Journal de l'année Édition 1971 1971Éd. 1971

Le démenti du Caire est accueilli en Israël, comme dans les capitales occidentales, avec scepticisme. Selon certaines informations, en effet, l'Égypte, n'ayant pas eu le temps de parachever son système de défense aérienne avant l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, aurait installé pendant la trêve de nouvelles rampes de fusées Sam 2 et Sam 3 (l'objectif est d'interdire l'accès du territoire aux bombardiers israéliens ; le pilonnage des positions égyptiennes sur le canal, sans parler de celles à l'intérieur de la vallée du Nil, a été dévastateur : en juin et juillet 1970, on dénombre plus de 4 000 morts et 20 000 blessés, selon certains observateurs).

Le 15 septembre, le vice-président du Conseil israélien, Ygal Allon, déclare que la négociation Jarring ne reprendrait que si l'Égypte détruit au préalable tous les emplacements de missiles édifiés depuis le 7 août. Le Caire rétorque qu'il s'agit d'une manœuvre pour empêcher la recherche d'une solution sur le fond du problème.

Les frontières

Le fossé entre les deux parties demeure profond. Tandis que l'Égypte insiste pour que tous les territoires occupés soient restitués aux pays arabes, les responsables israéliens (notamment Y. Allon et M. Dayan) rétorquent en désignant ceux qui devront inéluctablement demeurer sous le contrôle d'Israël : l'ex-secteur jordanien de Jérusalem, la vallée du Jourdain, les hauteurs du Golan, la zone de Gaza, la localité de Charm el-Cheikh, dans le Sinaï. Le général Dayan déclare que, pour des raisons de sécurité, il préfère Charm el-Cheikh à la paix, qui serait pour lui sans valeur s'il devait renoncer au contrôle de l'accès du golfe d'Akaba.

L'attitude du gouvernement Israélien est, sous différentes formes, réprouvée par les quatre grandes puissances. Si l'URSS et la France sont pour le retour aux frontières du 4 juin 1967, les États-Unis et la Grande-Bretagne ne sont que pour des rectifications non substantielles. Paris et Moscou suivent des voies parallèles : les deux capitales ne cachent pas leur hostilité à tout règlement qui serait parrainé exclusivement par les États-Unis.

Lors du débat à l'Assemblée générale des Nations unies, qui s'ouvre le 26 octobre, malgré les protestations du représentant de Jérusalem et les efforts des délégués de Washington, une résolution favorable aux thèses arabes est adoptée le 4 novembre. Le texte, rédigé par les représentants de pays afro-asiatiques et amendé par la France, est adopté par 57 voix contre 16 et 39 abstentions. Il recommande l'évacuation par Israël de tous les territoires occupés, appuie les droits des Palestiniens (et non plus des réfugiés) et prône un cessez-le-feu de quatre-vingt-dix jours, sans demander, en contrepartie, à l'Égypte de démanteler les rampes de lancement érigées au cours de la trêve.

Dialogue de sourds

Le cessez-le-feu est accepté, le même jour, par Israël, l'Égypte et la Jordanie. Le 29 décembre 1970, Golda Meir accepte la reprise de la mission Jarring, après avoir énuméré les cinq conditions posées par son pays à la conclusion de la paix : droit pour Israël de disposer de frontières sûres et reconnues ; Jérusalem, capitale unifiée d'Israël ; négociations directes sur la base de la résolution 242 ; maintien de l'occupation jusqu'à la conclusion d'une paix contractuelle ; le traité de paix devrait inclure les engagements pris par les anciens belligérants.

Le 8 janvier 1971, G. Jarring entreprend une visite en Israël, où il recueille des propositions, que l'Égypte et la Jordanie rejettent le 12. Le gouvernement du Caire formule, le 19, des contre-propositions, jugées cette fois-ci inacceptables par Israël. Celles-ci prévoyaient notamment le stationnement dans le Sinaï d'une force internationale, constituée de contingents des quatre grandes puissances. Le 4 février, le président Sadate reconduit le cessez-le-feu jusqu'au 7 mars. Cependant, le litige demeure entier et le dialogue de sourds se poursuit.

Mémorandum Jarring

Pour rompre le cercle vicieux, G. Jarring adresse, le 8 février, aux deux adversaires un mémorandum dans lequel il les invite à prendre des engagements parallèles et simultanés : les Israéliens sont conviés à lui faire savoir s'ils accepteraient de rendre le Sinaï à l'Égypte au cas où celle-ci s'engagerait à conclure formellement la paix ; G. Jarring demande, en revanche, aux Égyptiens s'ils seraient prêts à reconnaître Israël et à signer un traité de paix au cas où on leur restituerait les territoires occupés.