Journal de l'année Édition 2002 2002Éd. 2002

La fièvre aphteuse traumatise l'agriculture européenne

À peine la psychose provoquée par la maladie de la vache folle (ESB) s'était-elle apaisée à la faveur d'une série de dispositions prises au niveau de l'Union européenne que la fièvre s'emparait à nouveau des milieux agricoles.

Une fois encore, c'est de Grande-Bretagne que souffle ce nouveau vent de panique, provoqué par la découverte, le 19 février, d'un foyer de fièvre aphteuse. Le mal, que l'on croyait éradiqué en Europe, se propage comme une traînée de poudre en Grande-Bretagne, tandis que la France et les autres pays de l'Europe continentale cherchent à se prémunir contre l'épizootie à coups d'embargo et en multipliant les mesures préventives dont font les frais une fois encore les éleveurs. La campagne d'éradication, qui s'est traduite par l'abattage de millions d'animaux, est parvenue à endiguer le fléau, sur le continent en tout cas plus qu'en Grande-Bretagne, où le bilan pèse lourdement sur les professionnels de l'élevage, déjà sinistrés.

Adieux veaux, vaches, cochons...

Plus aucun des animaux de nos fermes européennes ne semble désormais à l'abri des conséquences d'une agriculture productiviste dont la maladie de la vache folle (ESB) a montré les abus pathogènes pour l'homme. Alors que l'on commençait à peine à tirer les conséquences sanitaires de l'ESB, un nouveau fléau menace cette fois l'ensemble des animaux du cheptel européen : le 19 février, on détecte un cas de fièvre aphteuse dans un abattoir de Brentwood. Une fois encore, la Grande-Bretagne est au cœur d'un scandale agricole qui fait resurgir le spectre d'une épizootie foudroyante. Des mesures d'urgence s'imposent, d'autant que le mal, qui n'épargne aucune bête du cheptel, est très contagieux et ne connaît pas de frontières.

Contrairement à l'ESB, la fièvre aphteuse est un mal connu contre lequel un vaccin existe et il ne pose pas de problème de santé publique proprement dit, puisqu'il n'est pas transmissible à l'homme. Mais l'extrême virulence d'une épidémie, dont on sait qu'elle peut décimer des troupeaux entiers, et les mesures quasi militaires prises pour y faire face, avec mise en quarantaine de territoires entiers et passage obligé par des bacs de décontamination pour leurs habitants, ont entraîné un même phénomène de psychose, détournant les consommateurs des produits carnés et frappant de plein fouet les professionnels de la filière bovine. Dès le 21 février, l'UE prononce l'embargo contre les importations de bétail et de viande en provenance de Grande-Bretagne, où l'extension fulgurante de l'épizootie crée une situation d'urgence, isolant du reste du monde des régions entières ; chaque jour, on détecte de nouveaux foyers – parfois jusqu'à 40 – que les autorités britanniques décident de combattre par le feu, en abattant des troupeaux entiers et en procédant à l'incinération des carcasses dans de gigantesques brasiers. Confiée à l'armée, cette campagne d'éradication donne des airs de champs de bataille à la campagne britannique.

En raison des modes de propagation très volatils de l'épidémie, les pays européens mettent en place des mesures tout aussi drastiques, mais à vocation surtout préventive, en l'absence de foyers avérés de fièvre aphteuse : les zones où ont été détectés des animaux présentant des anticorps spécifiques au mal sont traitées comme des foyers infectieux, avec isolement total du site, interdiction de circuler dans un rayon de 3 km et surveillance par les forces de l'ordre des 10 km alentour. Cette campagne systématique, qui se traduit début mars par l'abattage de quelque 50 000 animaux, attire vite sur le gouvernement la colère des éleveurs, qui soupçonnent une manœuvre dilatoire à l'approche des municipales. Le plan de lutte anti-fièvre aphteuse du gouvernement français, qui refuse de recourir au vaccin, abandonné depuis la campagne de 1991 et jugé inefficace pour éradiquer le virus dans le cheptel, est accusé d'entretenir inutilement la suspicion sur les produits de l'élevage français, auxquels se ferment l'Italie et un certain nombre de pays.

La fièvre s'empare des milieux agricoles

En dépit des fonds débloqués pour dédommager les éleveurs, le manque à gagner est considérable pour une profession déjà traumatisée par l'ESB. Dès le début du mois d'avril pourtant, la fièvre qui s'est emparée des milieux agricoles européens tend à baisser à mesure que se confirme la non-propagation de l'épizootie sur le continent et tandis que se stabilise le nombre de foyers détectés en Grande-Bretagne.