Tout au long de l'été, rien ne va plus pour Jimmy Carter. Le chef de la Maison-Blanche, totalement discrédité auprès de ses compatriotes, offre l'image d'un homme d'État en plein désarroi, multipliant les initiatives incohérentes et collectionnant les revers.

Mais son attitude ferme face à la crise iranienne et la brutale détérioration des relations avec l'URSS, consécutive à l'intervention soviétique en Afghanistan, vont jouer en sa faveur. Il voit sa cote de popularité remonter, une véritable union sacrée se former autour de lui. Les Américains, qui doutaient d'eux-mêmes depuis la fin peu glorieuse de la guerre au Viêt-nam et le scandale du Watergate, vont l'encourager cette fois à abandonner sa conception très idéaliste des rapports de force entre les nations, à consolider l'arsenal des États-Unis et à s'orienter vers une politique du gros bâton afin d'effacer les coups portés au prestige du pays.

Les difficultés économiques — inflation, crise énergétique — n'en demeurent pas moins fort préoccupantes et les mesures prises par Carter à ce propos seront loin de faire l'unanimité.

Souveraineté sur le canal de Panama

La Chambre des représentants approuve (232 voix contre 188), le 26 septembre 1979, la législation d'application des traités, signés en septembre 1977, sur le transfert de souveraineté du canal de Panama et de sa zone à la République de Panama. Les opérations ont commencé le 1er octobre 1979. La version finale de la législation, déjà approuvée le 25 septembre par le Sénat, prévoit que le canal pourra être replacé sous autorité militaire américaine si le président des États-Unis estime que la sécurité de son fonctionnement est en danger. La zone du canal s'étend sur 8 km, de chaque côté de la voie d'eau. C'est elle qui, la première, doit être placée sous la souveraineté panaméenne. Trente mille civils et dix mille soldats américains y résident et y resteront jusqu'à la fin de l'année 1999, date à laquelle le canal sera restitué entièrement aux Panaméens (Journal de l'année 1977-78).

Mauvaise humeur

Lorsque, le 1er juillet, Jimmy Carter rentre de son voyage en Corée du Sud, il se trouve confronté à une situation intérieure particulièrement délicate. Les récentes décisions de l'OPEP et du sommet de Tokyo ont été mal accueillies par l'opinion publique américaine, qui manifeste de plus en plus vivement sa mauvaise humeur devant la pénurie des produits pétroliers et les hausses désordonnées des prix. L'inflation, qui atteint un rythme annuel de 14 %, provoque une opposition ouverte des syndicats à la politique des prix et salaires prônée par l'administration, d'autant plus que l'activité économique du pays se caractérise par un ralentissement général.

Le sentiment qui prévaut alors est que Carter n'est pas à même de faire face aux difficultés. Le président annonce qu'il va présenter le 5 juillet un programme « hardi et énergique » pour remédier à la crise. Mais, sans explication, il décide quelques heures plus tard de différer sine die son discours. L'irrésolution du chef de l'exécutif se retrouve dans quelques-uns des ministères clés de la capitale fédérale. Ainsi, le 5 juillet, le Département d'État dément toute éventualité de l'emploi de la force dans la région du Golfe et de l'océan Indien, mais le secrétaire à la Défense, Harold Brown, n'hésite pas à le contredire le lendemain et à déclarer : « Les États-Unis pourraient intervenir militairement (dans cette zone) si leurs intérêts vitaux étaient menacés. »

Carter annule les trois jours de vacances qu'il devait passer à Hawaii et s'isole, à partir du 6 juillet, dans sa résidence de Camp David afin de consulter, pendant une semaine, toute une série de personnalités. Bien entendu, le problème de l'énergie est au centre de chacun de ces entretiens, mais le porte-parole du président souligne, le 10 juillet, que ce dernier est « préoccupé par l'attitude des Américains à l'égard d'eux-mêmes et de leur pays » et que « cette préoccupation dépasse les problèmes économiques ».