Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Paris (suite)

C’est surtout en matière de ravitaillement en eau potable que la capitale laissait à désirer. Les fontaines étaient approvisionnées par la Seine grâce aux pompes, la « Samaritaine » au Pont-Neuf, la « Notre-Dame », actionnées par des roues de moulin, et la toute récente pompe à feu des frères J. et A. Périer à Chaillot. Non seulement ces fontaines étaient souvent à sec, mais l’eau du fleuve était corrompue par le déversement des fosses d’aisance et des égouts. Dès 1802, on entreprend la construction d’un canal de dérivation pour amener à Paris les eaux de l’Ourcq, qui seront recueillies dans un bassin à La Villette. Les principaux quartiers de Paris sont desservis par des conduites reliées à l’aqueduc Monceau-Villette. De nouvelles fontaines sont édifiées, dont l’inspiration sacrifie à l’égyptomanie du temps : le « Fellah », rue de Sèvres, et le « Palmier » au Châtelet.


L’administration municipale sous l’Empire

La loi du 28 pluviôse an VIII (17 fév. 1800) crée pour Paris un régime particulier, inspiré par le souci de soumettre étroitement la ville au pouvoir. Le préfet de la Seine, maire de Paris et administrateur du département, décide et contrôle. Un conseil général de 24 membres fait office de conseil municipal. Le département comprend trois arrondissements communaux : Paris, Saint-Denis et Sceaux. Si la capitale conserve le découpage inauguré après Thermidor — on substitue simplement le nom de quartier à celui de section en 1810 —, les maires de Paris, un par arrondissement, ne disposent guère de plus d’autorité réelle que les anciens administrateurs d’arrondissement du Directoire. Grands notables du commerce et de l’industrie comme Benjamin Delessert ou aristocrates comme le duc Albert de Luynes, maire du IXe, n’ont qu’une charge honorifique. D’ailleurs, progressivement, l’Empereur dépouille les institutions de tout pouvoir. Le conseil général se voit enlever l’examen du budget, la Ville perd la direction de l’octroi et des travaux. Divisant pour régner, Napoléon fractionne les attributions et multiplie à dessein les conflits de compétence. Une âpre rivalité oppose le préfet civil et le préfet de police, qui se partagent les juridictions des Halles, des marchés et de la voirie. Il faut porter à l’actif du régime le choix de hauts fonctionnaires compétents et efficaces, placés à la tête des deux grandes administrations : Frochot à la préfecture de la Seine, Dubois à la police.


L’urbanisme révolutionnaire et impérial

Les bouleversements sociaux et politiques n’ont guère modifié l’aspect de Paris, qui, en 1815, conserve encore les traits essentiels qu’il avait à la fin du siècle précédent. Des préoccupations en matière d’urbanisme et d’architecture était née, sous la Convention, la Commission des artistes. Chargée de l’aménagement des terrains des communautés religieuses sécularisées, la Commission (notamment E. Verniquet, directeur de la voirie, et les architectes J. Chalgrin et A. Brongniart) conçut un vaste projet qui devait inspirer la plupart des travaux du xixe s., à commencer par ceux d’Haussmann. Paris souffrait d’un mal chronique, l’insuffisance des communications, qui ralentissait l’activité économique, isolait les quartiers, freinait le développement. C’est pourquoi la Commission des artistes projeta, parallèlement aux lotissements (Temple, Arsenal) et à la construction de quais, toute une série de percées qui ne seront réalisées que bien plus tard : une voie en ligne droite de la barrière du Trône à l’Étoile ; une rue perpendiculaire aux rues Saint-Denis et Saint-Martin et destinée à joindre le Marais à Saint-Eustache et à débloquer les Halles (future rue Rambuteau) ; une percée au travers du quartier de l’Hôtel de Ville et destinée à débloquer la circulation très active de la rue Saint-Antoine aux ports, de Saint-Paul à la Grève et aux îles.

Sur la rive gauche, autour de vastes places en étoile, de l’Observatoire à Saint-Victor, étaient dessinés des axes de pénétration à travers les faubourgs Saint-Jacques et Saint-Marcel. C’est seulement dans ces derniers quartiers que fut entrepris, à partir du Directoire, l’aménagement des terrains compris entre le Luxembourg, le Val-de-Grâce et l’Observatoire. Dès 1798, on ouvre la rue de l’Ouest (rue d’Assas) et de l’Est (nord du futur boulevard Saint-Michel). La Chaussée-d’Antin connaît ses premières tentatives de lotissement. L’absence de ressources financières devait empêcher la refonte du réseau des voies. Avec l’instauration de l’Empire, tout militait en faveur d’une reprise des grands travaux, arrêtés depuis la fin de l’Ancien Régime. Pendant la période de prospérité qui s’achève vers 1810, les soucis édilitaires l’emportent.

Dès le Consulat, on entreprend de dégager les ponts. Le Grand Châtelet est détruit, libérant le Pont-au-Change, et le pont Saint-Michel perd ses pittoresques maisons. L’enclos du Temple est rasé. Sur la rive gauche, l’avenue de l’Observatoire, la rue d’Ulm, la rue Clovis, la rue des Ursulines, des Feuillantines sont ouvertes dans les terrains des anciennes communautés religieuses. Il s’agit aussi de rendre plus aisé l’accès des palais où siègent les organes du gouvernement. La rue de Tournon est percée jusqu’à la rue de Seine, ce qui aère le Sénat, alors bloqué par l’étroite rue de Vaugirard. Un effort particulier va être entrepris au Louvre et aux Tuileries. Certains travaux répondaient à des soucis de sécurité évidents : l’attentat de la rue Saint-Nicaise avait attiré l’attention sur l’incroyable enchevêtrement de ruelles obscures et mal famées qui s’enfonçaient alors presque au cœur du palais, rues du Doyenné, Matignon, Fromenteau, et qui disparurent totalement ou partiellement pour permettre l’aménagement de la place du Carrousel et la réunion des deux palais. Bonaparte entame dès 1806 le percement de la rue de Rivoli, premier tronçon de l’axe ouest-est prévu par le plan des Artistes, et des voies contiguës (rues de la Paix, de Castiglione, de Mondovi), destinées à attirer les classes aisées dans les nouveaux quartiers de l’ouest.