Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

mâle (suite)

De l’ensemble des faits actuellement étudiés, il semble résulter que le sexe femelle est primordial et s’auto-différencie spontanément, alors que, dans le sexe mâle, une action androgène masculinisante, épigénétique impose l’état physiologique mâle en remplacement de l’état physiologique femelle primitif. Cette induction masculinisante explique les divers états d’intersexualité, d’hermaphrodisme momentané ou définitif, simultané ou successif.

Les traitements aux hormones sexuelles permettent expérimentalement de modifier et d’inverser le type sexuel ; ainsi, on réussit à fabriquer de faux mâles porteurs d’un phénotype mâle et d’un génotype femelle. Tous les caractères d’un sexe, même la nature de la gonade, peuvent ainsi être inversés ou modifiés ; seule la constitution héréditaire, le génotype sexuel, ne varie pas, ainsi que le prouve la nature de la descendance des « faux mâles ».

A. T.

➙ Chromosome / Dimorphisme sexuel / Femelle / Gamète / Génital / Hormone / Sexe.

 E. Wolff, les Changements de sexe (Gallimard, 1946). / K. Ponse, la Différenciation du sexe et l’intersexualité chez les vertébrés (Rouge, Lausanne, 1949). / M. Caullery, Organisme et sexualité (Doin, 1951). / P. Brien, Biologie de la reproduction animale (Masson, 1966). / C. Houillon, Sexualité (Hermann, 1967).

Malebranche (Nicolas de)

Philosophe français (Paris 1638 - id. 1715).


Après des études de philosophie et de théologie au collège de la Marche, puis à la Sorbonne, il entre à l’Oratoire en 1660. Cette formation explique son mysticisme philosophique, fidèle à l’augustinisme, proche de Platon, hostile à la tradition scolastique. La chronologie des œuvres de Malebranche rend compte de l’évolution interne de sa doctrine : l’oratorien prend de plus en plus ses distances vis-à-vis de Descartes*, inféodant toujours davantage sa propre théorie au dogme religieux. Chacun de ses ouvrages, de surplus, s’inscrit dans une polémique ad hominem.


La philosophie malebranchiste

Pour Malebranche, l’existence divine et sa véracité sont des connaissances naturelles de la raison plutôt que des articles de foi : « Il y a des vérités qui peuvent être prouvées par la raison aussi bien que par la tradition, comme l’immortalité de l’âme, le péché originel, la nécessité de la grâce... » (De la recherche de la vérité, livre III). La foi se trouve en mesure de sauver la raison de la contradiction : « Il faut que la foi nous conduise à l’intelligence » (Conversations chrétiennes), mais « il n’est pas nécessaire que nous sachions exactement les raisons de notre foi ». Ainsi est élaboré un programme d’utilisation de la philosophie au profit de la religion. Toutefois, c’est la même sagesse divine qui se manifeste par la révélation et par notre raison : la vérité révélée est la Raison.

Pour atteindre cette vérité, un précepte : se rendre attentif aux idées claires et distinctes et prévenir l’erreur dont sont responsables les deux facultés de l’esprit, l’entendement et la volonté.

L’entendement permet d’apercevoir plusieurs objets et de concevoir de multiples idées. Contrairement à Descartes, Malebranche le tient pour totalement passif.

La volonté met à même de recevoir différentes inclinations et de vouloir diverses choses. Cependant, de même que l’auteur de la nature est cause universelle de tous les mouvements matériels, il est aussi cause générale de nos inclinations naturelles ; celles-ci, en tant que nous les recevons de Dieu, seraient toujours tournées vers la possession de la vérité et du bien si la volonté n’était libre de détourner ce mouvement vers des objets particuliers. Le mal, ou le péché, n’est donc qu’une dépravation de l’amour divin ; les inclinations, la rançon de la liberté. Quant aux « passions mères », désir, joie, tristesse, elles semblent dériver de l’inclination. Si l’on considère qu’elles contribuent à la conservation de notre corps, il convient de les maîtriser, non de les extirper. L’entendement inclut la connaissance des objets par des idées ainsi que la conscience, par l’âme, de ses modifications. Que ces dernières se rapportent à des objets présents, nous les appellerons sens ; sinon, imagination. Les sens ne sont point trompeurs ; seule la volonté peut induire en erreur par des jugements précipités. Sens et imagination expriment l’esprit lui-même lorsque le corps est la cause naturelle ou occasionnelle de ses pensées.

Telle est la solution au problème cartésien de l’union de l’âme et du corps : la correspondance entre les idées de l’âme et les mouvements du corps vient d’une liaison établie par Dieu entre deux séries ; théorie du parallélisme, selon laquelle Dieu produit directement nos idées de l’entendement et agit indirectement à l’occasion de ce qui se passe dans notre corps. Imagination et sens appartiennent à cette seconde catégorie d’idées.

En outre, du fait que les corps n’ont nulle puissance sur les esprits et sont invisibles par eux-mêmes, il s’ensuit que notre connaissance porte non sur des objets, mais sur des idées, réelles, nécessaires, éternelles. Ce sont elles que nous percevons en voyant les corps, de sorte que seules sont effectives les visions intellectuelles. En outre, et à l’opposé des sentiments, particuliers et ineffables, ces idées s’avèrent être générales et par conséquent communicables ; grâce à elles, on conçoit que la vérité scientifique puisse être fondée en nature et transmissible.

Mais où assigner leur lieu d’origine ?
1. Dieu a nécessairement en lui les idées de toutes ses créatures ; sinon, il n’eût pu les produire.
2. Dieu « est étroitement uni à nos âmes par sa présence ».
3. L’esprit peut voir en Dieu ce qui représente les êtres créés, car cette vision en Dieu est spirituelle, intelligible. Elle est donc possible.
4. Pour que cette pure potentialité s’actualise, Dieu doit vouloir découvrir à l’esprit ce qui, en lui, représente ses ouvrages. En raison du principe de l’économie de toute la nature, il est légitime de supposer que Dieu procède ainsi. Voir les idées en Dieu, au demeurent, n’implique nullement que l’on voit Dieu en lui-même.