Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

pancréas (suite)

Physiologie


La fonction endocrine

La fonction endocrine du pancréas ne sera pas reprise en détail ici (v. diabète, insuline).

L’insuline étant la seule hormone hypoglycémiante de l’organisme, la pancréatectomie (ablation du pancréas) entraîne toujours un diabète sucré. De même, l’intoxication par l’alloxane, substance détruisant électivement des cellules bêta, entraîne, aussi, un diabète ; celui-ci est plus grave que le précédent du fait de la persistance ici de la sécrétion de glucagon. Cette hormone, en effet, favorise la glycogénolyse hépatique et la néoglucogenèse à partir des protides.


La fonction exocrine

La fonction exocrine du pancréas a un rôle fondamental dans la digestion*. Claude Bernard* l’avait déjà bien mis en évidence en 1856. Le suc pancréatique, élaboré par les glandes acineuses, collecté par les canalicules puis drainé par le canal de Wirsung jusqu’à la papille au bord interne du deuxième duodénum, est un liquide aqueux, incolore, inodore dont le volume quotidien est habituellement compris entre 1 000 et 1 500 ml. Il est constitué d’une part d’eau et d’électrolytes, au premier rang desquels se placent les bicarbonates, dont l’abondance explique l’alcalinité de ce suc (pH = 7,6 à 8,2), favorable à l’activité de ses propres enzymes, mais qui sont aussi représentés par du sodium, du potassium, quelques phosphates et du calcium ; d’autre part d’enzymes formant la fraction protidique du suc. Fait important, la richesse du suc en bicarbonates et en enzymes est variable et dépend beaucoup du stimulus entraînant l’activité de la glande. Toutes les enzymes pancréatiques ont, dans la cellule, un mode de formation analogue : ce sont les ribosomes du réticulum endoplasmique qui en amorcent la synthèse. Le produit forme ensuite des vacuoles qui semblent suivre l’appareil de Golgi en migrant vers le pôle apical de la cellule, où elles constitueront les granules de zymogène. En phase de repos, les granules sont abondants. En période de stimulation, ils disparaissent ; mais il semble que les enzymes puissent continuer à être formées et déversées sans que le passage par le stade de granules soit nécessaire. L’activité des cellules en période de production est considérable. Les isotopes permettent de montrer que la vitesse de formation de ces enzymes est de l’ordre de une heure.


Les enzymes pancréatiques

Elles sont en grand nombre :

• L’amylase. C’est une enzyme stable, active d’emblée, agissant à pH = 6,9 et destinée à hydrolyser amidon et glycogène ; elle produit ainsi du maltose et un peu de glucose.

• La lipase. Elle est également sécrétée sous forme active d’emblée et agit entre pH 7 et 9. Elle hydrolyse de façon incomplète les triglycérides en acides gras, monoglycérides, diglycérides et glycérol. Pour ce faire, elle doit rencontrer dans le duodénum et le haut jéjunum des graisses émulsionnées par les sels biliaires sous forme de micelles.

• Les enzymes agissant sur les protides. Les plus importantes sont la trypsine et la chymotrypsine. Contrairement aux précédentes, ces enzymes sont sécrétées sous une forme inactive : le trypsinogène et le chymotrypsinogène, de P. M. # 24 000. C’est d’abord l’entérokinase formée par la muqueuse intestinale, puis les premières quantités de trypsine formées qui activent le trypsinogène en trypsine : cette activation ne se faisant qu’à l’extérieur de la glande, celle-ci se trouve protégée contre sa propre digestion ; bien plus, le suc pancréatique contient un inhibiteur de la trypsine (inhibiteur de Kunitz) qui renforce encore la protection. Ces enzymes sont des endopeptidases qui agissent entre pH 8 et 9. La trypsine a un tropisme pour l’arginine et la lysine. La chymotrypsine attaque les liaisons intéressant un acide aminé aromatique.

• Les autres enzymes. Elles ne sont pas encore toutes dénombrées. On soupçonne, vis-à-vis des sucres, une maltase et une lactase, mais les preuves de leur existence ne sont pas formelles. Il existe pour les lipides une lécithinase, et pour les protides de nombreuses enzymes plus ou moins spécifiques : carboxypeptidase, ribonucléase, désoxyribonucléase, élastase...


Régulation de la sécrétion pancréatique

Elle se fait par deux mécanismes différents, l’un nerveux, l’autre humoral. En temps normal, les deux agissent en surimpression. Chez le sujet à jeun, le débit de suc pancréatique est infime. Le repas met en jeu les stimuli de la glande : le facteur nerveux emprunte le nerf pneumogastrique et paraît être l’excitant du début du repas ; sous cette influence, le suc sécrété est riche en enzymes, mais peu hydraté et pauvre en bicarbonates. Le facteur humoral intervient un peu plus tard lorsque le contenu gastrique commence à passer dans le duodénum. Deux hormones ont un rôle majeur : la sécrétine (découverte dès 1902 par W. M. Bayliss et E. H. Starling, P. M. # 5 000) peut être extraite de la muqueuse duodéno-jéjunale. Le duodénum en contient, puis la richesse en sécrétine du tube digestif décroît rapidement quand on s’éloigne du pylore. C’est l’acidité du contenu gastrique arrivant dans le duodénum qui en déclenche la sécrétion. Cette hormone fait sécréter par le pancréas un suc riche en eau et en bicarbonates (qui vont contribuer à neutraliser l’acidité du chyme), mais pauvre en enzymes. La pancréozymine a un P. M. voisin de 5 000. Elle est proche (voire identique ?) de la cholécystokinine. Elle est sécrétée par la portion initiale de l’intestin grêle. Son site cellulaire est également inconnu. C’est la richesse du chyme en peptones qui en stimule la sécrétion. Elle entraîne l’issue d’un suc pancréatique riche en enzymes, mais influence peu le volume sécrété.

D’autres hormones intestinales interviennent peut-être. La gastrine serait capable d’accroître la sécrétion pancréatique dans son ensemble.


Pathologie

Le pancréas est un organe qui n’a que peu de symptômes pour se manifester : presque toujours les affections le touchant ne se traduiront que par des signes d’emprunt : telle affection de la tête du pancréas retentira sur la voie biliaire (v. bile) et entraînera un ictère*. Telle affection du corps aura un retentissement sur les plexus nerveux péri-aortiques et sera responsable de douleurs abdominales. Telle affection de la queue, enfin, pourra déformer la glande et la rendre palpable, ou encore altérer les vaisseaux de la rate* et être à l’origine d’une splénomégalie. Ce sont donc habituellement des signes indirects qui amèneront à découvrir une maladie pancréatique.