Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Marseille (suite)

Sur le plan des transports, la place de Marseille reste exceptionnelle en raison tout d’abord de la présence du port et de toutes les activités connexes liées à la navigation : compagnies maritimes, entreprises de manutention, transitaires, manutentionnaires, commissionnaires et agents divers. L’évolution du trafic aérien a nécessité la mise en place d’un aéroport de niveau international. À 25 km du centre, en bordure de l’étang de Berre, Marignane se situe au troisième rang français après Paris et Nice ; il s’achemine vers un volume de 2,3 millions de passagers annuels et de 15 000 t de fret et poste, dont un peu plus de la moitié pour le trafic intérieur et le tiers sur Paris. C’est aussi une escale pour les long-courriers des lignes africaines et une tête de pont vers la Corse, les Baléares et l’Afrique du Nord, sans compter les nombreuses liaisons avec toutes les grandes capitales européennes. Au total, Marignane assure la desserte d’une cinquantaine de destinations en service direct.

Le département est traversé par le grand axe touristique et commercial Paris-Lyon-Méditerranée, et par la R. N. 7, une des plus encombrées de France, dans l’attente de toutes les jonctions autoroutières vers l’Italie. Cela draine annuellement un nombre important de touristes, surtout durant l’été, vers les plages et les calanques, la Camargue et le festival d’Aix-en-Provence.

La place bancaire et financière est assez importante, atteignant presque, par ses effectifs, non par son influence, le niveau de Lyon. La place universitaire se développe, enlevant un peu de la suprématie aixoise par le nouveau complexe de Luminy. Enfin, sur le plan culturel l’Opéra, les divers musées et expositions, sur le plan de la presse les journaux quotidiens et revues périodiques montrent toute l’importance de la ville.

Son influence, son rayonnement peuvent être abordés à trois niveaux d’inégale importance et souvent difficiles à cerner.

Une zone proche couvre la majeure partie du département des Bouches-du-Rhône ; elle est intimement liée à la ville et discernable à travers les migrations alternantes de travailleurs. Au niveau de la ville voisine d’Aix, les échanges sont assez équilibrés ; par contre, des déséquilibres apparaissent au niveau d’Aubagne, débitrice par rapport à Marseille, et de Marignane, qui attire beaucoup plus de Marseillais qu’elle n’envoie de ses habitants. La métropole marseillaise présente une position assez effacée dans certains domaines, notamment le bâtiment et les travaux publics, qui s’exercent pleinement dans l’espace périurbain beaucoup plus que dans la ville. Il en va de même pour les industries mécaniques et chimiques en raison de spécialisations dans les centres proches de Marignane avec Sud-Aviation, de La Ciotat avec les chantiers navals, de Martigues avec Naphtachimie. De même, le secteur énergétique échappe à la ville avec la concentration des hydrocarbures autour de l’étang de Berre et l’implantation des Houillères de Provence à Gardanne.

Une zone d’influence prépondérante de la métropole marseillaise s’exerce sur un ensemble assez flou entre la frontière italienne et le Languedoc, au-delà de la vieille coupure rhodanienne : elle recouvre le département du Gard (Nîmes semblant de plus en plus attirée vers l’est), la partie orientale de l’Hérault, et s’étend jusqu’en Ardèche et sur une partie de la Drôme. L’ensemble toutefois est le plus souvent assez mal structuré, et l’animation pas toujours due aux initiatives marseillaises : la ville, tard venue à ce niveau de commandement régional, dépend de décisions nationales (investissements, implantations nouvelles, créations diverses).

Enfin, encore plus difficile à délimiter, mais cependant discernable, existe une « zone » présentant un certain nombre sinon d’attaches du moins de relations préférentielles avec Marseille, qui va du Maghreb à l’Afrique noire ; elle repose sur un héritage ancien d’ordre historique et colonial.


Conclusion

Quelles sont les possibilités de Marseille et de son aire métropolitaine, leurs chances de développement dans la France du Sud ? On assiste à la mise en place d’un organisme industriel de niveau international ; les nouvelles implantations s’effectuent de nos jours en fonction des critères différents de ceux qui ont présidé à la naissance des grandes concentrations du siècle dernier. Sur le triple plan de l’énergie, des transports et de l’approvisionnement en eau, Marseille est bien placée ; les importations de pétrole, l’équipement routier et ferroviaire de l’axe rhodanien, les aménagements du Rhône, de la Durance et du Verdon constituent autant d’atouts. Mais pour qui ?

Un premier problème se trouve ainsi posé, celui des liens entre la métropole marseillaise et l’« Europort du Sud ». Le secteur industriel marseillais ne peut négliger ce qui viendra de Fos, c’est-à-dire la sous-traitance, toutes les activités de transformation à l’aval de la production d’acier. Un grand danger découlerait du développement d’un pôle industriel de niveau européen indépendant, à quelque cinquante kilomètres d’une ville aux structures industrielles vieillies et au port languissant. En effet, il ne faut point se leurrer sur les chiffres bruts du trafic portuaire ; ils indiquent une progression incontestable, mais celle-ci est due essentiellement aux importations de produits pétroliers, qui masquent le rôle décroissant joué par les marchandises diverses ; le trafic colonial appartient désormais au domaine du passé depuis une décennie, au temps où l’ancien empire d’outre-mer alimentait et le commerce et l’industrie dans une ville qui vivait par lui et pour lui.

L’avenir apparaît donc de plus en plus lié à Fos ; mais cela implique une double obligation, l’accueil d’une masse importante de salariés et la mise en place d’un centre directionnel de niveau supérieur regroupant organes de décision et de gestion. Sur le plan intra-urbain, l’accélération d’un certain nombre de projets se révèle urgente, en particulier la restructuration du quartier Saint-Charles dans un cadre pour l’instant étriqué et saturé, insalubre et incommode.