Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

Paul (saint) (suite)

Peu après, Paul part pour la seconde mission, accompagné non plus de Barnabé, mais d’un ancien de Jérusalem, Silas. Ils passent par la Cilicie, Derbé et Lystres, où Paul s’adjoint Timothée, fils d’un Grec et d’une Juive, jeune homme d’une vingtaine d’années. De là, les trois hommes traversent la Phrygie, la Galatie, la Mysie et parviennent à Troas, d’où ils s’embarquent pour Samothrace et Philippes, en Macédoine. Il semble que ce soit à Thoas que Luc se joint aux missionnaires. Paul est assez mal reçu dans cette province : à Philippes, Silas et Paul sont battus de verges par les magistrats municipaux ; à Thessalonique, les Juifs suscitent contre eux une émeute. L’accueil est moins violent à Bérée, d’où Paul gagne la mer afin de s’embarquer pour Athènes. Là il prêche sur l’Agora, et des philosophes épicuriens et stoïciens le conduisent devant l’Aréopage, où il tient un discours qui choque les auditeurs lorsqu’il est question de la résurrection des morts : il obtient cependant quelques conversions, dont celle de Denys l’Aréopagite.

À Corinthe, où il se rend aussitôt après, Paul se lie avec un Juif, Aquila, et sa femme Priscilla, venus de Rome, d’où un édit de Claude vient de chasser les Juifs ; ils sont aussi fabricants de tentes, et Paul travaille avec eux tout en prêchant à la synagogue. Les Juifs le traînent devant le proconsul d’Achaïe, Gallion, ce qui situe le passage de Paul à Corinthe entre le printemps de 51 et celui de 52. Gallion renvoie les plaideurs, refusant de juger entre eux d’un litige de caractère religieux. Paul reste près de dix-huit mois à Corinthe avant de s’embarquer pour Éphèse ; de là, il navigue jusqu’à Césarée de Palestine, d’où il « monte » à Jérusalem avant de rentrer à Antioche.

Il a laissé à Corinthe Silas et Timothée. Il s’adjoint pour son troisième voyage Tite, un jeune païen converti. Il commence par parcourir les territoires des Galates et la Phrygie pour y affermir les Églises déjà fondées, puis il séjourne deux ans à Éphèse. Il fait tant de prosélytes que les orfèvres, qui vivaient de la vente aux pèlerins d’objets de piété dédiés à Artémis, suscitent une émeute dans la crainte de voir leur commerce décliner. Il doit quitter la ville, se rend en Macédoine, parcourt en bateau les îles de l’Égée, rentre à Césarée et revient à Jérusalem, où les Juifs soulèvent la populace contre lui, il ne doit son salut qu’à l’intervention du tribun militaire Lysias, qui, ayant su que Paul était citoyen romain, l’envoie à Césarée, au procurateur M. Antonius Felix, qui le retient captif deux ans. Les Juifs ne cessent de réclamer la mort de Paul, et Festus, successeur de Felix, accepte d’envoyer à Rome son prisonnier, qui en appelle à César.

Le voyage se fait par mer, en compagnie de Luc, par Chypre, et la Crète. Une tempête cause le naufrage du navire tout près de Malte, où les deux hommes restent trois mois avant de reprendre la mer. Au printemps, ils passent par Syracuse, restent sept jours à Pouzzoles, où des chrétiens viennent les visiter, et enfin arrivent à Rome, où, bien que captif, Paul loue un logement qu’il occupe avec le soldat chargé de le garder. Paul continue de prêcher les Juifs et les gentils, et demeure deux ans ainsi, sans qu’il passe en jugement.


La captivité romaine

On ignore exactement ce qu’il advint de Paul par la suite, car là se termine le récit des Actes. On date de 58-60 son séjour à Césarée et du printemps 61 son arrivée à Rome. Certains auteurs pensent qu’il a finalement subi le martyre en 64, lors de la persécution de Néron, rapportée par Tacite. D’autres soutiennent qu’il a été acquitté, mais on est désormais dans le domaine de l’hypothèse. Libéré, Paul se serait rendu en Espagne, puis serait revenu en Orient, à Éphèse, en Macédoine et en Grèce : ce serait au cours de ces ultimes pérégrinations qu’il aurait rédigé sa Première Épître à Timothée et son Épître à Tite. Après la persécution de Néron, il aurait été arrêté en tant qu’appartenant à une secte tenue désormais pour criminelle. Ramené à Rome, tenu dans une dure captivité, il aurait eu un long procès avant d’être décapité sur la voie d’Ostie, vers 67. Ce serait pendant cette seconde captivité romaine qu’il aurait écrit sa Seconde Épître à Timothée. Cette reconstitution est établie d’après les trois épîtres précitées, dites « pastorales », un passage de l’histoire ecclésiastique d’Eusèbe de Césarée et saint Jérôme ; de nombreux critiques se refusent à accepter cette hypothèse, malgré ses aspects séduisants, et préfèrent ne pas conclure.

Toute la doctrine de saint Paul — qu’on peut considérer comme le premier théologien —, fondée d’une part sur la foi et la charité, d’autre part sur le Christ, Dieu vivant et rédempteur, est développée dans ses Épîtres (v. Testament).

G. R.

➙ Bible / Christianisme / Testament (Ancien et Nouveau).

 A. Schweitzer, Die Mystik des Apostels Paulus (Tübingen, 1930 ; trad. fr. la Mystique de l’apôtre Paul, A. Michel, 1962). / E. B. Allo, Paul, apôtre de Jésus-Christ (Éd. du Cerf, 1942 ; nouv. éd., Éd. du Seuil, 1965). / W. D. Davies, Paul and Rabbinic Judaism (Londres, 1948). / M. Dibelius et W. G. Kümmel, Paulus (Berlin, 1951 ; 3e éd., 1964). / H. Metzger, les Routes de saint Paul dans l’Orient grec (Delachaux et Niestlé, 1954 ; 2e éd., 1958). / H. J. Shoeps, Paulus (Tübingen, 1959). / J. Steinmann, Saint Paul (Libr. associés, 1961). / B. Rigaux, Saint Paul et ses lettres. État de la question (Desclée De Brouwer, 1963). / E. Dhorme, Saint Paul (A. Michel, 1965). / L. Cerfaux, l’Itinéraire spirituel de saint Paul (Éd. du Cerf, 1966). / N. Hugédé, Saint Paul et la culture grecque (Labor et Fides, Genève, 1966). / G. Bornkamm, Paulus (Stuttgart, 1970 ; trad. fr. Paul, apôtre de Jésus-Christ, Labor et Fides, Genève, 1971). / J. Paillard, Règlements de comptes avec saint Paul (Éd. du Cerf, 1969). / J. Colson, Paul, apôtre martyr (Éd. du Seuil, 1971). / E. Gillabert, Saint Paul ou le Colosse aux pieds d’argile (Éd. Metanoia, 1974).