Journal de l'année Édition 1985 1985Éd. 1985

De fait, les effectifs des fonctionnaires sont appelés à décroître en 1985. Certes, la baisse est relativement modeste (5 454 personnes) compte tenu des 2 millions d'agents que l'État emploie. Mais l'événement est rarissime. Cette réduction d'effectifs touche pratiquement l'ensemble des ministères. Sauf trois : l'Éducation nationale, qui recrutera au contraire 2 289 agents nouveaux, la Recherche et la Justice. Trois des grandes priorités de l'action gouvernementale sont ainsi tracées.

L'Éducation nationale

L'enjeu imposé au nouveau ministre, Jean-Pierre Chevènement est triple. D'abord, il est évident que le meilleur moyen de couper l'herbe sous le pied des partisans de l'école privée est de doter le service public de moyens qui lui ont souvent fait défaut dans le passé. Ensuite, l'Éducation avait accumulé ces dernières années un retard certain dans l'enseignement des nouvelles techniques et en particulier de l'informatique. Enfin, le gouvernement souhaitant que les jeunes restent un peu plus longtemps à l'école plutôt que d'affluer vers le marché du travail, le système éducatif se doit de leur présenter une apparence suffisamment incitative.

La recherche favorisée

L'augmentation assez sensible des effectifs de la Recherche illustre assez bien la deuxième priorité gouvernementale : adapter le pays aux mutations technologiques, notamment dans le domaine industriel. Deux ministères sont concernés : la Recherche, qui voit son budget augmenter de 7 %, et surtout l'Industrie, dont la dotation s'accroît de 24 %. Il est vrai que, pour l'industrie, il s'agit au moins autant de soutenir les activités en difficulté (constructions navales et sidérurgie notamment) que de dynamiser les secteurs de pointe.

Autre priorité

La sécurité est la troisième grande priorité. Le gouvernement n'a pas oublié que la campagne pour les élections municipales de 1983 a été, dans de nombreuses villes, axée sur le thème de la sécurité, un des terrains favoris de l'opposition. La Justice, accusée souvent de lenteur, voit donc ses effectifs accrus. La gendarmerie est l'une des rares armes de la Défense nationale à bénéficier d'une augmentation notable de ses moyens.

Enfin, le gouvernement réaffirme la priorité qu'il accorde à l'emploi. Toutefois, sa démarche ne réside pas dans une inflation des moyens mais dans leur redéploiement. Les formules nouvelles seront rares, Michel Delebarre préférant améliorer les dispositions existantes. Cette priorité accordée à l'emploi n'est pas jugée incompatible avec la réduction plutôt sensible des effectifs des ministères concernés.

Quant aux autres ministères, leurs titulaires font plutôt grise mine. Il est vrai que l'objectif assigné à ce budget était avant tout de réduire les prélèvements, c'est-à-dire les dépenses. Celles-ci augmenteront moins que la richesse nationale. Dans la mesure où le gouvernement s'était fixé des priorités, cela imposait des non-priorités. C'est le prix à payer à un engagement politique. C'est aussi le moyen de ramener la France dans le camp de l'orthodoxie occidentale, comme n'ont pas manqué de le souligner les observateurs étrangers.

Alain Guédé