machine arithmétique de Blaise Pascal (1623-1662) est plus célèbre. C’est une additionneuse, dont plusieurs exemplaires subsistent. Construite à partir de 1642, elle est d’ailleurs mise dans le commerce. Trente ans après Pascal, Gottfried Wilhelm Leibniz (1646-1716) conçoit et met au point en 1673 une multiplicatrice. Ce n’est cependant qu’au xixe s. que les progrès de la technologie permettent l’usage de machines pratiques, de plus en plus répandues. L’électronique prend ensuite la relève, et les additionneuses et les machines de bureau abondent de nos jours. Les grandes machines électroniques actuelles peuvent d’ailleurs effectuer non seulement les quatre opérations de l’arithmétique, mais également des programmes mathématiques beaucoup plus complexes, ainsi que des programmes logiques ou de gestion. Leur étude constitue tout un nouveau domaine des mathématiques, la cybernétique.


Arithmétique théorique

Faute de documents, il est à peu près impossible d’étudier la période préhellénique. Passons sous silence les rêveries mystiques des pythagoriciens. Plus positives ont été leurs considérations sur le pair et l’impair, dont il reste des traces dans les Éléments d’Euclide (iiie s. av. J.-C.) et qui ont permis, par exemple, de démontrer l’irrationalité de De même, le concept de nombre figuré a joué un rôle certain dans l’élaboration des procédés sommatoires. Un nombre figuré plan est un nombre dont la représentation par des jetons peut prendre une figure géométrique. Ainsi, un nombre triangulaire se représente par le total de lignes de 1, 2, 3, 4, etc., jetons. Les nombres figurés que donnait Nicomaque de Gérase dans son Introduction arithmétique, au iie s. de notre ère, se retrouvent au vie s. dans le De institutione arithmetica de Boèce (v. 480-524) et pratiquement dans toutes les arithmétiques jusqu’à la Renaissance comprise. Malheureusement, cette longue tradition transmettait aussi la déplorable nomenclature grecque des rapports. Savoir dire, par exemple, que le rapport de 5 à 24 est la raison sous quadruplesurquadrupartientes quintes n’avance pas à grand-chose et ne fait que créer des difficultés inutiles.


Les livres arithmétiques d’Euclide

Les Éléments d’Euclide contiennent une très belle et profonde exposition de l’arithmétique dans les livres VII, VIII et IX. Le livre VII développe d’abord une théorie des rapports rationnels, qui ne présente qu’une ou deux faiblesses quant à la rigueur de l’exposition. Le nombre y est considéré comme une grandeur, et les propriétés intuitives de l’addition sont tacitement admises (existence de la somme de deux ou de plusieurs nombres, commutativité et associativité). Le caractère discret de l’ensemble ℕ des nombres entiers naturels s’exprime par deux axiomes implicites principaux : l’unité mesure tout nombre, et tout ensemble d’entiers possède un plus petit élément. C’est ce dernier fait qui permet de trouver la plus grande commune mesure de deux nombres au moyen de l’algorithme d’Euclide. Cet algorithme, instrument fondamental de l’arithmétique théorique, est d’ailleurs lié à la simplification approchée des rapports telle que l’ont pratiquée Archimède et Aristarque de Samos (v. 310-v. 230 av. J.-C.). Il est le point de départ de la théorie des fractions continues, qui joueront, entre les mains de Leonhard Euler (1707-1783), de Louis de Lagrange (1736-1813) et de leurs successeurs, un rôle de premier plan. On trouve encore au livre VII une théorie des nombres premiers entre eux et des nombres premiers absolus, qui figure toujours dans l’enseignement élémentaire, presque identiquement. Vient ensuite une courte étude du plus petit commun multiple. Le livre VIII est presque entièrement consacré aux nombres entiers en progression géométrique, soit, dans un autre langage, aux puissances entières des fractions. Son but est, en dernière analyse, d’établir d’une façon générale le cas de rationalité des racines nièmes d’un entier ou d’une fraction. À cet égard, la notion de nombre rationnel n’est jamais explicitée, les fractions n’apparaissant que comme rapports ou raisons entre entiers. En langage moderne, l’ensemble ℚ+* des nombres rationnels positifs, zéro exclu, n’est explicitement étudié que sous son aspect de groupe multiplicatif. Le livre IX comprend une partie vétusté sur le pair et l’impair, mais aussi des théorèmes fort subtils, dont l’un établit l’existence d’une infinité de nombres premiers et un autre la structure des nombres parfaits pairs, ou euclidiens.


L’« Arithmétique » de Diophante

L’époque où vécut Diophante d’Alexandrie est inconnue et ne se place avec quelque certitude qu’entre 150 avant notre ère et 350 après, la date la plus probable étant le milieu du iiie siècle de notre ère. L’Arithmétique comportait treize livres, dont seulement six ont été conservés. C’est un ouvrage qui se rattache plus au courant de la logistique qu’à celui de l’arithmétique théorique. Cependant, comme les problèmes traités ne comportent que des données et des solutions en nombres rationnels, il s’appuie souvent sur les propriétés spécifiques des nombres entiers. Il a ainsi inspiré au xviie s. les recherches arithmétiques de Claude-Gaspar Bachet de Méziriac (1581-1638) et surtout de Pierre de Fermat (1601-1665).