La controverse sur la sûreté et la fiabilité de l'industrie électronucléaire est marquée, en août 1978, par l'annonce, faite au Canada, que sept réacteurs de la filière Candu devront être arrêtés pendant un an, vers 1985, pour un changement de leur système de circulation d'eau lourde. Ces réacteurs consomment de l'uranium naturel et utilisent l'eau lourde comme ralentisseur de neutrons et comme fluide calo-porteur.

Les tubes où circule l'eau lourde sont en zircaloy, alliage qui absorbe peu de neutrons (qualité nécessaire pour les réacteurs à uranium naturel) ; ils doivent être aussi fins que possible. Sous l'effet du bombardement neutronique, ils se sont allongés à un rythme deux fois plus rapide que prévu, alors qu'ils devaient rester en place pour toute la durée de fonctionnement des réacteurs, estimée à trente ans. Leur remplacement coûtera 500 millions de dollars à la province de l'Ontario. Des modifications devront être apportées aux réacteurs de la filière canadienne en construction ou en projet au Canada, en Argentine et en Corée du Sud. Certains pensent que cette filière pourrait être abandonnée, comme l'ont été les autres filières à uranium naturel.

Déchets

Dix scientifiques américains demandent, en décembre 1978, au département de l'Énergie à Washington, de renoncer à son projet de stockage définitif de déchets radioactifs vitrifiés dans une ancienne mine de sel à Carlsbad (Nouveau-Mexique). Ils se fondent sur des expériences suivant lesquelles, à 400 °C, température qui pourrait être atteinte par l'échauffement des déchets, le verre au silicate de bore, utilisé pour cette vitrification, aurait tendance à fondre et à laisser échapper sa radioactivité.

En France, où les chercheurs du CEA étudient la question depuis une quinzaine d'années, le premier atelier industriel de vitrification en continu des déchets nucléaires, géré par la COGEMA (Compagnie générale des matières nucléaires), est entré en service à Marcoule le 28 juin 1978. Cette installation, la première du genre dans le monde, retient l'intérêt des experts d'autres pays, dont la RFA et la Grande-Bretagne. D'autres chaînes du même type seront installées à La Hague.

Les techniciens français ont simulé, par irradiation, un stockage de 1 000 ans de déchets vitrifiés, sans constater de fuite radioactive. En temps réel, au bout de 1 000 ans, la radioactivité aura d'ailleurs fortement décru. Il convient de remarquer que les Américains, qui ont décidé de ne pas retraiter les combustibles irradiés, doivent stocker un volume bien plus considérable de déchets, à forte teneur en plutonium. Après extraction de l'uranium résiduel et du plutonium par retraitement du combustible irradié, les déchets à vitrifier contiennent essentiellement des produits de fission, à radioactivité élevée, mais de volume moindre.

Risques

La Nuclear Regulatory Commission, organisme fédéral chargé de la sûreté des réacteurs, fait savoir, à la mi-janvier 1979, qu'elle ne considère plus comme « digne de confiance » l'estimation sur les risques d'accident qu'elle a publiée en 1972. Ce document, généralement connu sous le nom de rapport Rasmussen, évaluait à une chance sur un milliard par an et par réacteur la probabilité d'un accident très grave, et à moins de 10 000 le nombre total de morts qu'il serait susceptible d'entraîner à court et à long terme.

Favorablement accueilli dans le monde entier par les partisans de l'énergie nucléaire, le rapport Rasmussen avait été critiqué par ses adversaires. D'où la décision, prise en 1977, de le faire réexaminer par un nouveau groupe d'experts. C'est à la suite de leur travail que la commission a décidé d'adopter une attitude nuancée : tout en continuant de s'appuyer sur certaines parties du rapport et sur la méthodologie qui l'a inspiré, elle admet que, dans l'appréciation des risques, la marge d'erreur — en plus ou en moins — est plus élevée que ne l'indiquait le rapport. L'industrie nucléaire américaine redoute que ce changement d'attitude entraîne une aggravation des procédures légales, d'après elle déjà trop lourdes, qui retardent la construction des centrales.