Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Moscou (suite)

Ces industries se localisent en fonction de l’origine de la matière première. Ainsi, en direction du bassin houiller de Toula et de Koursk, dans la banlieue sud, se trouvent une fonderie, l’usine de machines à coudre ex-Singer à Podolsk. Vers le sud-est, le long des voies ferrées, sont les usines Dinamo et Likhatchev ; vers le nord, près de Khimki, un chantier de constructions navales, des industries alimentaires ; vers l’est, en direction des villes de la Volga et du Second-Bakou, l’usine Elektrostal (aciers électriques), la chimie et les matières plastiques. Ainsi, l’agglomération s’est sans cesse avancée aux dépens de son oblast, où des villes de plus de 100 000 habitants concentrent une population industrielle et où les villes satellites ont été créées pour décentraliser la vieille ville. Moscou a ainsi construit sa zone d’attraction de main-d’œuvre.


Moscou, capitale

Les fonctions de services liées au rôle grandissant de la capitale utilisent une main-d’œuvre plus nombreuse que l’industrie : ainsi, plus du quart de la main-d’œuvre est employé dans la santé publique, l’enseignement et la recherche. Le transfert du siège du gouvernement décidé par Lénine a accéléré l’évolution démographique par rapport à celle de Petrograd (Leningrad) et multiplié les fonctions : la ville de Moscou fait plus que doubler sa population entre 1926 et 1939, laquelle augmente encore sensiblement de 1939 à 1970. Moscou est une triple capitale : de la république de Russie, de l’U. R. S. S. et aussi une capitale internationale. À ce titre, elle attire les cadres, les visiteurs, les touristes. Elle est un « pèlerinage » obligatoire pour tous les Soviétiques. Une propagande intense la présente comme un modèle. Staline avait voulu exprimer cette prépondérance en construisant des gratte-ciel, laids et démodés de nos jours, mais d’autres constructions nouvelles symbolisent la volonté de prestige. Ainsi se sont édifiés la plus haute tour de télévision du monde, à Ostankino (plus de 500 m), le plus grand hôtel (6 000 lits), à côté du Kremlin. À des titres divers, le théâtre Bolchoï, l’Exposition permanente des réalisations de l’économie nationale, l’université Lomonossov, les parcs d’attraction et les stades rassemblent les visiteurs provinciaux et étrangers.

Cette fonction se traduit par la concentration, en régime de planification centralisée, des organismes du Plan, des ministères fédéraux, des organes du parti, des représentations étrangères. L’université et les hautes écoles rassemblent le cinquième des effectifs de toute l’Union, et l’université est la plus réputée du pays. Près du cinquième des ingénieurs de l’U. R. S. S. travaillent à Moscou. Les grandes académies et des instituts de recherche renommés dans le monde entier y ont leur siège : ainsi, l’École des langues étrangères ou l’Institut Plekhanov pour l’étude de l’économie. Nikita Khrouchtchev se plaignait même que trop d’agronomes et de zootechniciens travaillaient dans la capitale, et des mesures de décentralisation ont entraîné le départ de quelques institutions. Mais, dans d’autres branches, la concentration s’est accélérée. Le siège de l’Académie des sciences de toute l’U. R. S. S. a été transféré, en 1934, de Leningrad à Moscou, et les activités de l’Académie, créant des filiales dans toutes les républiques, n’ont cessé de se développer. On compte actuellement plus de 500 laboratoires de recherche dans l’agglomération. La proximité des centres travaillant pour la défense nationale, enfouis dans la ceinture de verdure, la fondation de centres de recherches nucléaires, comme l’accélérateur de particules de Serpoukhov au sud, le centre de recherches fondamentales de Doubna au nord, sur la mer de Moscou, ont encore accru la concentration de scientifiques sortant des hautes écoles.

Sur le plan international, l’université Lumumba, située au sud de la Moskova, a attiré, avec des succès d’ailleurs divers, les étudiants du tiers monde, notamment de l’Afrique. Le nouveau siège du Comecon, l’organisation économique des pays de l’Est, dresse ses trente étages à l’extrémité de l’avenue Koutouzov, au bord de la Moskova, et rassemble des milliers de fonctionnaires. De nombreuses réunions au sommet se tiennent à Moscou, aussi bien celles des états-majors des États membres du pacte de Varsovie que celles des partis communistes du monde entier.

La ville s’ouvre également aux autres pays et prend une importance mondiale. Elle est de plus en plus choisie comme centre de grands congrès internationaux. Elle accueille plusieurs centaines de milliers d’étrangers par an, hommes d’affaires, touristes, le plus souvent regroupés selon la formule des voyages organisés et guidés. L’aéroport international de Cheremetievo, ouvert au trafic il y a une dizaine d’années et construit à une trentaine de kilomètres au nord de Moscou, accueille plus de 5 millions de passagers par an. Il reste à développer un secteur encore retardataire : l’hôtellerie.


Expansion et rayonnement de Moscou

La ville a ainsi forgé autour d’elle une région urbaine de grande taille et de densité à l’hectare encore relativement faible, par rapport aux grandes capitales mondiales (300 à l’intérieur de la Sadovaïa, moins de 100 à l’intérieur de la rocade). Le processus a été géométrique, sous la forme radio-concentrique, si bien qu’on peut facilement enfermer dans des cercles de rayon croissant les agglomérations successives, du Kremlin à l’oblast. Depuis le régime soviétique, cette extension a été planifiée, définie par des limites administratives. Pour la première fois au cours du premier plan quinquennal, un plan d’urbanisme se préoccupe d’organiser et de prévoir l’extension de la ville et la répartition de la population. Mais l’avant-guerre compta encore peu de réalisations. En 1948, Staline veut donner à la capitale de la Russie victorieuse une allure prestigieuse et fait construire les huit gratte-ciel, dont le plus élevé est l’université sur le mont Lénine (ancien mont des Oiseaux), puis les stations du métro, d’un luxe de goût discuté. Un plan datant de 1953 porte la superficie de la ville, marquée par la limite du pouvoir de son Conseil (Mossoviet), à 330 km2, contre 300 environ avant la guerre. En 1959, la superficie atteint, par annexion de quelques quartiers ou villages, 356 km2. Enfin, la dernière phase est marquée par le décret du 18 août 1960, qui porte le territoire du soviet à 875 km2 (886 actuellement), enfermé par la rocade routière circulaire d’où partent dans toutes les directions les routes nationales (appelées « autoroutes ») à deux ou quatre voies. Autour, une autre enveloppe limite une « zone protégée » à faible densité où ne sont situées qu’une dizaine de localités de quelques milliers d’habitants chacune, où la construction est en principe interdite et qui doit être réservée au repos (forêt, parcs, prairies, plans d’eau, lacs et réservoirs sur les rivières, comme la Kliazma), s’étendant sur 1 800 km2, ce qui porte la superficie du « Grand Moscou » (Mossoviet, plus ceinture protégée) à plus de 2 650 km2. Les villes incluses sont Mytichtchi, Balachikha à l’est, Lioubertsy au sud-est, Vidnoïe au sud... En même temps, le Soviet était divisé en 17 arrondissements (raïon), et la ceinture protégée en 5 raïon suburbains comprenant 111 localités, rurales et urbaines, et moins d’un million d’habitants.