Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

lumière (suite)

On retrouve des phénomènes similaires chez les animaux. Sur les êtres humains, le rôle de la lumière est très important. On l’a reconnu d’abord sous forme d’une technique particulière, qui est la photothérapie. En lumière intense, des effets physiologiques très directs peuvent se manifester, allant jusqu’à des résultats brutaux tels qu’érythèmes et coups de soleil. Le plus souvent, les rayons ultraviolets ou infrarouges sont responsables de tels accidents, mais la lumière peut aussi être active. Elle se manifeste également par action secondaire sous l’effet de substances photosensibilisatrices, qui peuvent intervenir pour favoriser ou aggraver de tels accidents. En chromothérapie, on utilise des lumières colorées intenses ou spécialement dosées. La lumière bleue est utilisée dans le traitement de la jaunisse des nourrissons et pour calmer certains effets nerveux ; la lumière rouge permet de traiter diverses affections de la peau. Les lumières colorées ou nuancées ont aussi des effets psychologiques : la lumière rouge est excitante, l’orange facilite la digestion, le vert est équilibrant pour les nerfs et tempère la tension sanguine, le bleu est calmant. La lumière est nécessaire à la vie au même titre que la nourriture. Un individu privé de lumière crée dans son organisme des éléments photosensibilisateurs, tels que les porphyrines, dont la structure est assez voisine, au demeurant, de la chlorophylle des végétaux. Il s’ensuit des troubles physiologiques. Inversement, un homme qui, pour d’autres raisons, est atteint de porphyrie devient ultrasensible à la lumière et doit être traité dans une semi-obscurité.


La photochimie

Source d’énergie, la lumière peut agir sur des substances très diverses. Les photons absorbés par celles-ci peuvent agir comme éléments de dégradation ou de transformation non désirable. On dit alors qu’il y a photolyse. Si ces transformations sont, au contraire, recherchées en vue d’une utilisation pratique, on dit qu’il s’agit d’une opération photochimique.

Le rôle fondamental de la lumière dans la vie a été ressenti de très bonne heure et a conduit les hommes à faire de la lumière un symbole chargé de tous les bons éléments. Chez les Perses, le dieu Ahura-Mazdâ était à la fois le bien, le beau et la connaissance, par opposition à Ahriman, prince des ténèbres, qui était la personnification du mal. Chez les Égyptiens, on adora le Soleil sous forme du dieu Râ ou de Amon ; de même, le Soleil fut Mithra ou Apollon chez les Grecs et les Romains.

Une lumière était toujours allumée sur les autels familiers des Parsis, comme elle le sera plus tard dans le temple sous la garde des Vestales, dans les cimetières du Moyen Âge chrétien (lanterne des morts) et dans les synagogues.

Le terme même de lumière déborde largement sa signification physique pour devenir l’image de ce qui éclaire non plus les objets matériels, mais l’âme ou l’esprit. Ce sera la manière de désigner les hautes manifestations de l’intelligence ou du savoir.

Dans la Genèse, la lumière fut la première œuvre du Créateur. Celui-ci sépara la lumière des ténèbres et en fit le jour : Fiat lux.

M. D.

➙ Luminescence.

 V. Ronchi, Histoire de la lumière (A. Colin, 1956). / M. Déribéré, la Lumière dans notre vie (Éd. du Cap, Monte-Carlo, 1966). / R. Damaye, Optoélectronique (Éd. Radio, 1971).

Lumière (Louis)

Chimiste, inventeur et industriel français (Besançon 1864 - Bandol 1948).


Son père, Antoine Lumière, était photographe : après avoir vécu à Besançon, il s’était installé à Lyon, où il avait ouvert en 1880 dans le quartier Monplaisir un petit laboratoire spécialisé dans la fabrication des plaques au gélatino-bromure. Avec l’aide de son frère aîné, Auguste (Besançon 1862 - Lyon 1954), qui plus tard deviendra un biologiste de renom, Louis chercha à perfectionner l’entreprise familiale, qui avait connu des débuts difficiles et ne fut sauvée de la faillite que grâce à l’invention des plaques photographiques appelées Étiquette bleue, qui rencontrèrent vite un vif succès partout dans le monde. L’usine lyonnaise prit alors peu à peu une extension considérable. En 1893 fut créée la Société Antoine Lumière et ses fils, dirigée en fait par ces derniers, qui employaient environ 300 ouvriers.

