Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

arithmétique (suite)

Les astronomes arabes copient les Grecs en utilisant leur alphabet propre ; les astronomes occidentaux font de même, mais en utilisant les chiffres arabes. Le même nombre que ci-dessus devient 2 596° 14′ 24″. Certains astronomes — au xvie s. en particulier — utilisent même l’écriture sexagésimale dans les deux sens, ascendant comme descendant. Le nombre cité se représente alors ainsi : 43′ 16° 14′ 24″. L’existence de ces nombres physiques, très pratiques, et surtout l’existence de tables numériques calculées dans ce système retarderont beaucoup l’apparition des nombres décimaux.

Le procédé de multiplication égyptien par duplications successives évite — pour les entiers — tout effort de mémoire. La numération sexagésimale, en raison de la grandeur de la base, en demande, au contraire, beaucoup : d’où les nombreuses tables numériques babyloniennes. En particulier, comme ne peuvent être représentés, exprimés, que les nombres de la forme a et n sont des entiers, il importe de connaître les nombres entiers qui admettent un inverse de cette sorte et de dresser des tables de ces inverses. Beaucoup de tablettes contiennent de tels répertoires.


Grèce et époque hellénistique

La Grèce a utilisé principalement deux systèmes de numération, tous deux fondés sur l’écriture alphabétique. La numération attique procède comme l’écriture hiéroglyphique et, plus tard, l’écriture romaine :

L’écriture savante, utilisée par tous les grands mathématiciens, les calculateurs byzantins et les astronomes, se rapproche de l’écriture égyptienne hiératique. Elle utilise vingt-sept lettres pour écrire tous les entiers jusqu’à 10 000, la myriade, exclusivement :

Au-delà de 10 000, on décompose en myriades 104, myriades secondes 108, myriades troisièmes 1012, etc. Les myriades sont indiquées soit par la lettre M, soit au moyen de points. Archimède* et Apollonius ont donné des procédés de notation de très grands nombres. Ce système savant a été repris par divers peuples à écriture alphabétique, les Hébreux et les Arabes entre autres.

Pour les fractions, les Grecs utilisent les quantièmes égyptiens, mais aussi, depuis l’époque classique (v. 300 av. J.-C.), les fractions générales. À l’autre bout du monde et à la même époque, les Chinois font de même. La traction est notée par les Grecs , le dénominateur étant écrit au-dessus du numérateur. La notation grecque évite l’usage du zéro. Cependant, les astronomes l’utilisent, lorsqu’ils adoptent, dès le iie siècle avant notre ère, le système sexagésimal. Dans les papyrus de l’époque ptolémaïque, il prend diverses formes :


Les auxiliaires du calcul

La numération grecque savante permet les calculs avec à peu près la même facilité que la numération actuelle. Il n’en va pas de même des numérations attique ou romaine. De toute façon, on trouve chez les divers peuples des procédés auxiliaires de calcul. Viennent d’abord les tables numériques, dont l’origine remonte aux Babyloniens et qui subsistent de nos jours, depuis la modeste table de Pythagore des écoliers jusqu’aux grandes tables trigonométriques, logarithmiques et autres. Il convient ensuite de citer le calcul mental, le calcul digital, qui eut dans l’Antiquité et le Moyen Âge une grande extension, ainsi que les diverses machines, dont les bouliers. Ce sont déjà des mécanismes savants, de l’abaque portatif romain au suanpan (souan-p’an) chinois, au soroban japonais et au stchety russe, tous encore en usage. Le mot calcul lui-même, qui vient du latin calculas (caillou), rappelle l’existence d’autres abaques à colonnes, ou lignes, utilisés en Grèce, à Rome et en Occident jusqu’au xviie s. Les jetons peuvent avoir tous la même valeur, et c’est le cas le plus fréquent dans les abaques utilisés dans les calculs du petit commerce et des ménages :


le nombre 121 635 noté sur un abaque romain.

Une variante importante du calcul sur l’abaque consiste en l’utilisation de jetons marqués. Ces marques, ou apices, sont au nombre de neuf et tiennent lieu de nos chiffres. Par exemple, le jeton marqué du signe équivalent à 8 vaut huit jetons unité. C’est vers l’an 1000 que ce système apparaît en Occident.


La numération décimale de position

La numération actuelle apparut en Inde vers le vie s. On remarquera que l’écriture de position préexistait dans la notation sexagésimale, avec l’emploi du zéro chez les astronomes persans, séleucides ou alexandrins. Les Arabes diffusèrent rapidement la découverte indienne, avec deux formes différentes des chiffres, dont l’une prévalut en Orient et l’autre se répandit dans nos contrées à partir du xiie s. On vit aussi des Byzantins utiliser un zéro avec les neuf premiers signes de la notation alphabétique grecque. Cependant, l’extension de la notation décimale vers la droite et l’utilisation des fractions décimales systématiques se faisaient attendre. Si les nombres décimaux sont inventés et utilisés par quelques mathématiciens de génie, mais isolés, comme Emmanuel Bonfils de Tarascon en 1350 ou Djamchīd al-Kāchī (mort v. 1436) à Samarkand, ce n’est qu’à la fin du xvie s., avec François Viète (1540-1603) et surtout Simon Stevin (1548-1620), qu’ils s’imposent à tous et supplantent dans les calculs savants les fractions sexagésimales. L’adoption par la Convention du système métrique décimal assure enfin leur triomphe dans tous les milieux. Grâce à cet ensemble de perfectionnements, le calcul écrit, le calcul à la plume, est devenu de plus en plus pratique.


Nouveaux auxiliaires du calcul

Cependant, les tables numériques se développent. Les astronomes du xvie s. mettent au point une méthode aujourd’hui oubliée, la prostaphérèse, qui, à partir de formules comme 2 cos a . cos b = cos (a + b) + cos (a – b), permet de remplacer les multiplications et les divisions, restées pénibles pour les grands nombres, par des additions ou des soustractions. Dans le même ordre d’idée, le baron John Napier (1550-1617) fait connaître en 1614 sa découverte des logarithmes.