TF1 investit dans les dramatiques, les téléfilms et les feuilletons, genre béni depuis les réussites passées : en 1978, 167 millions de F ont été investis dans ce secteur de production, ce qui a permis au téléspectateur de suivre une adaptation réussie du roman d'Aragon Aurélien, d'apprécier Marie-José Nat dans La souscription, de Marlène Clément, de s'émouvoir avec Allegra, d'après l'œuvre de Françoise Mallet-Jorris, et surtout, pendant les fêtes de Noël, de suivre l'adaptation de trois grandes œuvres : Manon Lescaut, avec Fanny Cottençon, Ciné-Roman, de Serge Moatti d'après Roger Grenier (avec Maurice Biraud et Jacques Dufilho), et surtout une merveilleuse Petite Fadette incarnée par Françoise Dorner.

Ce ne sera pas là le moindre intérêt de ces programmes spéciaux où l'on retrouvera, outre Henri Salvador, Sylvie Vartan et Maurice Chevalier, un festival de films de Charlie Chaplin, une série américaine consacrée à Martin Luther King, enfin Madeleine Renaud dans Harold et Maude.

Noël passé, TF1 reviendra à sa vitesse de croisière, sans négliger le document dont elle diffuse d'excellents spécimens, dus, il est vrai à de grands spécialistes. En février, Des paysans, de Jean-Claude Bringuier, se penche sur le monde rural et ses problèmes, en mars, Jean-Émile Jeannesson nous emmène à la découverte du Japon moderne (Lettres du bout du monde) et, au mois de juin, c'est l'enquête de Hubert Knapp Mon quartier, c'est ma vie. Signalons enfin la diffusion, le vendredi avant Pâques, d'une œuvre de François Reichenbach La Passion selon le peuple mexicain et l'apparition de deux nouveaux magazines, l'un littéraire, Livres en fête, de Jean d'Ormesson et Jacques Paugam, l'autre économique, L'enjeu, avec François de Closets et Emmanuel de La Taille.

A2 : musique et histoire

En gardant de l'héritage de Marcel Jullian toute la force d'imagination et en tempérant le goût du risque des responsables des différents secteurs de production, le sage Maurice Ulrich est-il parvenu à donner à Antenne 2 son véritable rythme ?

On peut le croire. Les programmes de cette année manifestent la même volonté d'oser de grandes opérations tout en conservant les points fixes vedettes : Dossiers de l'écran, travail de qualité, dont on retiendra surtout une enquête de Pascale Breugnot Si vous écoutiez vos enfants (le 12 décembre) et une évocation historique de l'historien communiste Jean Ellenstein réalisée par Yves Ciampi Trotski-Staline : le pouvoir et la révolution, avec un remarquable Henri Virlojeux (le 15 mai). Le grand échiquier de Jacques Chancel donne rendez-vous chaque mois aux amateurs de musique, et, cette saison plus que d'autres, de grande musique, conformément aux goûts de son producteur. C'est ainsi que l'on entre à l'Opéra de Paris, avec Rolf Liebermann, le 28 décembre, que l'on rencontre Jean-Pierre Wallez et l'ensemble orchestral de Paris le 22 février — la chanteuse Pia Colombo y bouleverse des millions de téléspectateurs par son visage blessé qui témoigne de sa lutte contre le cancer —, et Lorin Maazel, le 26 juin. C'est encore Antenne 2 qui retransmet l'opéra d'Alban Berg, Lulu, véritable événement lyrique de la saison.

Antenne 2 produit d'excellents documentaires, tels Bande à part, de Martine Lefèvre et Marianne Gosset, Par elles-mêmes, d'Anne Sabouret, et décide d'ouvrir ses programmes dès la mi-journée avec un bulletin d'informations. Jean-Pierre Guérin (naguère responsable du magazine de la consommation de TF1 À la bonne heure) prend la direction de ce nouveau journal dynamique, en quête d'un éclairage différent de l'actualité.

Le fait le plus important de la vie de la chaîne reste la diffusion d'Holocauste en janvier et février. Il s'agit d'une œuvre romanesque qui restitue avec réalisme le destin douloureux d'une famille juive de Berlin pendant la dernière guerre. Les horreurs nazies, la déportation dans les camps, le ghetto de Varsovie sont restitués par les six épisodes de ce feuilleton américain qui a battu tous les records d'écoute dans tous les pays où il a été diffusé. On estime qu'en France les premiers épisodes ont été vus par 75 % de l'audience, soit environ 22 millions de téléspectateurs.

FR3 : cap sur l'information

Un nouveau visage apparaît sur l'écran de FR3 le 25 septembre 1978, celui de Jean-Marie Cavada, qui, récemment nommé directeur adjoint chargé de l'information, présente le premier numéro du journal de la chaîne, baptisé désormais Soir 3. Nouveau, Jean-Marie Cavada l'est pour FR3, car on se souvient de son travail naguère sur Antenne 2 et, quelques mois auparavant, sur RTL.