Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

accouchement (suite)

L’accoucheur peut être amené à pratiquer d’autres interventions, à l’aide de ses seules mains : ce sont les versions et les extractions du siège. La version est une manœuvre obstétricale qui a pour but de transformer une présentation en une autre. Il en existe trois sortes. La version par manœuvres externes fait évoluer le fœtus en se servant des mains placées sur l’abdomen de la mère. Elle n’est guère réalisable que chez les multipares et se justifie dans certaines présentations de l’épaule ou du siège. La version par manœuvres internes fait évoluer le fœtus grâce à la main introduite dans la cavité utérine. Elle trouve son intérêt dans la présentation de l’épaule chez la multipare et dans celle du second jumeau. La version par manœuvres mixtes combine les deux gestes. La version est dite « céphalique » si l’on cherche à amener la tête à l’entrée du bassin ; elle est dite « podalique » si l’on cherche à y amener le siège. Les extractions du siège consistent à tirer le fœtus hors des voies vaginales en se servant des pieds du fœtus comme tracteurs. Les embryotomies étaient des opérations pratiquées par voie vaginale au cours de l’accouchement sur un fœtus qui avait succombé et étaient destinées à réduire ses diamètres de présentation, par perforation, écrasement ou section (cranioclasie, basiotripsie ou embryotomie rachidienne). Les extractions du siège et les embryotomies ont considérablement diminué de fréquence à notre époque et sont concurrencées par la césarienne*.

Les thérapeutiques médicamenteuses, outre celles à visées analgésiques qui ont déjà été envisagées, sont utilisées essentiellement pour modifier les contractions utérines dans un sens ou dans l’autre. Les antispasmodiques ont été les premiers utilisés pour lutter contre l’hypertonie utérine et les spasmes du col. Ils ne sont pas dangereux pour l’enfant et favorisent la progression de l’accouchement en facilitant la dilatation du col. À l’inverse, les médicaments qui renforcent les contractions utérines sont appelés substances ocytociques. La spartéine et la quinine sont des ocytociques mineurs. L’ocytocique par excellence est représenté par le principe actif ocytocique de la posthypophyse, administré en perfusion lente intraveineuse dans du sérum glucosé. La perfusion ne fait appel qu’à des doses minimes d’ocytocine, dont les effets sont très étalés. Alors que les voies d’introduction anciennes du produit n’utilisaient qu’un pouvoir de renforcement de la contraction (pas toujours sans danger pour le fœtus), la voie intraveineuse utilise une action harmonisante de la contraction utérine beaucoup plus intéressante. La perfusion lente de la posthypophyse améliore considérablement le pronostic général de la mère et de l’enfant, et constitue l’essentiel du traitement de la dystocie dynamique. On utilise souvent en association les antispasmodiques et la perfusion d’ocytociques. L’oxygénothérapie intermittente est un utile adjuvant de ces diverses méthodes.


Expulsion du placenta et des membranes, ou « délivrance »

Après la sortie du fœtus, les membranes et le placenta, qui constituaient avec lui et le liquide amniotique l’« œuf » à terme, sont expulsés. Cette expulsion, ou délivrance, évolue en trois phases.

• Décollement du placenta. Il se fait sous l’action de la rétraction passive de l’utérus, revenu sur lui-même, et de l’épanchement de sang entre placenta et utérus, qui clive la muqueuse et parfait le décollement. Cette période dure en moyenne une quinzaine de minutes.

• Expulsion du placenta. Sous l’influence de la reprise des contractions utérines, puis de son propre poids, le placenta tombe dans la partie inférieure de l’utérus. Les membranes, entraînées à leur tour, se décollent, puis se retournent en doigt de gant. L’ensemble placenta et membranes continue sa descente dans le vagin et arrive à l’orifice vulvaire, qu’il distend à nouveau. La délivrance spontanée est théoriquement possible ; elle est facilitée par l’accoucheur, dont la main gauche, empaumant le fond utérin, exerce une pression modérée et dont la main droite, saisissant le cordon ombilical, dirige, sans tirer, la sortie vers le haut.

• Hémostase. La délivrance s’accompagne d’une perte de sang de 300 ml environ. La limitation de cette déperdition est le fait de la rétraction utérine, qui étreint et obture les vaisseaux dans les anneaux musculaires, et de la coagulation sanguine, qui obture les orifices veineux. Pour que ces différents mécanismes puissent jouer, il faut un placenta normal, inséré normalement sur l’utérus et par l’intermédiaire d’une muqueuse normale ; il ne faut pas d’inertie du muscle utérin après l’accouchement ni de troubles de la coagulation. L’hémorragie de la délivrance est la plus redoutable des complications ; son abondance peut conduire à un état de choc obstétrical. Elle demande un traitement d’urgence, dont le but est d’évacuer complètement l’utérus, de le faire se rétracter de façon durable et de corriger d’éventuels troubles de la coagulation sanguine. Si le placenta est encore dans l’utérus, il faut pratiquer une délivrance manuelle « artificielle » ; s’il est déjà sorti, il faut s’assurer qu’il n’en reste pas en pratiquant une « révision utérine ». La rétention placentaire est la seconde complication possible. Elle se caractérise par l’absence d’expulsion du placenta une heure après la sortie du fœtus. Elle impose une délivrance artificielle. Elle peut être cause d’hémorragie. L’inversion utérine, ou retournement en doigt de gant de l’utérus, est devenue rare de nos jours en raison de la disparition des manœuvres intempestives et brutales sur le cordon et sur l’utérus. Le traitement chirurgical reste la seule ressource en cas d’échec de la réduction manuelle.


Les suites de couches

Cette période, dite encore « du post-partum », s’étend environ sur les six semaines qui suivent l’accouchement proprement dit. Elle est marquée par le retour progressif des organes génitaux vers leur état et leur situation d’avant la grossesse, et par l’établissement de la lactation. Au point de vue anatomique, cette involution de l’utérus se fait très progressivement : effacement de la cavité utérine, qui revient à l’état de cavité virtuelle ; disparition de l’imbibition gravidique du muscle ; élimination de la caduque, où s’implantait le placenta, et reconstitution d’une muqueuse utérine continue ; réduction de la musculature utérine par atrophie et dégénérescence de certaines fibres musculaires. Au point de vue clinique, les contractions utérines, qui assurent cette involution, se traduisent par des coliques utérines, appelées tranchées, surtout pénibles chez les multipares. L’élimination des débris de la caduque, des petits caillots issus de la plaie placentaire et de l’exsudation des petites plaies du col et du vagin se traduit par un écoulement d’abord sanglant, puis sérosanglant et séreux, constituant les « lochies ». Elle peut se prolonger sans anomalie au-delà de trois semaines ou redevenir sanglante vers le quinzième jour (petit retour de couches).

Le temps des suites de couches se termine normalement au bout de six semaines par le retour de la menstruation, ou retour de couches vrai. À ce moment, l’organisme a retrouvé son équilibre de non-gravidité, et généralement le retour de l’ovulation rend possible une nouvelle grossesse.