Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
O

Ōsaka (suite)

Pour les industries lourdes (métallurgie et pétrochimie), le problème des terrains industriels se confond largement avec l’extension du port. La faiblesse des fonds de la baie d’Ōsaka de part et d’autre de l’embouchure de la Yodo a gêné considérablement l’essor industriel, et le port en eau profonde de Kōbe a été largement créé et développé en fonction des besoins d’Ōsaka. Les embarcations de faible tirant d’eau pouvaient, par contre, grâce aux nombreux canaux, remonter fort avant dans l’agglomération, ce qui explique l’imbrication profonde des quartiers manufacturiers et résidentiels de celle-ci. Lorsque, au lendemain de la guerre de Corée, le Japon amorça son boom industriel, le manque de terrains industriels et de fonds susceptibles d’accueillir tankers et minéraliers se fit sentir simultanément, et d’immenses chantiers de poldérisation furent ouverts (notamment au sud à Sakai), portant sur un total de 2 100 ha, dont un millier est actuellement asséché et occupé. La profondeur au droit de ces atterrissements varie de 12 à 17 m, ce qui permet aux plus gros cargos d’accéder à quai directement, notamment aux minéraliers dont le contenu passe directement dans les installations métallurgiques. Le port actuel d’Ōsaka est une création entièrement artificielle. Deux môles convergents s’avançant au large de 3 km environ le délimitent ; les fonds n’y excèdent pas 9 m, ce qui en limite l’accès aux cargos moyens (de 10 000 à 12 000 t). Sur une longueur de quais de 10 000 m, des navires dont le tonnage total excède 30 Mt accostent chaque année ; une part de leur contenu passe dans des chalands et continue par les canaux jusqu’aux usines. Le reste du trafic et les navires de gros tonnages intéressent les polders évoqués plus haut. L’ensemble (avec Sakai et Amagasaki) a connu, en 1971, un trafic de 149 Mt.

Le commerce consiste surtout en importations (80 p. 100 env.), reflétant la nature de la ville et de sa région : avant tout un atelier transformant des matières premières reçues de l’extérieur en articles consommés sur place ou acheminés vers le reste du pays en grande partie par voie ferrée. Le commerce extérieur n’est que le tiers du trafic intérieur. Dans les entrées dominent la houille, le pétrole, le minerai de fer et le ciment. De l’étranger, Ōsaka reçoit encore du fer et du coke, des phosphates et des engrais, du bois en grumes, du coton. Le tiers des importations vient des États-Unis ; plus de la moitié des exportations se dirige vers l’Asie du Sud-Est.


Le paysage urbain

La guerre a détruit presque systématiquement la ville, où il ne demeurait en 1945 que 1 million de personnes. La reconstruction s’est opérée avec le souci de prévoir de grands axes de circulation à travers l’agglomération et autour d’elle. Ces aménagements se sont poursuivis sur deux plans : remodelage du centre, extension aux dépens des collines d’un côté (à caractère résidentiel), de la mer de l’autre (fonctions manufacturière et portuaire). Un réseau complet de voies de communication a été établi à trois niveaux (comme à Tōkyō), larges avenues, autoroutes courant à 15 à 20 m au-dessus du sol, métropolitain, qui, depuis la guerre a été étendu jusqu’en banlieue. L’Exposition universelle de 1970 a donné à tous ces chantiers un « coup de fouet » salutaire. L’opération la plus spectaculaire est sans doute l’autoroute qui traverse le centre de la ville et n’est en fait que le toit d’un vaste ensemble commercial recouvrant lui-même un parking souterrain.

La construction de la nouvelle voie ferrée rapide du Shinkansen, qui doit unir Tōkyō à Fukuoka et qui atteint à la fin 1972 Okayama, à 150 km à l’ouest d’Ōsaka, a créé un nouveau pôle d’urbanisation autour de la nouvelle gare de Shin-Ōsaka, au nord de l’ancienne gare centrale. Celle-ci n’en demeure pas moins un des deux centres de la ville, entourée de grands hôtels, grands magasins et recouvrant un réseau de galeries marchandes souterraines. L’autre pôle commercial d’Ōsaka se trouve au sud, autour du quartier de Shinsaibashi ; ici aussi, de part et d’autre d’une galerie marchande couverte, longue de près de 1 km, grands magasins, cinémas, théâtres, restaurants garnissent les rues les plus animées de la ville. Unissant ces deux centres, la grande avenue de Midōsuji est bordée des établissements de crédit, bureaux et sièges sociaux.

Ce paysage urbain est d’une étonnante mobilité, de vieux quartiers disparaissent constamment pour faire place à des constructions de plus en plus hardies, ainsi le grand Marché central, élevé en 1970, haut de 22 étages et qui groupe sur 130 000 m2 de plancher quelque 230 grossistes en textile.

Ōsaka est reliée aux autres pôles de la conurbation, Kyōto et Kōbe, par voies ferrées. Ce réseau toutefois demeure insuffisant, et les agrandissements actuels du métropolitain doivent le compléter. La ville compte chaque année 200 000 habitants de plus, et, pour les loger, de vastes ensembles résidentiels sont établis dans la zone des collines qui sépare la plaine côtière du bassin de Nara ainsi que vers Takarazuka et Kyōto au nord-est. Cette croissance se fait de façon inégale, et de longues années d’incurie font que la ville souffre de nuisances à un degré sans doute unique au Japon et peut-être au monde. La pollution atmosphérique a atteint la cote d’alarme, et des sommes considérables seront nécessaires pour financer la politique d’épuration prévue. La subsidence, maladie des grandes villes littorales japonaises, sévit : des affaissements de 2 à 5 cm par an s’observent, occasionnés par les pompages excessifs effectués lors du creusement des fondations des grands immeubles et détruisant l’équilibre physique du sol. Pour maintenir, au moins à la périphérie, une tranche de nature encore saine, une grande campagne de reboisement a été entreprise. Ōsaka paie le prix de sa richesse. Capitale économique du Japon occidental, son « poids » démographique et économique équivaut approximativement aux deux tiers de celui de Tōkyō. Une rivalité certaine l’oppose à la capitale. Juxtaposant l’ultramoderne avec maint archaïsme, à la fois opulente et polluée, Osaka incarne, plus encore que Tōkyō, les forces et les faiblesses du Japon actuel.

J. P.-M.

➙ Honshū.