Il est évidemment arbitraire de réunir sous une même rubrique des cambriolages de banque, l'affaire Vathaire et l'assassinat de J. de Broglie. Il reste qu'à des degrés variables ces trois faits divers, d'abord purement crapuleux, ont trouvé leur prolongement en politique. Le casse de la Société Générale de Nice le 19 juillet 1976, les circonstances rocambolesques de l'arrestation, puis de l'évasion de son principal auteur ont plus amusé qu'indigné (ceux, du moins, qui n'y avaient pas un coffre-fort), si l'inspiration politique extrémiste hautement revendiquée a paru douteuse. La fuite, au début de juillet 1976, avec huit millions prélevés sur l'un des comptes dont il avait la garde, de Vathaire, directeur de la comptabilité des sociétés de Marcel Dassault, dix épisodes obscurs de cette étrange affaire ont finalement débouché non seulement sur une procédure judiciaire qui est loin d'être close, mais sur la désignation d'une commission d'enquête parlementaire dont l'objet a été élargi à l'examen d'ensemble de la construction aéronautique, sans résultats bien convaincants. La lumière n'est toujours pas faite également sur les raisons et les dessous mystérieux de l'assassinat, en plein Paris, la veille de Noël 1976, du prince Jean de Broglie, ancien ministre et député de la majorité. Pourtant le ministre de l'Intérieur du moment, Michel Poniatowski, avait cru pouvoir annoncer, quelques jours plus tard, que les coupables étaient arrêtés et ainsi débrouillé un extraordinaire écheveau d'affaires, de complicités, de fraudes et de ganstérisme pur et simple, qui est pourtant loin encore d'avoir livré tous ses secrets.

La contestation, second chapitre de « l'autre politique », a fait moins d'éclats peut-être qu'au cours des années précédentes, mais elle s'est néanmoins manifestée sur divers terrains. En Corse d'abord, où la libération intervenue le 14 janvier 1977 d'Edmond Siméoni, condamné à cinq ans de prison dont deux avec sursis en juin précédent comme instigateur de la fusillade d'Aléria, n'a pas ramené le calme. Attentats, explosions, après la destruction d'un Boeing d'Air France le 7 septembre 1976 — ont continué, d'un bout à l'autre de l'année, d'alterner avec les incidents et les manifestations.

L'écologie a également constitué un thème d'effervescence. La plupart des rassemblements et protestations ont porté sur le développement de l'énergie nucléaire et sur la pollution. Mais les écologistes ont réussi, ainsi qu'on l'a vu à propos du scrutin municipal, à atteindre des couches nouvelles de l'opinion, au point d'offrir une alternative électorale à une partie de ceux qui ne se sentaient pas à l'aise dans la droite pas plus que dans la gauche. D'où les tentatives de récupération de l'écologie par les partis politiques, et en particulier par la gauche.

Contestation et discussions aussi, mais sans véritable agitation, autour des mises en garde du pouvoir qui entend s'opposer à la politisation dans l'entreprise et dans l'enseignement. Toutefois, dans ce dernier domaine, c'est surtout la grande réforme scolaire lancée par René Haby, ministre de l'Éducation nationale, qui suscitait les plus vives controverses, tandis que la querelle de l'enseignement privé renaissait une fois de plus de ses cendres, à la fin de la session parlementaire de printemps.

Après les faits divers à contenu politique et la contestation, il faut noter aussi, sans entrer dans l'analyse, quelques grands débats touchant au mouvement des idées plus encore qu'aux éléments d'ordre intellectuel, spirituel ou politique qu'ils mettaient en cause. Trois exemples : le débat au sein de l'Église catholique, secouée par l'offensive des traditionalistes se réclamant de Mgr Lefebvre et conduits à Paris, où ils se saisissaient de l'église Saint-Nicolas-du-Chardonnet, dans le Ve arrondissement, par Mgr Ducaud-Bourget. Débat autour des thèses plus politiques que philosophiques de ceux qu'on a appelés les nouveaux philosophes, jeunes et brillants intellectuels, hier pour la plupart maoïstes ou anarchistes, avant-hier souvent communistes, et aujourd'hui acharnés à dénoncer dans tous les Goulags l'héritage de Marx. Débat encore sur l'eurocommunisme, thème d'une spectaculaire rencontre à Madrid entre les dirigeants des partis communistes espagnol, italien et français, à l'irritation de Moscou.