Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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photogrammétrie (suite)

Historique

Les premières applications de la photogrammétrie furent réalisées en France par l’officier Aimé Laussedat (1819-1907), qui l’utilisa pour ses levés topographiques à partir de 1849, et en Allemagne par l’architecte Albrecht Meydenbauer (1834-1921), qui s’en servit dès 1858 pour établir des plans de monument, dénommant photogrammétrie la technique de levé de plan au moyen de photographies.

De 1870 à 1900, des levés par exploitation graphique de photographies terrestres furent exécutés en Italie, en Allemagne, en Autriche-Hongrie, en France et au Canada. Puis les premiers appareils précis apparurent : les stéréocomparateurs de Carl Pulfrich (1858-1927) [Allemagne] en 1901, de H. G. Fourcade (Afrique du Sud) en 1902, de V. Thomson (Grande-Bretagne) en 1907 ainsi que le stéréautographe de E. von Orel (Autriche) en 1908.

Pendant et surtout après la Première Guerre mondiale, les appareils de stéréorestitution devinrent nombreux : G. Kammerer (1913), M. Casser (1915), W. Bauersfeld (1912 et 1921) et R. Hugershoff (1920) en Allemagne, les frères A. et U. Nistri (1920) et Santoni (1921) en Italie, H. Wild (1921) en Suisse, Prédhumeau (1920), Pécresse (1921), Boucard (1924) et G. Poivilliers (1892-1968) [1923] en France conçurent différents appareils, dont certains, améliorés, sont encore en service.

Georges Poivilliers

Ingénieur français (Draché, Indre-et-Loire, 1892 - Neuilly-sur-Seine 1968). Topographe et photogrammètre, il inventa de nombreux appareils photogrammétriques : les stéréotopographes type A en 1921-1923 et type B en 1937, appareils de restitution stéréophotogrammétrique fondés sur les principes de reconstitution optique des faisceaux perspectifs et de matérialisation des rayons perspectifs par des règles qui sont leurs projections sur deux plans orthogonaux fixes, puis, en 1947, le stéréotopographe type D, à reconstitution mécanique des faisceaux perspectifs et à observation superficielle des clichés ; on lui doit aussi la création de photogoniomètres et de chambres de prise de vues aériennes, les premiers travaux de phototopographie aérienne au Service géographique de l’armée (levé du mont Pelvoux au 1/20 000 en 1928) ainsi que plusieurs travaux intéressant les diverses branches de la photogrammétrie : étude des mouvements des fluides, levés de monuments historiques (Sainte-Chapelle de Paris en 1944, Abou-Simbel en Nubie en 1955). Professeur de topographie à l’École centrale des arts et manufactures de 1937 à 1952, date à laquelle il fut nommé directeur de cette école, Poivilliers enseigna la photogrammétrie à l’École nationale des sciences géographiques et au Conservatoire national des arts et métiers. (Acad. des sc., 1946.)


Principe

Un cliché photographique est une section du faisceau perspectif F formé par les rayons issus de l’objet de surface Σ qui convergent au point de vue S, centre de l’objectif, situé à la distance Sc = f sur la normale au centre de la photographie (fig. 1) ; réciproquement, un cliché et l’objectif de la chambre photographique définissent un faisceau perspectif F. L’objet de surface Σ, photographié de deux points de vue S1 et S2 (S1S2 est la base B), peut se définir comme le lieu d’intersection des rayons homologues m1S1M et m2S2M des deux faisceaux F1 et F2 ; si l’on reconstitue ces deux faisceaux perspectifs et si l’on rétablit leurs positions relatives en s1 et en s2 (s1s2 est la base b), le lieu d’intersection des rayons homologues sera un « modèle » (réduit ou agrandi) semblable à l’objet photographié à une échelle sur lequel on pourra faire des mesures (fig. 2).


Mode opératoire

Les problèmes de la photogrammétrie sont donc successivement :
— la prise de vues photographiques ;
— la reconstitution des faisceaux perspectifs ;
— le rétablissement de l’orientation relative de ces faisceaux telle qu’elle était au moment de la prise des vues, qui détermine par intersection des rayons homologues le modèle ;
— la mise à l’échelle précise et l’orientation absolue bien définie de ce modèle ;
— la restitution photogrammétrique, matérialisée, soit par le dessin d’une ou de plusieurs projections planes, soit par la mesure des coordonnées des points de cette surface.


Prises de vues photographiques

On utilise le plus possible le « cas normal » de prise de vues en photogrammétrie aérienne et en photogrammétrie terrestre : les axes principaux des faisceaux sont normaux à la base et parallèles entre eux, leurs orientations sont mesurées avec des photothéodolites pour les stations terrestres, et sont rendues sensiblement verticales en photographie aérienne ; on obtient ainsi des photographies à la même échelle, d’examen stéréoscopique aisé et dont l’exploitation est facilitée dans les appareils de restitution.

Défini par l’intersection de deux faisceaux perspectifs, le modèle sera d’autant mieux déterminé que les rayons se couperont suivant un angle plus voisin de 90° ; ainsi, les chambres photographiques à grand champ (90°) et super-grand champ (120°) améliorent la précision de la restitution tout en augmentant la surface couverte par un seul cliché, facteur d’économie.


Reconstitution des faisceaux perspectifs

Pour pouvoir reconstituer un faisceau perspectif, il faut connaître ses caractéristiques avec précision et utiliser une chambre métrique photographique formée d’un cône rigide reliant un objectif de haute qualité à un support de cliché plan et stable, et dont on connaîtra la distance principale f, la distorsion de l’objectif (défaut de similitude du faisceau incident et du faisceau émergent), le centrage de l’objectif par rapport au centre du cliché, qui est défini par l’intersection de deux droites joignant quatre repères opposés.

Plusieurs procédés peuvent être employés :

• Dans la reconstitution optique, on replace le cliché (sur plaque) dans une chambre métrique de projection ayant les mêmes caractéristiques que la chambre photographique et l’on éclaire par derrière ; le faisceau perspectif émergent est identique au faisceau perspectif photographique ; c’est le principe de Porro-Koppe de la reconstitution optique d’un faisceau perspectif.