Enfin, l'Assemblée nationale examine, les 18 et 19 juillet, deux propositions de loi tendant, pour l'une, à élargir les pouvoirs d'information du Parlement et à créer un Office parlementaire d'évaluation des politiques publiques, et, pour l'autre, à créer un Office parlementaire d'évaluation de la législation. Ces deux textes sont toujours en instance sur le bureau du Sénat début novembre, donnant naissance à un début de polémique entre les parlementaires attachés à leur adoption et le gouvernement.

La réforme de la Constitution

Mais le texte le plus important de cette session est sans conteste la loi constitutionnelle portant extension du champ d'application du référendum, instituant une session parlementaire unique, modifiant le régime de l'inviolabilité parlementaire et abrogeant les dispositions relatives à la Communauté et les dispositions transitoires. La neuvième réforme de la Constitution de la Ve République a été adoptée définitivement par le Congrès du Parlement le 31 juillet par 674 voix contre 178. L'extension du référendum permet désormais au président de la République, sur proposition du gouvernement pendant la durée des sessions ou sur proposition conjointe des deux assemblées, de soumettre au référendum tout projet de loi portant sur des réformes relatives à la politique économique ou sociale de la nation et aux services publics qui y concourent. Bien que la rédaction de cette disposition ait été ciselée pour permettre au peuple de se prononcer sur des grands problèmes de société comme l'éducation, l'emploi ou la lutte contre l'exclusion sans pour autant offrir aux autorités politiques la faculté de le consulter sur des questions comme la peine de mort ou le droit de la nationalité, cette modification constitutionnelle est violemment contestée par l'opposition socialiste et communiste, qui y voit une atteinte à l'équilibre des pouvoirs institutionnels, un abaissement du rôle du Parlement et un risque d'exposer la fonction présidentielle aux pressions des lobbies. En revanche, les dispositions relatives à la session parlementaire unique de 9 mois devant remplacer les deux sessions ordinaires annuelles de 3 mois chacune, toutes délicates qu'elles aient été à rédiger, n'ont pas fait l'objet de la même contestation. Néanmoins, de nombreux parlementaires ont estimé que la revalorisation de la place du Parlement ne pourrait faire l'économie – au-delà de cette modification du rythme de travail des assemblées leur permettant de mieux contrôler l'activité du gouvernement comme d'être informées sur celle des organes institutionnels européens (Conseil, Commission et Parlement) – d'une réflexion et de décisions sur le cumul des mandats nationaux et locaux, notamment des députés. Quoi qu'il en soit, le nouveau régime des sessions s'établit désormais ainsi : le Parlement se réunit de plein droit en une session ordinaire qui commence le premier jour ouvrable d'octobre et prend fin le dernier jour ouvrable de juin ; le nombre de jours de séance que chaque assemblée peut tenir au cours de la session ordinaire ne peut excéder cent vingt ; les semaines de séance sont fixées par chaque assemblée ; le Premier ministre, après consultation du président de l'assemblée concernée, ou bien la majorité des membres de chaque assemblée peuvent décider de la tenue de jours supplémentaires de séance ; les jours et les horaires de séances sont déterminés par le règlement de chaque assemblée ; enfin, une séance par mois est désormais réservée en priorité à l'ordre du jour fixé par chaque assemblée, afin que le Parlement puisse examiner un nombre plus important de propositions de loi.

Troisième volet essentiel de la loi constitutionnelle, la modification du régime de l'inviolabilité parlementaire donne également lieu à un débat approfondi. Les parlementaires sont en effet partagés entre le souci de répondre aux attentes de leurs concitoyens en matière de transparence et d'équité face à la justice et celui d'éviter de mettre en péril les protections légitimes dont ils bénéficient pour exercer sereinement leur mandat. Selon les nouvelles dispositions, aucun membre du Parlement ne peut désormais faire l'objet, en matière criminelle ou correctionnelle, d'une arrestation ou de toute autre mesure privative ou restrictive de liberté qu'avec l'autorisation du bureau de l'assemblée dont il fait partie, cette autorisation n'étant pas requise en cas de crime ou délit flagrants ou de condamnation définitive. En outre, les mesures privatives ou restrictives de liberté ou la poursuite d'un membre du Parlement sont suspendues pendant la durée de la session si l'assemblée dont il fait partie le requiert (cette nouvelle disposition est appliquée à Bernard Tapie dès novembre, le bureau autorisant la quatrième levée de son immunité parlementaire mais non sa mise en détention).

Grégoire Roederer