pénologie (suite)
L’efficacité de la peine
La peine tend pour une part à l’intimidation et à l’amendement. Son degré d’efficacité est révélé par le chiffre des récidives. Or, celui-ci varie selon la nature et surtout la durée de la première condamnation. Des statistiques de 1970, il ressort qu’on compte 46 p. 100 de non-récidivistes dans un délai de dix ans. On note aussi que le pourcentage des récidives varie selon la durée de la peine infligée : il n’est que de 17 p. 100 chez les condamnés à plus de cinq ans, passe à 36 p. 100 chez ceux qui sont punis de trois à cinq ans et monte à 53 p. 100 chez les individus qui n’ont connu qu’une incarcération de un à trois ans.
Autre indication statistique : la jeunesse des détenus ; en France, sur une population pénale évoluant annuellement autour de 34 000 personnes, on recense 50 p. 100 de punis âgés de moins de trente ans et 33 p. 100 de moins de vingt-cinq ans. On assiste cependant depuis soixante ans à une répression plus faible, due à une indulgence accrue des magistrats et des jurés, tandis qu’on utilise des peines d’emprisonnement inférieures à un an. « Le juge tenant compte de circonstances atténuantes applique une peine réduite qui généralement aggrave l’état de l’individu au lieu de l’améliorer » (J. Levasseur). Avec plus de raison et de succès, les tribunaux accordent largement le sursis (dans 41 p. 100 des cas) et ne sont amenés à le révoquer que dans 10 p. 100 des cas. Ils utilisent également, mais dans une proportion moindre (8 p. 100), la libération conditionnelle.
Avec les amnisties (par exemple à l’occasion de l’élection présidentielle), cette mesure contribue à diminuer la surpopulation des prisons : 28 000 détenus masculins pour moins de 26 000 places. Mais le système pénitentiaire et, plus encore, la répression judiciaire demandent des modifications profondes. L’une d’elles vient d’entrer en œuvre : l’élargissement des pouvoirs du juge de l’application des peines. Il faudrait maintenant moderniser le Code pénal pour y inclure des comportements antisociaux mal ou peu incriminés et sanctionnés (homicides consécutifs à la circulation, fraudes fiscales), y prévoir un traitement des anormaux mentaux, y introduire une nouvelle peine : le système des jours-amende (on rachète sa prison) et celui des jours-arrêts (on effectue sa peine les samedis et dimanches, ce qui évite la rupture des liens familiaux et professionnels). Ce dernier système, déjà utilisé en Belgique et en Allemagne, offre un second avantage : le coût beaucoup moins élevé de la journée pénitentiaire, qui s’est élevé à 24,55 F par jour en 1970 (frais d’entretien, frais de personnel et de fonctionnement inclus). Enfin se pose le problème financier des comités d’assistance postpénaux nécessaires pour éviter les rechutes dues au difficile reclassement des individus sortant de prison. Le garde des Sceaux a, en juin 1974, saisi le gouvernement d’un projet de réforme de la condition pénitentiaire, portant notamment la suppression de fait du casier* judiciaire, et la remise en cause des courtes peines de prison.
M. L. C.
➙ Prison.
J. Pinatel, Traité élémentaire de science pénitentiaire (Sirey, 1947). / L. Hugueney, H. Donnedieu de Vabres et M. Ancel, les Grands Systèmes pénitentiaires (Sirey, 1948). / R. Schmelck et G. Picca, Pénologie et droit pénitentiaire (Cujas, 1967). / G. Stéfani, G. Levasseur et R. Jambu-Merlin, Criminologie et science pénitentiaire (Dalloz, 1968 ; 3e éd., 1972). / J. Léauté, Criminologie et science pénitentiaire (P. U. F., 1972).
