Apollon

Apollon conduisant ses troupeaux.
Apollon conduisant ses troupeaux.

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de mythologie grecque et romaine ».

Dieu de la beauté, de la lumière et des arts.

Cette lyre, cet arc, ce filet sont consacrés à Apollon par Sosis, Philé et Polycrate. L'archer lui a offert son arc de corne, la citharède son luth, et le chasseur son filet. Que l'un obtienne la palme au tir de l'arc ; l'autre le prix de la lyre, et le troisième les prémices de la chasse.

Fils de Zeus et de Léto, frère jumeau d'Artémis, Apollon naît sur l'île flottante d'Ortygie ; sa mère est venue s'y réfugier pour échapper à la jalousie d'Héra. Celle-ci, du reste, fait tout pour empêcher sa naissance : elle retient prisonnière Ilithyie, la déesse des accouchements. Mais Iris, la messagère des dieux, réussit à déjouer ses sombres projets et mène Ilithyie à Ortygie qui, dès la venue au monde de l'enfant, se stabilise et prend le nom de Délos, la « Resplendissante ». Apollon devient Apollon Délien. Selon une autre version, Iris est, avec Arès, l'alliée d'Héra.

Voir aussi : Délos, Astérie (Variante 1)

Dès ses premiers mots, Apollon fixe ses attributs et sa fonction de devin : il réclame sa lyre et son arc, ajoutant que ses oracles dévoileront même les desseins infaillibles de Zeus.

Élevé au nectar et à l'ambroisie par Thémis, Apollon grandit en quatre jours. Il en impose tellement que son arrivée dans l'Olympe fait trembler tous les dieux. Son père lui offre une mitre d'or, une lyre et un char tiré par deux puissants cygnes, sur lequel, armé d'un arc et de flèches, il gagne la lointaine région des Hyperboréens, au-delà du pays des Scythes ; ce voyage, le dieu l'effectue régulièrement par la suite, une fois l'an, à l'automne. Les Hyperboréens forment un peuple heureux qui passe le plus clair de son temps à chanter ses louanges.

Voir aussi : Hyperboréens

Apollon se rend ensuite à Delphes, ville non loin de laquelle il affronte le serpent Python envoyé par la rancunière Héra. Après une première tentative manquée, Apollon transperce le monstre de ses flèches, dans la vallée de Crisa, sur les pentes du mont Parnasse. Puis, parce que Zeus a foudroyé Asclépios, le fils qu'il a eu de la nymphe Coronis, Apollon anéantit les Cyclopes qui ont forgé la foudre. Pour cette audace, Zeus songe à expédier Apollon dans le Tartare, mais, sur les prières de Léto, il se contente de le chasser de l'Olympe pour une « grande » année durant laquelle il se met au service d'un mortel.

Il va donc à Phères, en Thessalie ; afin d'être purifié de ses crimes, il sert le roi Admète durant neuf ans. Voilà sans doute pourquoi Apollon est considéré comme une divinité protégeant les brebis, et le bétail en général, ainsi que les pâturages ; et c'est peut-être également de cette période que lui vient l'épithète de Lycien, parce qu'il protège les troupeaux des loups. Pendant son séjour auprès du roi, il institue les jeux Pythiques, qui consacrent sa victoire sur le serpent Python ; il est ainsi Apollon Pythien.

Voir aussi : Jeux Pythiques, Admète

À l'instar du Soleil (d'où l'épithète Phœbos, « Brillant »), Apollon a pouvoir de vie et de mort sur la végétation et, plus largement, sur les êtres humains. Il a transmis à son fils Asclépios le secret pouvoir de guérir toutes les maladies ; or lui-même est capable de châtier les hommes par la mort : c'est lui qui, pendant le siège de Troie, provoque l'épidémie de peste dans le camp des Grecs. La plupart des morts soudaines sont le résultat de ses flèches d'or qui ne manquent jamais leur but ; ainsi, les enfants de Niobé périssent sous ses traits. L'amabilité ne lui manque pas cependant ; il sait, de sa lumière, guider le navire des Argonautes ; il intervient auprès des Moires en faveur du roi Admète qui ne veut pas mourir si jeune. Ces pouvoirs le font également considérer comme le dieu de la justice et de l'ordre.

Apollon inspire les poètes et les musiciens, les artistes en général. Musicien lui-même, il réjouit les immortels à travers les sons enchanteurs qu'il tire de sa lyre d'or, qui compte sept cordes – car c'est sept fois que les cygnes ont chanté lors de sa naissance. Il dirige le chœur des Muses, d'où l'appellation d'Apollon Musagète.

