Présentées par le ministre de l'Équipement comme un « retour au bon sens », ces directives traduisent le souci des pouvoirs publics d'élaborer un urbanisme « à l'échelle humaine » et d'abandonner le « gigantisme », contesté par la population. Mais, au-delà des discours et des déclarations d'intentions, comment ce souci peut-il se concrétiser sur le terrain ?

Le goût des Français

« La maison individuelle correspond au goût des Français. » De discours ministériels en déclarations du chef de l'État, cette affirmation est devenue une sorte de formule magique. En posant cette hypothèse, mal vérifiée, les responsables évitent d'avoir à poser les véritables problèmes de l'habitat : ensembles collectifs trop grands, trop mornes, trop éloignés des centres ; absence d'équipements, de verdure, d'animation, etc. Les sondages donneraient-ils des résultats aussi clairs si l'on posait cette simple question : préférez-vous une maison individuelle à trente kilomètres de votre lieu de travail et à vingt minutes à pied des commerces, ou un appartement bien situé ? La question sera sans doute posée à l'occasion de la vaste enquête sur l'habitat que le ministère de l'Équipement lance dans une douzaine de villes, afin de savoir vraiment ce que veulent les Français. Sans attendre ce nouvel élément de réflexion, les pouvoirs publics et les hommes politiques ont déjà, semble-t-il, affiné leur analyse. Alertés par les prédictions des spécialistes, qui dénoncent le risque d'envahissement des espaces libres par des maisons isolées, le gaspillage de terrains mais aussi le coût des équipements (voirie, réseaux divers...) pour desservir ces grands ensembles horizontaux, les responsables prônent maintenant un habitat individuel mais groupé ; des maisons certes, mais alignées le long des rues traditionnelles comme on en trouve dans toutes les villes de province. De nouvelles formules imaginées par les architectes commencent à séduire : des immeubles en gradins, des maisons individuelles superposées, des bandes de maisons accolées, qui ne sont pas sans rappeler les corons ou l'habitat traditionnel en Angleterre, sortent de terre. On appelle cela d'un vilain nom : l'habitat intermédiaire. Ces nouvelles formules satisferont-elles pleinement ceux qui continuent de rêver (sondage ou pas) à une maison entourée d'un jardinet grillagé, même si la tranquillité y est plus illusoire encore que dans un bon immeuble collectif ?