Les archéologues savent que beaucoup d'autres vestiges les attendent. Ceux des Thermes de l'Est, qui dorment sous le Collège de France, n'ont peut-être pas grand-chose à craindre ; mais il n'en va pas de même pour beaucoup d'autres. On aimerait pouvoir les classer, créer des réserves archéologiques. Malheureusement, la loi française autorise seulement le classement des objets ou monuments visibles...

Le projet « Nucleart »

Un nouveau procédé de traitement des objets anciens a été mis au point au Centre d'études nucléaires de Grenoble (CENG). L'objet à traiter est plongé dans une cuve où il s'imprègne d'une résine polymérisable, puis soumis à une irradiation par rayons gamma. Le rayonnement gamma induit la polymérisation de la matière plastique. Celle-ci se durcit. L'objet, transformé intérieurement, a conservé le même aspect et ne se dégradera plus. Des expériences de vieillissement artificiel, en cours depuis le début de 1973, n'ont entraîné aucune dégradation des pierres traitées, alors que des pierres témoins (non traitées) se désagrégeaient rapidement. Ce procédé a été appliqué à des dizaines d'objets qui posaient des problèmes de conservation, notamment au parquet mosaïque du musée Stendhal de Grenoble (155 m2) et à des cuillers en bois gorgées d'eau, vieilles de 4 000 ans, découvertes dans le gisement lacustre de Charavines. Les modalités du traitement sont variables, en fonction du matériau, de sa nature, de son état. Ce n'est là qu'un des aspects du projet Nucleart (nucléaire + art), par lequel le Commissariat à l'énergie atomique se propose de mettre son potentiel scientifique et technique au service des besoins culturels. La méthode ne se limite pas seulement aux objets anciens. On envisage d'améliorer grâce à elle les propriétés mécaniques du béton. La fabrication de parquets imprégnés-irradiés n'est pas exclue, et le bois, devenant beaucoup plus résistant, pourrait être employé en quantités moindres.

Les momies livrent leurs derniers secrets

La totalité de la collection des momies royales, conservées au musée du Caire, a été radiographiée.

Au cours d'un séminaire organisé par plusieurs organismes scientifiques américains à Detroit, les premiers résultats ont été communiqués. Cette étude ouvre peut-être une voie nouvelle qui devrait, à terme, donner ses plus grandes dimensions à la connaissance des hommes du passé.

Les observations concernent, pour l'essentiel, les momies royales du Nouvel Empire (période de l'histoire égyptienne qui a duré environ cinq cents ans, du XVIe au XIe siècle avant notre ère), troisième âge d'or des pharaons, époque des Thoutmosis, Aménophis et Ramsès. Les momies de tous ces rois ont été conservées avec celles de quelques reines et de quelques parents. Un seul absent : Toutankhamon, dont la momie a été laissée dans sa tombe.

Ces momies représentent une réserve de connaissances qui n'a pas de prix, un trésor longtemps inaccessible : toucher aux momies était trop risqué. Les bandelettes des Ramsès ont été défaites dans des cas tout à fait exceptionnels.

La direction du musée du Caire, en 1966, invite une équipe américaine à radiographier les momies royales.

Cette décision est finalement prise à la suite des recherches effectuées en Nubie par l'équipe en question ; elle avait étudié 5 000 squelettes exhumés de cimetières situés près d'Abou-Simbel, radiographié un millier d'entre eux ainsi que 2 000 jeunes Nubiens, à des fins de comparaison.

L'équipe du Pr Harris se met au travail et radiographie d'abord une collection de momies et de squelettes datés de l'Ancien Empire, puis des momies non royales du Nouvel Empire, enfin la collection. Les résultats, disponibles en 1973, concernaient d'une part les individus eux-mêmes, d'autre part la comparaison entre individus.

Les radios du roi Ahmose, quatrième souverain de la XVIIIe dynastie (libérateur du territoire contre les envahisseurs Hyksos), révèlent qu'il n'est pas circoncis. Si l'on en croit Hérodote, la circoncision était de règle en Égypte ancienne, ou du moins générale dans les hautes classes. Que le premier grand roi du Nouvel Empire ait été un incirconcis, et son successeur aussi, amène à se demander si cette famille était bien égyptienne.