Ovide, en une invocation, résume les deux principaux pouvoirs d'Apollon : « En commençant, je t'implore. Que ton laurier m'assiste, Phébus, toi qui as inventé la poésie et l'art de la médecine. Viens en aide à la fois au poète et au médecin ; l'un et l'autre sont sous ta protection tutélaire. »

Voir aussi : Marsyas

Les amours

Les amours d'Apollon sont innombrables : outre Coronis, il aime (entre autres) Créüse, dont il a un fils nommé Ion ; Thalie qui enfante les Corybantes ; Branchos, qu'il pourvoit du don de prophétie ; Hyacinthos ; Admète ; Hippolyte de Sicyone ; Daphné, la fille de Gaia, lorsqu'il l'aperçoit cueillant des fleurs sur le mont Parnasse : vierge effarouchée, la nymphe s'enfuit à l'approche du dieu, qui aussitôt se lance à sa poursuite. Alors qu'elle s'apprête à succombera ses avances pour le moins empressées, elle est métamorphosée par sa mère en laurier qui devient l'arbre d'Apollon.

Voir aussi : Daphné, Coronis, Hyacinthos, Créüse (Variante 3), Branchos, Admète

L'oracle

Après sa pénitence auprès d'Admète, Apollon se doit de trouver un endroit susceptible de rendre ses oracles. Il se rend en Piérie, longe Lectos, traverse le pays des Perrhèbes ; il gagne Iolcos, passe au cap de l'Eubée, s'arrête dans la plaine Lélante. Il franchit l'Euripe pour se rendre en Béotie ; puis à Mycale et à Teumesse. Il arrive à Onchestos et constate que Poséidon y a déjà son bois sacré. Il atteint les rives du Céphise, puis Haliarte. En Arcadie, la plaine de Telphousa lui plaît, et il décide d'y établir son oracle. Mais la nymphe Telphousa, déjà enorgueillie par la splendeur de son site, craint en plus d'être éclipsée par le rayonnement du dieu. Aussi suggère-t-elle habilement à Apollon d'aller voir ailleurs.

Voir aussi : Telphousa

Apollon gagne rapidement Crisa, au pied du mont Parnasse. Le lieu est gardé par un terrible serpent ; Apollon le tue d'une flèche.

Voir aussi : Python

Après avoir révélé ses intentions – sa volonté de faire connaître aux hommes la sienne propre –, il trace le plan de son temple ; il confie ensuite la construction de l'édifice aux architectes Agamède et Trophonios. Quand il est achevé, le dieu songe qu'il a besoin de ministres pour prendre soin de son culte. Avisant dans le lointain un vaisseau de commerçants crétois, Apollon se change en dauphin et fait jaillir une gerbe d'eau, si grande que l'équipage en est tout retourné et que le navire vient s'échouer au port de Crisa. Apollon se fait connaître et annonce aux hommes qu'il les destine à une noble fonction ; après leur avoir expliqué ce qu'il attend d'eux, il leur enjoint de l'honorer en tant qu'Apollon Delphien, car c'est sous l'aspect d'un dauphin qu'il leur est apparu la première fois.

Voir aussi : Pythie

Aucune cité grecque n'est ensuite construite sans que l'oracle ait été auparavant consulté : le dieu a quatre ans lorsqu'il construit sa première ville, dans l'île d'Ortygie, dont les premiers fondements ont été les cornes des chèvres tuées par sa sœur Artémis. Dans les Euménides, Eschyle dresse une sorte d'historique de l'oracle, qui s'éloigne de la tradition ; avant la venue d'Apollon, ont été les dépositaires de l'oracle Gaia (la Terre), Thémis, et Phoibé. Apollon a hérité naturellement le sanctuaire de Delphes de Phoibé à qui il doit par ailleurs son surnom de Phoibos (Phœbos).

Voir aussi : Delphes

Culte et attributs

Apollon représente, si l'on peut dire, le dieu le « plus parfait », la divinité absolue, incarnant, chez les Grecs, au plus haut degré le type idéal de la jeunesse, de la beauté et de l'énergie.

