Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

Louis VII le Jeune (suite)

Le gouvernement du royaume

Malgré ces difficultés extérieures, le roi de France renforce son autorité dans son domaine. Gouvernant avec des clercs de la chapelle, voire de simples roturiers, Louis VII réside plus fréquemment à Paris, crée de nouvelles prévôtés, combat la tendance à l’hérédité des offices royaux et achève l’œuvre paternelle de soumission des châtelains de l’Île-de-France. Dans les campagnes, il facilite l’émancipation des serfs, la diffusion de la charte de Lorris en Gâtinais, la multiplication des villes neuves (Villeneuve près de Compiègne, etc.) et donc celle des défrichements. Enfin, prenant appui sur les villes contre les féodaux, il octroie de nombreuses chartes de bourgeoisie (à Étampes, à Bourges) et soutient hors de son domaine l’essor du mouvement communal, notamment à Reims, à Sens, à Compiègne, à Auxerre, tout en s’efforçant de se faire reconnaître comme le protecteur naturel des églises du royaume, à la tête desquelles il suscite l’élection d’évêques dévoués à sa cause.

Ayant fait sacrer son fils, le futur Philippe II Auguste, le 1er novembre 1179, il meurt le 18 septembre 1180, laissant à ce dernier le soin de parachever son œuvre : l’abaissement des Plantagenêts.

P. T.

➙ Aquitaine / Capétiens / Croisades / Henri II Plantagenêt / Philippe II Auguste / Suger.

 A. Luchaire, Études sur les actes de Louis VII (Picard, 1885) ; Louis VII, Philippe Auguste, Louis VIII, dans Histoire de France, sous la dir. d’E. Lavisse (Hachette, 1901). / R. Hirsch, Studien zur Geschichte König Ludwigs VII. von Frankreich (Leipzig, 1892). / E. de Deuil, la Croisade de Louis VII, roi de France (Geuthner, 1 949). / M. Pacaut, Louis VII et les élections épiscopales dans le royaume de France (Vrin, 1957) ; Louis VII et son royaume (S. E. V. P. E. N., 1964).

Louis IX ou Saint Louis

(Poissy 1214 - Tunis 1270), roi de France de 1226 à 1270.



Minorité et régence (1226-1234)

Âgé de douze ans à son avènement, Louis IX n’est proclamé majeur qu’en 1234 et n’assume en fait le pouvoir qu’à partir de 1245. Jusqu’à cette date, et de nouveau de 1248 à 1252, pendant la croisade d’Égypte, le sort du royaume est entre les mains de l’énergique Espagnole qu’est la reine mère, Blanche de Castille (1188-1252). La régente maintient en place les conseillers expérimentés de Philippe Auguste et de Louis VIII, (frère Guérin [v. 1157-1227], chancelier de France, et Barthélemy de Roye, chambrier de France) et fait appel aux membres des familles seigneuriales d’Île-de-France depuis longtemps attachées à la dynastie capétienne (Gautier Cornu, archevêque de Sens et remarquable ministre ; Mathieu de Montmorency [v. 1174-1230], connétable de France et habile homme de guerre). Elle bénéficie en outre des conseils d’un Italien, Romain Frangipani, cardinal de Saint-Ange et légat du pape.

Avec son aide, elle met d’abord un terme définitif à la croisade des albigeois en imposant à Raimond VII la signature du traité de Paris du 11 avril 1229, par lequel ce prince confirme l’annexion au domaine royal des sénéchaussées de Nîmes-Beaucaire et de Béziers-Carcassonne et accepte de donner en mariage sa fille et unique héritière Jeanne de Toulouse au frère du jeune roi, Alphonse de Poitiers. Avec le concours du légat, la régente brise également la révolte de Philippe Hurepel, fils de Philippe Auguste et d’Agnès de Méran, auquel se joignent les barons hostiles à ce que la régence soit exercée par une femme — surtout étrangère : le comte de Champagne, Thibaud IV et surtout le baillistre de Bretagne, Pierre de Dreux, dit Mauclerc. Ébauchée à l’automne 1226, marquée par d’inquiétantes abstentions au sacre de Louis IX le 29 novembre, une première coalition féodale échoue dès le printemps 1227.

Mais elle se reconstitue presque aussitôt. Mis en échec par les Parisiens, qui prennent sous leur protection le jeune roi, vaincus dans le Perche en janvier 1229, privés de l’appui du comte de Toulouse en avril 1229, les révoltés reprennent les armes en 1230 avec l’appui du roi d’Angleterre Henri III, qui est accueilli à Saint-Malo le 3 mai par Pierre Mauclerc. La soumission de Philippe Hurepel en septembre, le retour outre-Manche du Plantagenêt en octobre mettent fin à la révolte avant que la paix avec l’Angleterre et la Bretagne ne soit consolidée, par les trêves de juillet 1231, qui laissent à Louis IX Bellême et Angers (où il fait édifier le célèbre château fort qui pare aujourd’hui encore cette ville). Ces trêves sont confirmées par les accords de Paris de novembre 1234 avec Pierre Mauclerc et d’août 1235 avec Henri III ; elles permettent à Blanche de Castille de léguer à son fils un royaume en paix.


Un roi mystique

Élevé « noblement » par sa mère dans la crainte du péché mortel, le jeune roi fait preuve dès son avènement d’une piété profonde. Grand et mince, mais de santé délicate, il s’astreint pourtant à assister chaque jour à la totalité de l’exercice divin ; portant le cilice, se faisant administrer la discipline, pratiquant secrètement la charité, ce roi, plus soucieux de morale que de théologie, ne s’en avère pas moins fort imbu de son autorité, divinisée par le sacre.

À l’exception de l’ancienne régente, qui lui impose pour épouse en 1234 l’intrigante Marguerite de Provence, aucun membre de sa famille ne peut se substituer à lui dans l’exercice du pouvoir. L’expérience maternelle l’aide d’ailleurs à faire face au soulèvement cathare en Languedoc en 1240, et surtout à l’intervention anglaise consécutive au défi que Hugues de Lusignan lui adresse le 25 décembre 1241. Vaincu à Taillebourg et à Saintes le 31 juillet 1242, le roi d’Angleterre Henri III se réfugie à Blaye, tandis que Raimond VII signe la paix de Lorris, qui confirme en janvier 1243 les clauses du traité de Paris de 1229 et permet aux troupes royales de faire tomber les dernières places albigeoises : Montségur en 1244, Quéribus en 1245.