Journal de l'année Édition 1978 1978Éd. 1978

Le libéralisme est une bonne chose dans un pays comme la France, s'il permet, dans une période où l'évolution internationale impose plus de mobilité, aux entreprises de jouer au mieux leurs atouts. Mais ce libéralisme-instrumental deviendrait dangereux s'il débouchait sur un libéralisme-doctrinal dont on a vu les ravages en d'autres temps ; par exemple, dans les années trente, quand les économistes de cette tendance condamnaient l'indemnisation du chômage comme une cause de la crise et quand ils préconisaient la baisse des salaires pour sortir de celle-ci...

Cette renaissance de la pensée libérale en pleine crise constitue l'un des phénomènes caractéristiques de la période présente. Elle s'explique, sans doute, par les échecs des économies centralisées des pays communistes et par une résistance des individus, dans les pays occidentaux, à une plus grande intervention de l'État. Cette résistance a parfois pris l'aspect d'un refus de l'impôt, comme en Californie, aux États-Unis. En France, la majorité doit sans doute, pour partie, sa victoire aux élections au fait qu'elle promettait le gel des impôts alors que l'opposition annonçait leur augmentation.

Pour progresser dans cette société libérale, V. Giscard d'Estaing a pris, en juin 1978, une initiative importante à ses yeux : il a annoncé que chaque entreprise devrait distribuer 5 % de son capital (sous forme de distribution d'actions gratuites) à son personnel. De telle sorte, a-t-il dit, que chaque Français devienne « propriétaire de la France ». Reste à savoir si cela correspond aux aspirations des jeunes générations et si les travailleurs ne veulent pas se voir reconnaître des droits nouveaux dans l'entreprise, en tant que salariés, et non pas par le détour de la propriété de quelques actions.

Un nouveau libéralisme se cherche. Mais personne ne l'a encore trouvé.