Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
O

Ottomans (suite)

Une campagne menée dans la région du Caucase se termine par une sévère défaite. L’offensive russe de mai 1915 se traduit par la chute d’Erzurum, de Trébizonde, de Van, de Bitlis. Une expédition turque contre le canal de Suez échoue de peu (janv. 1915). De farouches combats se déroulent aux Dardanelles, où Français et Anglais ont débarqué (mars-août 1915). En Iraq*, les Britanniques ont occupé Bassora dès novembre 1914. Ils essaient de remonter le long du Tigre, mais le général Townshend est enfermé dans Kūt al-‘Amarā, où il capitule (28 avr. 1916). Cependant, ils peuvent reprendre l’offensive et s’emparer de Bagdad (mars 1917). En Syrie et en Palestine, la révolte des Bédouins et l’avance britannique se heurtent jusqu’au début de 1918 à une solide résistance.

La révolution soviétique a dégagé le front russe (armistice du 15 déc. 1917). Mais la capitulation de la Bulgarie entraîne celle de la Turquie : un armistice est signé à Moudros (30 oct. 1918). Le traité de Sèvres subséquent consacre la dissolution de l’Empire ottoman (août 1920). La Thrace doit être cédée à la Grèce ; les pays arabes du Proche-Orient seront placés sous mandats français et anglais ; la Cilicie, les régions de l’Égée, l’Arménie, le Kurdistān, Istanbul même sont menacés. Tandis qu’en Anatolie s’organise la Révolution nationale et la résistance autour de Mustafa* Kemal Atatürk, Mehmed VI (1918-1922) fait figure de prisonnier dans Istanbul occupée.

Le 1er novembre 1922, le gouvernement insurrectionnel déclare : « 1. L’Empire ottoman fondé sur l’autocratie est renversé... 6. Le gouvernement turc libérera le califat prisonnier des étrangers. » Le 17 novembre au matin, le Sultan se réfugie à bord d’un bâtiment de guerre britannique. La Grande Assemblée nationale turque proclame calife Abdülmecid II. Moins de seize mois plus tard (mars 1924), elle décrétera l’abolition du califat.

Quittant pour toujours le pays où ses ancêtres avaient fait le meilleur et le pire, Abdülmecid passe devant l’armée et dit seulement : « Au revoir, soldats ! »

J.-P. R.

➙ Albanie / Algérie / Autriche / Balkans / Bosnie-Herzégovine / Bulgarie / Byzantin (Empire) / Égypte / Grèce / Hongrie / Iraq / Ispahan / Libye / Palestine / Roumanie / Russie / Seldjoukides / Serbie / Syrie / Turcs / Turquie.

 J. von Hammer-Purgstall, Geschichte des osmanischen Reiches (Pest, 1827-1835, 10 vol. ; trad. fr. Histoire de l’Empire ottoman depuis son origine jusqu’à nos jours, Bellizard et Cie, 1835-1843, 18 vol.). / A. de La Jonquière, Histoire de l’Empire ottoman (Hachette, 1881 ; nouv. éd., 1914 ; 2 vol.). / E. Driault, la Question d’Orient depuis son origine jusqu’à la paix de Sèvres (Alcan, 1898 ; nouv. éd., 1921). / F. Babinger, Suleyman (Stuttgart, 1922 ; 2 vol.) ; Mehmed der Eroberer und seine Zeit (Munich, 1953 ; trad. fr. Mahomet II le Conquérant et son temps, Payot, 1954). / L. Lamouche, Histoire de la Turquie depuis les origines jusqu’à nos jours (Payot, 1934 ; nouv. éd., 1953). / M. F. Köprülü, les Origines de l’Empire ottoman (Payot, 1935). / N. M. Penzer, The Harem (Londres, 1936). / A. S. Atiya, The Crusade in the Later Middle Ages (New York, 1938). / P. Wittek, The Rise of The Ottoman Empire (Londres, 1938). / R. Mantran, Histoire de la Turquie (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1952 ; 3e éd., 1968) ; Istanbul dans la seconde moitié du xviie siècle (Maisonneuve, 1963). / J.-P. Roux, la Turquie (Payot, 1953). / J. P. Garnier, la Fin de l’Empire ottoman (Plon, 1973).

Otton Ier le Grand

(912 - Memleben 973), premier empereur du Saint Empire (962-973), roi de Germanie (936-973) et d’Italie (951-973).



Le roi de Germanie (936)

Avant sa mort, Henri Ier l’Oiseleur désigne son fils Otton comme successeur sur le trône de Germanie. Cependant, une élection générale, qui sera suivie du sacre, est prévue à Aix-la-Chapelle : c’est ainsi que, le 7 août 936, Otton devient légalement roi du royaume « des Francs et des Saxons ». Ainsi est renouée la tradition carolingienne.

Le but premier d’Otton est de se rendre maître chez lui, en Allemagne. Il lui faut pour cela soumettre les grands duchés nationaux. C’est assez difficilement, et après une seconde tentative (938), qu’il obtiendra la subordination complète de la Bavière. Presque aussitôt, il doit libérer la Saxe des rebelles soulevés à l’appel de son frère Henri et du duc de Lorraine Giselbert. Otton doit ensuite mettre le siège devant Brisach pour réduire la Lorraine, tandis que le duc de Saxe, en battant Giselbert, place la Franconie sous l’autorité directe du roi de Germanie.

Quant à Henri, frère d’Otton, il se résout à la soumission à la Noël 941. Ayant hérité de vastes territoires s’étendant à l’est de l’Elbe, le roi, qui songe à développer une mission en pays slave, fonde et dote le monastère Saint-Maurice à Magdeburg (937) ; afin de fortifier la frontière de ce côté, il crée, le long de l’Elbe, deux grandes marches : celle de l’Elbe inférieure, qu’il confie au Saxon Hermann Billung, celle de l’Elbe moyenne et de la Saale, qu’il confie au comte Géron. L’action de ces deux margraves est assez efficace pour que le synode d’Ingelheim (948) décide de la création des évêchés de Schleswig, Ripen (auj. Ribe), Aarhus, Oldenburg, Havelberg et Brandebourg. En 950, Boleslav de Bohême reconnaît la suzeraineté d’Otton.

Ayant d’autre part assuré sa frontière occidentale en faisant de Conrad le Roux un « duc fonctionnaire » de Lorraine, Otton — qui vise à la fois la souveraineté sur la Lombardie et sur Rome — se tourne vers l’Italie. Comme Charlemagne, il veut s’imposer comme l’arbitre de la chrétienté et songe à la restauration, à son profit, de la dignité impériale.

Poussant ses avantages par personne interposée, le roi de Germanie soutient contre le roi d’Italie Hugues, le marquis d’Ivrée Bérenger II ; en 945, Hugues abdique en faveur de son fils Lothaire, qui meurt en 950, laissant le trône à Bérenger. Contre celui-ci, les Lombards font alors appel à Otton, qui descend en Italie, prend à Pavie la couronne lombarde (23 sept. 951) et épouse en secondes noces Adélaïde, veuve de Lothaire. Otton donne les marches de Vérone et d’Aquilée à son frère Henri de Bavière. Ce geste provoque d’ailleurs la révolte du fils d’Otton, Liudolf, qui entraîne avec lui l’archevêque Frédéric de Mayence et Conrad le Roux. Otton perd la Franconie, la Bavière et la Souabe ; par contre, le nouveau duc de Lorraine, l’archevêque de Cologne Bruno, frère du roi, prend parti pour Otton.