En 1894, Antoine Lumière, à qui l’on avait présenté un Kinétoscope, s’enthousiasma tellement pour l’invention d’Edison* qu’il n’eut de cesse de pousser ses fils à imaginer la fabrication d’un « appareil servant à l’obtention et à la vision des épreuves chronophotographiques ». En fait, dès que les Kinétoscopes furent mis dans le commerce (fin avr. 1894), ce fut parmi tous les chercheurs une véritable course à l’invention. La plupart d’entre eux travaillèrent dans la plus complète ignorance des résultats de leurs concurrents, ce qui explique les longues polémiques ultérieures qui surgiront lorsqu’il s’agira d’établir quel fut le véritable créateur du cinéma. Georges Demenÿ (1850-1917), qui avait à la fin de l’année 1894 sollicité Louis Lumière de « trouver une solution pratique afin d’utiliser le travail qu’[il] avait produit », devait publier en 1909 une brochure dans laquelle il affirmait être le premier inventeur du septième art (mais sa caméra à came excentrée n’était nullement réversible et ne pouvait en aucune façon être utilisée comme projecteur). À la fin de 1894, Louis Lumière découvrit l’entraînement à came porte-griffes et mit au point en une nuit le cinématographe, dont le premier brevet fut déposé le 13 février 1895. Il est à noter pourtant que le vocable cinématographe appartient non pas aux frères Lumière, mais à Léon Bouly pour un projet qui ne fut pas réalisé. À la mi-mars, Louis Lumière tourne son premier film, la Sortie des usines Lumière à Lyon-Monplaisir (lre version), qu’il projette en séance publique le 22 mars à la Société d’encouragement pour l’industrie nationale, à Paris, 44, rue de Rennes. Sitôt après la séance, l’ingénieur Jules Carpentier (1851-1921) proposa ses services pour la fabrication commerciale du nouvel appareil, qui pouvait servir à la prise de vues comme à la projection grâce à un disque obturateur dont l’ouverture était modifiable. La première séance publique et payante (à laquelle, soit dit en passant, n’assistèrent ni les frères Lumière ni Carpentier) eut lieu le 28 décembre 1895 dans le salon indien du Grand Café, boulevard des Capucines, à Paris. Louis Lumière, tout en refusant de céder son appareil à quelques spectateurs alléchés — dont Georges Méliès*, qui lui en offrait 10 000 francs (« C’est un grand secret que cet appareil et je ne veux pas le vendre : je veux en faire moi-même et exclusivement l’exploitation ») — n’était pas absolument certain de l’avenir de son invention. Tout en engageant plusieurs photographes qui deviendront ainsi les premiers grands opérateurs mondiaux, il leur confiait : « Vous savez, ce n’est pas une situation d’avenir que nous vous offrons, c’est plutôt un métier de forain. Cela peut durer six mois, une année, peut-être moins » (propos rapporté par l’un de ces pionniers : Félix Mesguich, qui allait bientôt parcourir les continents et « chasser » l’image, pour le compte de son employeur). De 1896 à 1898, la société du cinématographe Lumière produisit plus de 800 films, parmi lesquels une quarantaine seulement pourraient être attribués à Louis Lumière lui-même. Ce dernier entendit bientôt concentrer dans ses mains à la fois la production, la distribution et l’exploitation de son invention, mais ce monopole ne dura guère. La société cessa pratiquement de produire des films à la fin de 1898, la concurrence américaine se montrant de plus en plus impitoyable. Tout en continuant à diriger l’usine familiale (il en abandonnera la direction en 1920), Louis Lumière se passionnera désormais exclusivement pour la recherche scientifique, point trop mécontent au demeurant de laisser entendre qu’il n’avait été que l’apprenti sorcier du septième art et que sa véritable vocation était davantage celle d’un chercheur que celle d’un pionnier de la mise en scène. En 1899, il expérimenta le photorama (qui permit d’obtenir sur une seule plaque l’image continue d’un tour d’horizon), perfectionna l’écran géant (projections sur un écran de 24 m × 30 m, dimensions ramenées à 16 m × 21 m lors de l’Exposition universelle de Paris), déposa un brevet pour le cinéma stéréoscopique (1900) un autre sur les plaques autochromes (1903), un troisième pour la construction d’un haut-parleur en papier plissé. Pendant la Première Guerre mondiale, il travailla au repérage acoustique des avions et créa pour l’aéronautique un réchauffeur catalytique. Passionné par la photo en relief, il présenta à l’Académie des sciences la photostéréosynthèse en 1920. En 1935, son procédé de cinéma en relief grâce aux anaglyphes fut communiqué à cette même académie (la première publique aura lieu le 1er mai 1936).

J.-L. P.

 M. Bessy et J. M. Lo Duca, Louis Lumière, inventeur (Prisma, 1948). / G. Sadoul, Louis Lumière (Seghers, 1964).