Les Romains ne possèdent pas une divinité comparable à Apollon ; le culte est introduit à Rome par la Grande Grèce et l'Étrurie. Son temple le plus célèbre est érigé après la victoire d'Actium, en 28 av. J.-C., par Auguste, dans une partie de la maison que l'empereur possède sur le mont Palatin, et qui a été frappée par la foudre ; la sibylle y transmet les paroles du dieu. Suétone rapporte qu'Auguste donna un jour un dîner en secret, qu'on appela le « festin des douze dieux » ; les convives sont travestis en dieux et l'empereur lui-même est déguisé en Apollon. Ce banquet apparaît comme un scandale car Rome souffre de la disette ; Auguste passe alors pour « Apollon Bourreau », expression sous laquelle on vénère le dieu dans l'un des quartiers de la Cité. Dans le même ouvrage, l'auteur raconte que la mère d'Auguste, Aria, s'endort au beau milieu d'une cérémonie solennelle en l'honneur d'Apollon. Lorsqu'elle s'éveille, seule, elle s'aperçoit qu'elle a une tache sur le corps, dont la forme rappelle celle d'un serpent. Elle ne parvient jamais à l'enlever. Neuf mois après cet épisode naît Auguste : ainsi est-il considéré comme l'enfant d'Apollon.

Chez les Romains, Apollon est surtout considéré comme le dieu de la médecine. Apollo Medicus, Salutaris ou Medicinalis est le seul Apollon proprement romain (avant son assimilation au dieu grec), et qui apparaît alors qu'une énième épidémie (pestilentia) ravage la contrée en 433 av. J.-C. ; son temple est consacré deux ans plus tard au pied du Capitole.

Son culte est très répandu dans le monde hellénique, ses épithètes nombreuses : il est, entre autres, Apollon Karneios, protecteur de la race dorienne ; Patrôos chez les Ioniens ; les premiers Grecs qui arrivent en Sicile, les Chalcidiens de l'Eubée, fondent Naxos et élèvent un temple à Apollon Arkhégétès, c'est-à-dire « Guide », et dont l'oracle est consulté avant tout départ.

À Rome, les jeux Apollinaires se déroulent au mois de juillet. À Thèbes, les Daphnéphories lui sont consacrées, tous les neuf ans.

Voir aussi : Fêtes et jeux chez les Romains

Ses principaux temples sont situés en Crète, à Corinthe, Delphes, Délos, Lesbos, Trézène, Syracuse, Agrigente. Ses attributs sont le char, l'arc et les flèches, la lyre et le laurier que mangent les devins.

Variante

Apollon est né à Tégyres, en Béotie, où se trouve son oracle.

L'oracle d'Apollon

Qu'est-ce qui est le plus avantageux pour nous, je t'en conjure, Apollon, apprends-le nous, toi qui résides à Delphes, sur le merveilleux Parnasse. Qu'arrive-t-il ? Les cheveux se dressent sur la tête de la Pythie, les trépieds s'agitent, la voix de la Religion résonne dans les profondeurs du temple, les lauriers frémissent et la lumière du jour elle-même pâlit. De la Pythonisse, frappée par la puissance du dieu, jaillissent ces paroles : « Écoutez, vous tous, l'avertissement du dieu de Délos : appliquez-vous à la piété ; accomplissez les vœux promis aux dieux ; défendez, par les armes, votre patrie, vos parents, vos enfants, vos chastes épouses ; refoulez l'ennemi par le fer ; secourez vos amis ; soyez bons envers les misérables ; rangez-vous dans le camp des gens de bien ; chassez l'imposteur ; châtiez le crime ; chassez l'impie ; punissez l'être qui souille le lit conjugal d'un infâme adultère ; tenez-vous éloigné des scélérats ; ne faites surtout confiance à personne ». Ces paroles prononcées, la vierge délirante tomba à terre ; délirante, en effet, car tout ce qu'elle avait dit, le vent s'en était emparé.

Phèdre

Apollon fondateur de cités

C'est à la suite de Phoibos que les hommes tracent l'enceinte des cités. Phoibos se réjouit chaque fois que naît une ville : c'est lui, en personne, qui dresse le plan de leurs fondations. Il avait quatre ans, quand, pour la première fois, il établit les solides fondations dans la belle Orrygie, près du lac arrondi. De la chasse, Artémis n'avait de cesse d'y amasser des têtes des chèvres du Cinthe ; Apollon en ordonnait un autel. Des cornes il fit un piédestal ; des cornes il fabriqua la table ; des cornes il dressa une enceinte tout autour. Telle fut son premier enseignement, élever des cités.

Callimaque

Apollon conduisant ses troupeaux.
Apollon conduisant ses troupeaux.
Apollon et les Muses.
Apollon et les Muses.