Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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parasitisme (suite)

En général, cependant, on observe plutôt une spécificité relative, c’est-à-dire qu’un groupe donné de parasites se rencontre chez un groupe déterminé d’hôtes. C’est ainsi que certaines familles de Trématodes ne se trouvent que chez certains Poissons. Il en est de même pour les Cestodes des Oiseaux et chez certains Arthropodes ectoparasites (citons les Nyctéribies, Diptères exclusifs des Chauves-Souris). Certains parasites, enfin, n’ont qu’une spécificité réduite ou inexistante, infestant des hôtes très éloignés dans la classification zoologique. C’est le cas de la Douve du foie, qui se rencontre indifféremment chez l’Homme, le Mouton, les Bovins, le Porc, l’Éléphant, divers Rongeurs.

Dans la notion de spécificité stricte intervient souvent celle d’ancienneté dans l’association hôte-parasite. La spécificité est qualifiée alors de phylogénique (on parle aussi de parasites primaires). Au contraire, lorsqu’il s’agit d’une spécificité relative ou inexistante, on parle de spécificité écologique ou éthologique (les hôtes s’infestant parce qu’ils ont le même mode de vie) et de parasites secondaires.

Ces notions très importantes ont été développées avec de nombreux exemples à l’appui, tant chez les Invertébrés que chez les Vertébrés, par divers auteurs, tels que J. G. Baer, A. Chabaud, L. Léger et O. Duboscq.

Parfois, des parasites primaires ont permis de préciser la position systématique de leur hôte. C’est ainsi que les Mallophages du Flamant ont fait placer cet Oiseau dans les Ansériformes, au voisinage des Canards. Les facteurs de la spécificité dépendent, d’une part, du parasite et de son mode d’infestation de l’hôte, et, d’autre part, de l’hôte lui-même.

Les tropismes des stades infestants du parasite à l’égard de l’hôte jouent un rôle important. Dans le cas des Trématodes évoluant chez des Mollusques pulmonés ou de certains Copépodes d’Invertébrés, le chimiotropisme (attraction par des substances chimiques de l’hôte) intervient. Dans d’autres cas (Nématodes, Insectes ectoparasites), c’est le thermotropisme ou le phototropisme (attraction par la chaleur ou la lumière) qui entrent en ligne de compte.

Parmi les facteurs dépendant de l’hôte, il faut notamment mentionner la possibilité, pour les œufs ou les spores ingérés (dans le cas d’une infestation par voie digestive), d’éclore dans son tube digestif, car les germes infestants passent intacts dans celui d’hôtes inhabituels et sont évacués avec leurs excréments.

La résistance des parasites aux sucs digestifs de l’hôte et à son système réticulo-endothélial intervient également.

On peut dire que, d’une façon générale, la spécificité résulte d’une adaptation plus ou moins parfaite du parasite à son hôte.


Parasitisme et évolution

Les relations entre le parasitisme et l’évolution sont de plusieurs sortes.

Il faut tout d’abord considérer l’ancienneté du phénomène, attestée par l’existence de parasites fossiles (Mollusques, Nématodes, Insectes, etc.).

On peut ensuite s’interroger sur l’origine du parasitisme : pour les ectoparasites, on admet en général qu’il s’agit de formes libres commensales dont la fixation sur l’hôte est devenue permanente ou semi-permanente ; pour les endoparasites, une explication est plus difficile : si l’on admet qu’il s’agit d’espèces libres accidentellement avalées par un hôte auquel elles se seraient adaptées, il faudrait faire intervenir la notion de préadaptation, c’est-à-dire l’existence, chez une espèce donnée, de particularités (morphologiques ou biologiques) lui facilitant un mode de vie particulier.

Le passage de la vie libre à la vie parasitaire est naturellement plus facile à concevoir dans les groupes zoologiques où l’on rencontre simultanément des espèces libres et des espèces parasites. C’est le cas des Protozoaires, des Nématodes, des Mollusques, des Crustacés, des Insectes. Dans le cas de parasites adultes de Vertébrés se développant chez les Invertébrés, il est difficile de savoir s’il s’agit de parasites de ces derniers secondairement adaptés aux premiers ou vice versa. Tel est le cas des Plasmodium et des Trypanosoma.

Chez les Crustacés (Copépodes, Cirripèdes), le rattachement à cette classe des formes parasites, souvent très modifiées morphologiquement, a pu se faire grâce à leurs stades larvaires (Nauplius, Cypris).

Dans les groupes exclusivement parasites, il est parfois difficile d’établir quels sont les plus primitifs et les plus évolués. Ainsi, chez les Cestodes, selon certains auteurs, les plus primitifs seraient les Tétraphyllides, alors que, pour d’autres, ce seraient les Pseudophyllides.

Nous avons vu précédemment que, dans certains cas, l’association hôte-parasite est ancienne (notions de parasitisme primaire et de spécificité phylogénique).

On a tenté d’établir des lois régissant les rapports entre les parasites et la phylogénie de leurs hôtes : suivant la loi de Fahrenholz, les ancêtres des parasites actuels devaient être hébergés par ceux des hôtes actuels, tandis que, selon la loi de Szidat, plus un groupe d’hôtes est spécialisé, plus ses parasites le sont aussi. Enfin, la loi d’Eichler implique qu’un groupe d’hôtes ayant un grand nombre d’espèces aura davantage de parasites qu’un groupe équivalent n’ayant que peu de représentants.

Ces diverses considérations montrent tout l’intérêt que suscite le parasitisme envisagé sous l’angle évolutif et à quel point ce phénomène biologique constitue une excellente illustration des théories évolutionnistes.

J. T.

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